portant dans le manuscrit la date de l’an 1100.
D. Le pasteur. — Si l’on te demandait qui es-tu ? Réponds.
R. L’enfant. — Créature de Dieu raisonnable et mortelle.
D. Le pasteur. — Pourquoi Dieu t’a-t-il créé ?
R. L’enfant. — Afin que je le connaisse lui-même, et que je le serve, et qu’ayant sa grâce (la grâce de lui-même) je sois sauvé.
D. En quoi consiste (se trouve) ton salut ?
R. En trois vertus essentielles (substancielles), appartenant nécessairement au salut.
D. Quelles sont-elles ?
R. La foi, l’espérance et la charité.
D. Par quoi prouveras-tu cela ?
R. L’Apôtre écrit, 1 Corint., XIII : Ces (trois) choses demeurent, la foi, l’espérance et la charité.
D. Qu’est-ce que la foi ?
R. Selon l’Apôtre, Héb., XI, c’est une subsistance (représentation) des choses qu’on doit espérer et une preuve de celles qu’on ne voit pas (qui ne se montrent pas).
D. De combien de sortes est la foi ?
R. De deux sortes, c’est-à-dire, vivante et morte.
D. Quel est la foi vivante ?
R. C’est celle qui opère par la charité.
D. Quel est la foi morte ?
R. Selon saint Jacques, la foi, si elle n’a pas les œuvres, est morte. Et encore : la foi est nulle (oisive) sans les œuvres. Ou bien, la foi morte, c’est croire qu’il y a un Dieu, croire de Dieu, et non croire en Dieu.
D. De laquelle foi es-tu ?
R. De la véritable foi catholique (universelle) et apostolique.
D. Quelle est-elle ?
R. C’est celle qui, selon le conseil (l’enseignement) des apôtres, est divisée en douze articles.
D. Laquelle est-elle ?
R. Je crois en Dieu le Père tout-puissant, etc.
D. Par quoi peux-tu connaître que tu crois en Dieu ?
R. Par ceci. C’est que je connais et observe (garde) les commandements de Dieu.
D. Combien y a-t-il (sont) de commandements de Dieu ?
R. Dix, comme on le voit dans l’Exode et le Deutéronome.
D. Quels sont-ils ?
R. O Israël, écoute ton Seigneur. Tu n’auras pas un dieu étranger devant moi. Tu ne te feras aucune image taillée ni aucune ressemblance de toutes les choses qui sont au ciel, etc.
D. A quoi se réduisent tous (dépendent) ces commandements ?
R. En deux grands commandements, c’est-à-dire, aimer Dieu au-dessus de toutes choses, et le prochain comme toi-même.
D. Quel est le fondement de ces commandements, par lesquels un chacun doit entrer en la vie, sans lequel fondement on ne peut dignement faire (suivre) ni accomplir les commandements ?
R. Le Seigneur Jésus-Christ duquel l’Apôtre dit, 1 Corint., III, 11 : Nul ne peut poser d’autre fondement excepté celui qui est posé, qui est Jésus-Christ.
D. Par quoi (quel moyen) l’homme peut-il arriver à ce fondement ?
R. Par la foi, saint Pierre disant : Voici (voyez-vous) je poserai en Sion la principale (première) pierre de l’angle, choisie et précieuse, celui qui croira en elle ne sera pas confus. Et le Seigneur dit : Celui qui croit en moi a la vie éternelle.
D. De quelle manière peux-tu connaître que tu crois ?
R. En ceci, que je le connais lui-même, vrai Dieu et vrai homme, (qui est) né et qui a souffert, etc., pour ma rédemption, ma justification, etc., (que) je l’aime et que je désire accomplir ses commandements.
D. Par quelles choses (quels moyens) peut-on parvenir aux vertus essentielles ; savoir, la foi, l’espérance et la charité ?
