Ce mot est presque vide de sens dans nos institutions ecclésiastiques, ou plutôt dans le caractère que le temps leur a donné. La discipline est à l’ordre ecclésiastique ce que la police est à l’ordre civil ; mais le citoyen, bon gré mal gré, est assujetti à la loi : il n’en est pas ainsi du membre de l’Eglise ; et quand la loi de l’Eglise n’a plus la sanction de l’opinion, on peut dire qu’elle n’est plus loi. L’exécution des peines disciplinaires n’a plus ni garantie civile, ni conséquences extérieures ; ainsi la sanction du dehors ne supplée pas à celle du dedans : en un mot, la discipline manque d’un point d’appui. Il ne reste plus que ce que le pasteur s’attribue individuellement et ce qu’on accepte individuellement. Et il faut bien convenir que le peu qui reste, à travers un affranchissement extérieur si complet, est meilleur à proportion du peu.
On ne peut se dispenser de rendre les ministres attentifs à un écueil que tel d’entre eux ne soupçonne pas même. Les remontrances ou répréhensions, qui sont une partie de la discipline pastorale, s’exercent beaucoup plus aisément sur les pauvres et les chétifs que sur les riches et les grands. On est tenté de peser très fort sur les uns pour n’appuyer que légèrement sur les autres. Cela ne fait pas compensation. Et le pasteur n’est digne de sa mission que lorsqu’il fait valoir son autorité envers toutes les âmes indistinctement, qui ne sont pour lui que des âmes. D’où il ne faut pourtant pas conclure qu’aucune distinction, dans la manière et dans la forme, ne doive être observée. Les mêmes moyens ont une différente valeur selon la personne à laquelle on les applique ; et l’on pourrait, dans l’intention de respecter l’égalité, traiter les âmes fort inégalement.
L’excommunication proprement dite ne saurait avoir lieu dans une Eglise qui est expressément l’Eglise de tout le monde. Les communiants n’ont de juges qu’eux-mêmes. C’est à eux de prendre garde de manger et de boire leur condamnation à la table de Jésus-Christ. Là où l’Eglise appartient au peuple politique, et où le consentement général a cessé d’appuyer les rigueurs de la discipline, on ne peut pas songer à l’exercer, à moins de rétablir les conditions de son existence, ce qui ne peut se faire que sur un autre terrain. Le devoir du pasteur n’en est pas moins d’écarter de la cène, par des représentations faites en particulier, les individus qu’il juge ne pouvoir sans danger participer, à ce repas sacré, et de les avertir collectivement du haut de la chaire. La même règle, et nulle autre, s’applique aux officiants.