Une fois qu’il a reçu la rémission de ses péchés, l’homme ne doit donc plus faillir, parce que la première pénitence, celle des fautes qui souillèrent la vie de paganisme, c’est-à-dire la vie d’ignorance, est la meilleure. Elle est proposée à ceux qui ont été appelés comme purification de l’âme pour y établir la foi. Mais le Seigneur qui lit dans le secret des cœurs et connaît l’avenir, a prévu d’en haut et dès le commencement l’inconstance de l’homme, son penchant aux rechutes, et les artifices du démon. Il n’ignore pas que l’ange du mal, jaloux de ce que l’homme jouit du privilège de la rémission des péchés, suggérera des occasions de faillir aux serviteurs de Dieu, et que sa malice leur tendra habilement des pièges pour les entrainer dans sa ruine. Dieu l’a prédit, et dans l’abondance de sa miséricorde, il a fait don d’une seconde pénitence aux enfants de la foi qui viendraient à tomber ; afin que si la faiblesse, cédant à la force ou à la séduction, se laissait tenter, elle reçût une seconde pénitence, celle après laquelle il n’y a plus de pénitence.
« Car, si nous péchons volontairement après avoir reçu la connaissance de la vérité, il n’y a plus désormais de victime pour les péchés, mais il ne nous reste qu’une attente terrible du jugement, et le feu vengeur qui dévorera les ennemis de Dieu. »
Ceux dont les pénitences et les fautes se succèdent continuellement ne diffèrent en rien de ceux qui n’ont pas encore la foi, sinon qu’ils ont péché avec connaissance de cause. Et je ne sais ce qu’il y a de plus funeste, ou de pécher sciemment, ou de se repentir de ses péchés et d’y retomber de nouveau ; des deux côtés la faute est évidente. Ici, pendant l’acte même, l’iniquité est condamnée par l’ouvrier de l’iniquité ; là, l’auteur du péché le connaît avant de le commettre, et pourtant il s’y livre avec la conviction que c’est un mal. L’un se fait l’esclave de la colère et du plaisir, n’ignorant pas à quels penchants il s’abandonne ; l’autre qui, après s’être repenti de ses vices, se replonge de nouveau dans la volupté, touche de près à celui qui, dès le principe, pèche volontairement ; faire succéder au repentir d’un péché. l’acte de ce même pèche, tout en le condamnant, n’est-ce pas le commettre avec connaissance de cause ? Celui donc d’entre les gentils qui, de sa vie antérieure et profane, a pris son vol vers la foi, a obtenu d’un seul coup la rémission de tous ses péchés. Mais celui qui, pécheur relapse, s’est ensuite repenti, lors même qu’il obtient son pardon, doit rougir de honte, comme n’étant plus lavé par les eaux baptismales pour la rémission des péchés. Car il faut qu’il renonce, non-seulement aux idoles dont il se faisait auparavant des dieux, mais encore aux œuvres de sa vie antérieure, l’homme qui est né à la foi, non du sang ni de la volonté de la chair, mais qui a été régénéré dans l’esprit; ce qui arrivera si, fidèle à ne pas retomber dans le même péché, il se repent avec sincérité. Je le répète, la fréquence du repentir est trop souvent une sorte de complaisance pour le péché, une disposition à la rechute, faute de s’exercer à la pénitence réelle. Ce n’est donc pas la pénitence, mais le semblant de la pénitence, que de toujours implorer son pardon pour des fautes toujours commises.
« La justice aplanira les sentiers du juste, »
dit l’Écriture ; puis ailleurs :
« La justice aplanit la voie de l’innocent. »
David lui-même écrit :
« Comme un père s’attendrit sur ses enfants, ainsi le Seigneur a pitié de ceux qui le craignent. Ceux qui ont semé dans les larmes moissonneront dans l’allégresse, »
dit-il encore de ceux qui, dans la pénitence, confessent le Seigneur. Heureux ceux qui craignent le Seigneur. On trouve, dans l’Évangile, une semblable définition de la félicité :
« Ne craignez pas l’homme, quand il multipliera ses richesses et qu’il étendra la gloire de sa maison. À la mort, il n’emportera pas son opulence, et sa gloire ne descendra pas avec lui dans le tombeau. Pour moi, grâce à votre miséricorde, j’entrerai dans votre demeure ; je me prosternerai dans la crainte devant votre sanctuaire. Seigneur, conduisez-moi dans votre justice. »
Le désir est donc un mouvement timide de l’esprit, qui nous porte vers un objet ou nous en éloigne ; la passion, un désir exagéré, poussé au delà des bornes, sans frein et rebelle à ce que demande la raison. Les passions sont donc des perturbations contre nature, qui agitent l’âme et la soulèvent contre la raison. La défection, l’égarement et la désobéissance sont en notre pouvoir aussi bien que l’obéissance. C’est pourquoi tout acte volontaire est passible de jugement. Quiconque voudra s’attacher à étudier chacune des passions, l’une après l’autre, trouvera pour conclusion immédiate qu’elles ne sont que des appétits contraires à la raison.