R. Par les dons du Saint-Esprit.
D. Crois-tu au Saint-Esprit :?
R. J’y crois. Car le Saint-Esprit, procédant du Père et du Fi!s, est une personne divine de la Trinité, et, quant à la divinité, il est égal au Père et au Fils.
D. Tu crois en Dieu le Père, en Dieu le Fils, en Dieu le Saint-Esprit ; savoir, en trois personnes ; tu as donc trois dieux ?
R. Je n’en ai pas trois.
D. Et pourtant (pourquoi) tu en as nommé trois ?
R. Cela est (vrai) à l’égard de la différence (ou distinction) des personnes ; mais non à l’égard de l’essence de la divinité. Car qu’il soit ainsi, qu’il y a trois personnes, il est pourtant un en essence.
D. Ce Dieu en qui tu crois, comment (en quelle manière) l’adores-tu, et le sers-tu ?
R. Je l’adore par adoration de latrie extérieure et intérieure. Extérieure par ploiement de genoux, élévation de mains, par inclination (du corps), par des hymnes, par des chants spirituels, par jeûnes et par invocations. Mais intérieurement, (je l’adore) par une pieuse affection, par une volonté préparée à tout ce qui lui plaît, mais je le sers par la foi, par l’espérance et par la charité, selon ses commandements.
D. Adores-tu quelque autre chose et la sers de la même manière que Dieu ?
R. Non.
D. Pourquoi ?
R. A cause du commandement qu’il a donné, disant strictement : Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu le serviras lui seul. Et encore : Je ne donnerai point ma gloire à d’autres. De rechef :
Je suis vivant, dit le Seigneur, et tout genou ploiera devant moi. Et Jésus-Christ dit : Ils seront vrais adorateurs ceux qui adorent le Père en esprit et en vérité. Et l’ange ne voulut pas être adoré de saint Jean, ni Pierre de Corneille.
D. De quelle manière pries-tu ?
R. Je prie (en répétant) la prière donnée par le Fils de Dieu, disant : Notre Père qui es aux cieux.
D. Quelle est l’autre vertu essentielle qui appartient nécessairement au salut ?
R. C’est la charité.
D. Qu’est-ce que (quelle chose est) la charité ?
R. C’est un don du Saint-Esprit par lequel est réformée l’âme en volonté, éclairée par la foi, par laquelle je crois tout ce qu’il faut croire, (et) j’espère tout ce qu’il faut espérer.
D. Crois-tu en la sainte Eglise ?
R. Non, car elle est une créature ; mais je crois d’elle-même (savoir qu’elle existe).
D. Que crois-tu de la sainte Eglise ?
R. Je dis d’elle-même, que l’Eglise doit être (considérée) de deux manières, l’une sous le rapport de sa substance (nature ), l’autre sous le rapport du ministère. Sous le rapport de la substance, la sainte Eglise catholique (universelle) se compose de (sont) tous les élus de Dieu, depuis le commencement jusqu’à la fin, (qui sont) en la grâce de Dieu par le mérite de Christ, assemblés par le Saint-Esprit, et auparavant destinés (ordonnés) à la vie éternelle, desquels le nombre et les noms ne sont connus que de celui qui les a élus. Finalement dans cette Eglise ne demeure aucun proscrit (ou exclu). Mais l’Eglise, sous le rapport du ministère, comprend les ministres de Christ avec le peuple soumis, profitant du ministère par la foi, l’espérance et la charité.
D. Par quelle chose (marque) dois-tu connaître l’Eglise de Christ ?
R. Par des ministres convenables et par un peuple qui participe en vérité aux ministères.
D. Mais par quelle chose connais-tu les ministres (convenables) ?
R. Par le vrai sens de la foi, par une saine doctrine, par une vie de bon exemple, par la prédication de l’Evangile, et par une due administration des sacrements.
D. Par quelle chose connais-tu les faux ministres ?
R. Par leurs fruits, par leur aveuglement, par une mauvaise conduite, par une doctrine perverse et par une indue administration des sacrements.
D. Par quoi se connaît l’aveuglement (des ministres) ?
R. C’est lorsque ne connaissant (sachant) pas la vérité qui appartient nécessairement au salut, ils gardent les inventions humaines, comme des commandements de Dieu, à l’égard desquels se vérifie cette parole d’Esaïe que Christ allègue, Matth., XV : Ce peuple m’honore des lèvres, mais leur cœur est loin de moi, mais ils me servent en vain, enseignant les doctrines et les commandements des hommes.
D. Par quoi est connue la mauvaise conduite (opération) ?
R. Par les péchés manifestes, à l’égard desquels l’Apôtre
dit, Rom., I : Ceux qui font de telles choses n’obtiendront pas le règne (royaume) de Dieu.
D. Par quoi peut être connue la mauvaise doctrine ?
R. C’est quand elle enseigne contre la foi et l’espérance ; savoir, comme l’idolâtrie rendue de plusieurs manières à la créature raisonnable et non raisonnable, sensible, ou visible et invisible. Car le Père avec son Fils et le Saint-Esprit doit être servi, et non aucune créature, quelle qu’elle soit. Mais contre ceci, on l’attribue à l’homme, à l’ouvrage de ses mains, ou à ses paroles ou à son autorité, de manière que l’homme, croyant aveuglément, estime ces choses ajoutées à Dieu, (et cela) par une fausse religion et par l’avare simonie des prêtres.
D. Par quoi connaît-on l’indue administration des sacrements ?
R. C’est lorsque les prêtres n’entendent pas l’esprit (le sens) de Christ, et ne connaissant pas son intention (but) dans les sacrements, disent que la grâce et la vérité sont renfermées dans les seules cérémonies extérieures, et amènent les hommes à recevoir les mêmes sacrements, sans (qu’ils aient) la vérité de la foi, de l espérance et de la charité ; et le Seigneur garde les siens de tels faux prêtres, disant : Gardez-vous des faux prophètes. Item. Gardez-vous des pharisiens, c’est-à-dire, de leur levain ; savoir, de leur doctrine. Item. Ne les croyez pas (ne veuillez pas croire) ; n’allez pas après eux. Et David hait l’église de telles gens, en disant : J’ai en haine l’église des méchants. Et le Seigneur commande de sortir (du milieu) de telles gens, Nomb., XVI : Eloignez-vous des tabernacles des méchants (rebelles), et ne touchez pas les choses qui leur appartiennent, afin que vous ne soyez pas enveloppés dans leurs péchés. Et l’Apôtre, 2 Corint., VI, 14 : Ne traînez ’pas le joug avec les infidèles. Car quelle participation (y a-t-il) de la justice avec l’iniquité, quelle union entre la lumière et les ténèbres, quel accord entre Christ et Bélial (diable), ou quelle part le fidèle (a-t-il) avec l’infidèle, et quel rapport (y a-t-il) entre le temple de Dieu et les idoles ? C’est pourquoi sortez du milieu d’eux et soyez séparés, dit le Seigneur. Ne touchez pas celui (ou ce) qui est impur, et je vous recevrai. Item. 2 Thess., III, 6 : O frères, nous vous annonçons que vous vous gardiez de tout frère qui marche dans le dérèglement. Item. Apocal., XVIII, 4 : Sortez, mon peuple, du milieu d’elle, et ne soyez point participants de ses péchés, afin que vous n’ayez pas part à ses plaies.
D. Par quoi est reconnu le peuple qui n’est pas en vérité en l’Eglise ?
R. Par les péchés publics et par une foi erronée. Or, il faut fuir de telles gens, afin que la souillure ne nous vienne pas d’eux.
D. Par quoi dois-tu communiquer à la sainte Eglise ?
R. Je dois avoir communion avec l’Eglise, à l’égard de l’essence de la foi, par l’espérance, par la charité, par l’observation des commandements, et, enfin, par la persévérance à faire le bien.
