« Quant à l’âme, suivant Platon, qu’il nous représente comme formée par Dieu de la réunion de deux substances, l’une passible et l’autre impassible, comme les couleurs résultant du mélange du blanc et du noir ; voici ce que nous avons à en dire. C’est que, de nécessité, une telle âme devrait, avec le temps, s’évanouir par la séparation de ses parties intégrantes ; de même que la couleur mixte formée de l’union de deux couleurs contraires doit par sa nature, après un laps de temps quelconque, retourner à la couleur propre à chacun de ses éléments. Or s’il en est ainsi, nous conclurons qu’une pareille âme est périssable et nullement immortelle. Car, s’il est avoué qu’il n’existe rien, dans la nature qui n’ait son contraire, et que tout ce qui compose cet univers a été coordonné par Dieu ? d’après la loi des contraires, il a su, en effet, les enchaîner par une amitié et une communauté d’action ; ainsi il a associé le sec à l’humide, le chaud au froid, le pesant au léger, le blanc au noir, le doux à l’acide, le dur au mou, l’essence impassible à celle passible, de manière à former ensemble de toutes choses par l’unité et la diversité de leur association. Néanmoins, chacune des mixtions et des combinaisons que nous venons d’indiquer, conserve par nature une tendance à se dissoudre : dissolution que le temps amène. Or, si l’âme est formée également d’une substance passible et d’une impassible, il en résultera, pour elle, comme la couleur mixte, de s’évanouir avec le temps, de par la nature de son origine, qui veut que, dans les composés formés des contraires, chacun de ceux-ci ait hâte de retourner à sa nature propre. Est-ce que nous ne voyons pas que les corps graves par nature, lorsqu’un principe d’allégement s’y adapte, soit par les efforts des hommes ou par une cause physique externe, de manière à les soulever, résistent néanmoins par leur pesanteur spécifique, pour revenir en bas ? Il en est de même du cops léger, qui, étant déprimé par des causes extérieures semblables, fait également effort pour remonter vers les régions supérieures. En effet, il est impossible que deux contraires, combinés dans un même corps, persévèrent à rester dans cet état d’union, à moins de concevoir un troisième agent, pris dans la nature, qui s’y unisse pour les tenir rapprochés. Cependant, l’âme n’est pas cette troisième substance forcée de l’union de deux éléments contraires entre eux : l’âme est simple par nature, elle est impassible, elle est incorporelle : c’est ce qui a conduit Platon et les philosophes de son école à déclarer qu’elle est immortelle. Cependant, attendu que c’est une opinion reçue universellement que l’homme est composé d’un corps et d’une âme, qu’il est également admis que les impressions volontaires ou involontaires en nous, et sans l’intermédiaire du corps, sont des passions de l’âme, beaucoup de penseurs en ont conclu que l’âme était une substance passible, qu’elle était également mortelle, corporelle, nullement incorporelle. Voilà pourquoi Platon s’est cru obligé d’enlacer, en quelque sorte, la substance passible à l’impassible dans la constitution de l’âme. Or, que cette opinion n’ait pas eu d’autre cause chez Platon et ses adhérents, c’est ce que nous nous efforcerons de constater d’après leurs propres paroles, en appelant à notre aide les facultés actives de notre âme. »
Bornons ici la citation tirée du traité de l’âme, du Platonicien Sévère. Examinons maintenant comment Platon s’exprime sur l’origine du ciel et des astres qu’il renferme.