Rien de plus simple que la manière en laquelle se rend la justicek. La plainte se fait verbalement. Elle est portée tantôt par le parti lésé, tantôt par les parents du coupable (Deutéronome 21.20), tantôt par des personnes étrangères au débat (Deutéronome 25.1 : quand il y aura un différend entre quelques personnes et qu’elles seront amenées en jugement…). L’accusateur et l’accusé doivent tous deux comparaître en personne devant le juge. Si l’accusé ne comparaît pas, une citation lui est envoyée (Deutéronome 25.8). La tâche du juge est d’écouter, de bien s’enquérir de toutes les circonstances, d’en faire une exacte recherche, de s’informer soigneusement de tout ce qui peut jeter quelque lumière sur le cas en litige ; voyez, dans Deutéronome 13.14, cette significative accumulation d’expressions destinées à faire sentir aux juges la grandeur de la responsabilité qui pèse sur eux. — Les preuves sont tantôt matérielles (Exode 22.13), tantôt morales (Deutéronome 21.18)l. — Quant aux témoins, un seul ne suffit pas ; il en faut pour le moins deux, surtout quand il s’agit d’affaires graves (Deutéronome 19.15 ; 17.6 ; Nombres 35.30). Si le coupable est condamné à mort, la main des témoins doit être la première sur lui pour le faire mourir (Deutéronome 17.7), ce qui est destiné à faire comprendre qu’à moins d’une pleine et entière certitude, nul ne doit tester. Tous les témoins imposent les mains au malfaiteur qui va être lapidé (Lévitique 24.14). Le faux témoin doit subir le châtiment auquel il a contribué à faire condamner l’innocent (Deutéronome 19.19)m. Le serment est encore un autre moyen pour le juge d’arriver à connaître la vérité. Il y a d’abord ce que j’appellerai le serment à décharge (Exode 22.11 ; 1 Rois.8.31 et sq.) ; puis le serment ordinaire, par lequel le témoin s’engage à dire toute la vérité telle que Dieu la connaît ; puis enfin le serment d’adjuration. C’est à tort qu’on cite Lévitique 5.1, comme un exemple de serment ordinaire ; c’est bien plutôt une solennelle adjuration par laquelle tous les assistants sont sommés de dire tout ce qu’ils peuvent savoir sur l’affaire dont il s’agit (Comparez Proverbes 29.24 ; Juges 17.2). Nombres 5.11 et sq. indique un emploi spécial du serment d’adjuration. — En revanche, la torture est totalement étrangère au droit mosaïque. — Quant à la forme en laquelle doit être prononcée une sentence de condamnation, il n’y a rien de prescrit à cet égard. Tout au plus peut-on voir dans Job 13.27 ; Ésaïe 10.1, l’indication que les sentences devaient être couchées par écrit. — L’exécution suivait de près la condamnation (Nombres 15.36 ; Deutéronome 22.18 ; 25.2).
k – Je ne fais ici que de suivre l’excellent travail de Schnell. — Au reste, il faudrait connaître le droit pour apprécier à leur juste valeur les lois de Moïse, et il est regrettable que les juristes n’en aient pas fait plus souvent l’objet de leurs études.
l – Quand un père en vient à accuser son propre fils, cette accusation est à elle seule la meilleure preuve de la culpabilité de l’enfant.
m – Parfois, comme par exemple dans des achats, les témoins tiennent lieu d’actes écrits, Genèse 23.12-16 ; Ruth 4.9-10.
Le grand principe qui est à la base de toute la pénalité mosaïque, c’est la loi du talion : vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, etc. (Exode 21.23-25 ; Lévitique 24.18 ; Deutéronome 19.21). Il faut souffrir ce qu’on a fait souffrir ; en d’autres termes, le châtiment doit répondre quantitativement et qualitativement au mal commis. Rien de machinal cependant dans cette équation : bien souvent le côté subjectif du délit entre en ligne de compte dans la fixation de la peine. Une même action peut entraîner un châtiment plus sévère dans tel cas que dans tel autren. — La peine capitale est appliquée dans un très grand nombre de cas. Meurtre, cela va sans dire, mais aussi sévices contre un père ou une mère, enlèvement d’un homme pour le vendre comme esclave (Exode 21.16), adultère, toutes sortes d’impuretés contre nature, idolâtrie, sorcellerie, divination (Lévitique 20.1-27 ; Deutéronome 13.6), et même violation de certaines lois cérémoniales, comme de la circoncision (Genèse 17.14), de la Pâque (Exode 12.15,19), du Sabbat (Exode 31.14) ; mépris des sacrifices (Lévitique 7.20 et sq.), voilà tout autant de cas qui entraînent la peine de morto. Remarquons toutefois qu’à l’égard de toute cette dernière classe de délits, Moïse emploie une expression particulière : « Cette âme sera retranchée du sein de son peuple, » ce qui ne peut pas signifier l’exil, comme plusieurs l’ont pensé, mais ce qui semble souvent indiquer que le coupable est livré au jugement de Dieu plutôt qu’à celui des hommes. Voyez Lévitique 17.10, où l’Éternel dit : « Je retrancherai du milieu de son peuple quiconque aura mangé de quelque sang que ce soit. » « Il mourra de mort, » telle est l’expression consacrée lorsque la peine capitale doit être infligée par les hommes, comme c’est le cas pour la violation du repos sabbatique (Exode 31.14), et pour les crimes de la première classe (Exode 21.12 et sq. ; Lévitique ch. 20). En général, toutes les fois que le peuple n’exécutait pas sur un coupable la peine qu’il méritait, l’Éternel se réservait le droit d’intervenir souverainement. Le passage capital à cet égard est Lévitique 20.4-6. — Outre la peine de mort, Moïse connaît encore les châtiments corporels, les coups (Deutéronome 25.2 et sq.)p, les amendes (Exode 21.22 ; Lévitique 24.18), la vente comme esclave d’un débiteur insolvableq. La prison est chose inconnue. Dans tout le Pentateuque, elle n’apparaît qu’une fois, en Egypte, et ce n’est que plus tard qu’on la trouve chez les Israélites. Dans Lévitique 24.12, il n’est question que d’une prison préventive. — Rien de plus beau que l’insistance que met Moïse à recommander l’impartialité : « Tu ne pervertiras point le droit de l’indigent. » (Exode 23.6,8) « Tu ne prendras point de présent. ». « Tu n’auras point égard à l’apparence du pauvre. » (Lévitique 19.15) « Jugez avec droiture entre l’homme et son frère. » (Deutéronome 1.16, etc.)
n – Nous en aurons bientôt la preuve à propos de la poursuite des meurtriers, § 108 ; et au § 137 à propos des diverses sortes de sacrifices.
o – Celui qui avait offert un sacrifice ailleurs qu’à l’endroit prescrit (Lévitique 17.8), ou qui avait violé certaines lois sur la souillure (Lévitique 22.3 ; Nombres 19.13, 20), était également digne de mort.
p – La loi du talion prévue pour certains cas, comme Exode 21.23, 25 ; Lévitique 24.19 ; Deutéronome 19.21, paraît avoir été souvent remplacée par une amende proportionnée à la gravité de la blessure.
q – Nous reprendrons ce sujet § 110.