D. Combien y a-t-il de choses qui appartiennent au ministère ?
R. Deux, la parole (prédication de l’Evangile) et les sacrements.
D. Combien y a-t-il de sacrements (sont les sacrements) ?
R. Deux : savoir, le baptême et l’eucharistie.
N. B. C’est-à-dire, deux sont nécessaires et communs à tous. Les autres ne sont pas tant nécessaires, etc.
D. Quelle est la troisième vertu nécessaire à salut ?
R. L’espérance.
D. Qu’est-ce que l’espérance ?
R. C’est une attente certaine de la grâce et de la gloire à venir.
D. Par quoi espère-t-on la grâce ?
R. C’est la rédemption, la rémission des péchés, la justification, l’adoption, la sanctification.
D. Par quoi espère-t-on (est espérée) cette grâce en Christ ?
R. Par une foi vive et par une véritable repentance, Jésus-Christ disant : Repentez-vous et croyez à l’Evangile.
D. D où procède l’espérance ?
R. Du don de Dieu et des promesses, à l’égard desquelles l’Apôtre dit : Il est puissant pour accomplir quoi que ce soit qu’il promet. Car lui-même a promis que, si quelqu’un l’aura connu, se sera repenti et aura espéré, il veut, en effet, avoir miséricorde, pardonner, justifier, etc.
D. Quelles choses éloignent (dévient) de cette espérance ?
R. Une foi morte, la séduction de l’Antechrist, (la montrant) en autre qu’en Christ, c’est-à-dire (la plaçant) dans les saints, dans sa propre puissance et autorité, dans des paroles, des bénédictions, dans des sacrements, dans les reliques des morts, dans le purgatoire rêvé et feint, en enseignant qu’on a cette espérance par des moyens directement contraires à la vérité et contraires aux enseignements de Dieu, comme par une idolâtrie variée et par une simonie dépravée, etc. ; abandonnant la source des eaux vives accordée par grâce, pour courir vers les citernes plus haut mentionnées, adorant, honorant, servant la créature comme le Créateur, la servant par des oraisons, par des jeûnes, par des sacrifices, des dons, des offrandes, des pèlerinages, par des invocations, etc. Eux se confiant d’obtenir grâce, laquelle personne n’a pour la donner, sinon Dieu seul en Jésus-Christ. Ainsi travaillant en vain, ils quittent (laissent) leur argent et leur vie ; et, assurément, non-seulement la vie- présente, mais aussi celle à venir ; c’est pourquoi il est dit : L’espérance des méchants périra.
D. Que dis-tu de la bienheureuse vierge Marie ? car elle est pleine de grâce, comme dit (témoigne) l’ange ?
R. La bienheureuse vierge fut et est pleine de grâce quant à elle-même (à son besoin), mais non quant à une communication aux autres. Car son seul Fils est plein de grâce pour en faire part (quant à la participation), comme il est dit de lui : Et nous tous recevons grâce sur grâce de sa plénitude.
D. Ne crois-tu pas la communion des saints ?
R. Je crois qu’il y a deux choses en quoi les saints ont communion entre eux. Les unes (de ces choses) sont substantielles, les autres ministérielles. Ils ont communion aux (choses) substantielles par le Saint-Esprit en Dieu, par le mérite de Jésus-Christ. Mais ils ont communion aux (choses) ministérielles ou ecclésiastiques par les ministères faits dûment, tels que (comme sont) par paroles, par les sacrements et par les prières. Je crois l’une et l’autre de ces communions des saints. La première seulement en Dieu, et en Jésus-Christ, et au Saint-Esprit, spirituellement. L’autre en l’Eglise de Christ.
D. En quoi consiste la vie éternelle (de quoi dépend la vie éternelle) ?
R. En (de) une foi vivante et opérante, et en la persévérance en elle. Le Sauveur dit, Jean, XVII, 3 : C’est ici la vie éternelle qu’ils te connaissent, seul vrai Dieu et Jésus- Christ que tu as envoyé. Et celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé. Amen.