Le Pédagogue

LIVRE PREMIER

CHAPITRE IV

Le Verbe instruit également les hommes et les femmes.

Embrassons donc de plus en plus cette obéissance salutaire ; livrons-nous tout entiers au Seigneur ; attachons-nous fortement aux cordages du vaisseau de la foi, et soyons bien persuadés que les vertus qu’elle nous ordonne de suivre sont l’égal apanage de l’homme et de la femme. S’ils ont, en effet, un seul et même Dieu, ils ont aussi un seul et même Pédagogue, une seule et même Église. La modération, la tempérance, la pudeur sont des vertus communes aux deux sexes. Ils se nourrissent des mêmes aliments, ils s’unissent par le mariage ; la respiration, la vue, l’ouïe, l’intelligence, l’espérance, la disposition à écouter les commandements de Dieu, la charité, tout leur est commun. Si l’homme et la femme ont le même genre de vie, ils ont également part aux mêmes grâces et au même salut. Ils sont aimés de Dieu avec le même amour, instruits avec les mêmes soins. « Les enfants de ce siècle, nous dit le Seigneur, épousent des femmes, et les femmes des maris ; c’est la seule différence qu’il y ait entre eux. Mais après la résurrection, cette différence n’existera plus dans le ciel. » Les récompenses, destinées aux vertus qui font de la société chrétienne une sainte communauté, ne sont pas plus promises à l’homme qu’à la femme ; elles le sont à l’homme en général, et on peut dire qu’il n’y a aucune différence entre l’un et l’autre, si ce n’est celle qu’établit la concupiscence.

Aussi nous voyons que le mot générique d’homme comprend l’homme et la femme ; c’est pour cela, je crois, que les Athéniens donnent le nom d’enfant aussi bien aux jeunes garçons qu’aux jeunes filles. Si Ménandre est une autorité à laquelle je peux m’en rapporter, voici les paroles qu’il met dans la bouche d’un père dans sa pièce intitulée Rapizoméné : « Ma fille, car il m’est bien doux de t’appeler mon enfant. » Ils donnent également le nom d’agneau aux mâles et aux femelles, cet animal si faible et si doux qu’il est le symbole de la simplicité. Quant à nous, le Seigneur lui-même nous paît dans les siècles des siècles. Amen. Ni les troupeaux ne peuvent vivre sans berger, ni les enfants sans Pédagogue, ni les serviteurs sans maître.

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant