Épître aux Corinthiens

II. Nécessité de la pénitence et de l’humilité, pour revenir à la pureté des mœurs primitives.

Ce n’est pas seulement pour votre instruction, mais encore pour la nôtre, que nous vous rappelons ces faits. Nous courons la même carrière, les mêmes combats nous sont imposés.

Ainsi donc, loin de nous les vaines et misérables rivalités ! Revenons à l’esprit de notre vocation si sublime, si digne de respect.

Ne voyons que ce qui est juste, ce qui plaît, ce qui est agréable à celui qui nous a donné la vie ; ne détournons jamais nos regards du sang de Jésus-Christ.

Voyons de quel prix il est devant Dieu, ce sang qui fut versé pour notre salut et qui offrit au monde entier sa réconciliation par la pénitence.

Si nous remontons la suite de toutes les générations, nous verrons que Dieu, dans tous les âges, a ménagé ce moyen de salut à tous les hommes.

Noé prêche la pénitence, et les hommes dociles à sa voix sont sauvés.

Jonas vient annoncer aux Ninivites une ruine entière ; mais ceux-ci font pénitence, apaisent Dieu par leurs prières, et trouvent grâce devant lui, bien qu’ils ne fussent pas de son peuple.

Les ministres des grâces divines ont parlé de la pénitence d’après l’Esprit saint, et c’est ainsi que le souverain maître en parle lui-même avec serment : « Je possède la vie, dit le Seigneur ; je ne veux pas la mort de l’homme pécheur, mais son repentir. »

Il ajoute ensuite ces touchantes paroles : « Repentez-vous de votre iniquité, maison d’Israël. Dites aux enfants de mon peuple : Vos péchés, formeraient-ils une chaîne non interrompue de la terre au ciel, seraient-ils plus rouges que l’écarlate, plus noirs que les vêtements de deuil, tournez-vous vers moi de tout votre cœur, écriez-vous : Mon père ! et je vous écouterai comme si vous étiez un peuple saint.

« Ô Sion ! si tu veux écouter ma voix, tu jouiras des fruits de la terre ; mais si tu refuses de m’entendre, le glaive te dévorera, car c’est le Seigneur qui a parlé. »

Comme il voulait que tous eussent part au salut attaché à la pénitence, il les a affermis par sa volonté toute-puissante.

Obéissons à cette volonté sainte qui nous comble de biens et d’honneurs ; implorons humblement la clémence de notre Dieu ; renonçons aux œuvres vaines, à l’esprit de contention et de jalousie qui mène à la mort, pour recourir désormais à la miséricorde divine.

Que nos regards se reportent toujours sur ces hommes qui n’ont jamais cessé de travailler à la gloire du Très-Haut et de publier sa grandeur.

Voyez Énoch, que son obéissance a fait trouver juste devant le Seigneur, et qui fut transporté dans le ciel sans laisser sur la terre aucune trace de sa mort.

Noé, reconnu fidèle, fut chargé d’annoncer au monde une génération nouvelle. Par lui, Dieu conserva et maintint en paix les animaux introduits dans l’arche.

Abraham, appelé l’ami de Dieu, prouva sa fidélité par sa soumission à ses ordres. L’obéissance lui fit quitter pays, parents, maison paternelle ; et, en échange de cette petite contrée, de cette famille peu nombreuse, de cette maison sans éclat qu’il abandonnait, il obtint l’héritage des promesses divines.

Car c’est ainsi que Dieu lui parle : « Sors de ta terre et de ta parenté, et de la maison de ton père, et viens en la terre que je te montrerai ; et je t’établirai sur une grande nation. »

Et lorsque Abraham se fut séparé de Loth, Dieu lui dit de nouveau : « Lève les yeux, et regarde du lieu où tu es maintenant vers l’Aquilon et le Midi, vers l’Orient et l’Occident. Toute la terre que tu vois, je te la donnerai et à ta postérité pour toujours ; et je multiplierai ta race comme la poussière de la terre. Si quelqu’un d’entre les hommes peut compter les grains de sable, il pourra compter aussi la suite de tes descendants. »

Abraham crut à Dieu, et sa foi lui fut imputée à justice.

En récompense de cette foi et de l’hospitalité qu’il aimait à exercer, un fils lui fut donné dans sa vieillesse, et il porta l’obéissance jusqu’à l’offrir à Dieu sur une des montagnes que le Seigneur lui avait indiquées.

La piété de Loth et son zèle hospitalier le sauvèrent de Sodome, lorsque tout le pays d’alentour fut condamné à périr par le souffre et par le feu.

Dieu montrait qu’il n’abandonne jamais ceux qui placent en lui leur confiance ; tandis que ceux qui s’égarent dans une voie contraire éprouvent sa justice par des châtiments et des supplices.

La femme de Loth, sortie de Sodome avec lui, dans des sentiments si différents et si éloignés des siens, devint un exemple de cette justice, puisqu’elle fut changée en une statue de sel, qui subsiste encore aujourd’hui.

Et par là Dieu voulait nous apprendre que ceux qui manquent de foi et doutent de sa puissance restent, pour les âges à venir, comme une preuve sensible de la sévérité de ses jugements.

La courtisane Rahab fut aussi sauvée, grâce à sa foi et à l’hospitalité qu’elle exerça.

Josué, fils de Nun, avait envoyé des espions à Jéricho ; le roi de cette contrée sut qu’ils étaient venus pour reconnaître le pays, et aussitôt il fit partir des hommes chargés de les arrêter et de les mettre à mort.

Rahab, qui était hospitalière, les reçut chez elle et les cacha sur sa terrasse, sous le lit qui s’y trouvait. Les envoyés du roi se présentèrent et lui dirent : « Chez toi sont entrés des hommes qui viennent reconnaître le pays. Montre-les ; le roi l’ordonne.

« Les deux hommes que vous cherchez, répondit-elle, sont entrés chez moi, il est vrai, mais ils sont sortis tout aussitôt et continuent leur route. » Elle ne leur découvrit point les espions, et elle dit à ceux-ci : « Je sais que le Seigneur vous a livré cette ville ; l’effroi, l’épouvante se sont répandus sur tous les habitants : quand vous en serez les maîtres, sauvez-moi, ainsi que la maison de mon père. »

Ils lui répondirent : « Tout doit arriver ainsi que vous l’avez dit.

« Quand on viendra vous annoncer notre approche, vous rassemblerez tous les vôtres dans cette maison, et ils seront sauvés ; mais tous ceux qu’on trouvera dehors périront. »

Ils lui recommandèrent encore, pour qu’il leur fût facile de reconnaître la maison, de laisser pendre du toit un ruban d’écarlate : montrant par là que le sang de Jésus-Christ serait un gage de rédemption pour tous ceux qui croient et qui espèrent en Dieu.

Vous voyez, mes frères, que cette femme n’avait pas seulement la foi, mais encore le don de prophétie.

Soyons humbles, mes frères, renonçons à tout ce qui est orgueil, faste, déraison, colère. Observons ce qui est écrit. Que nous dit l’Esprit saint ? Que le sage ne se glorifie pas dans sa sagesse, ni le fort dans sa force, ni le riche dans son opulence ; que celui qui se glorifie le fasse dans le Seigneur : qu’il ne recherche que lui ; qu’il pratique la justice et l’équité.

Rappelons-nous surtout les paroles par lesquelles le Seigneur Jésus nous recommande la douceur et la patience : « Soyez, dit-il, miséricordieux, si vous voulez obtenir miséricorde ; remettez, et on vous remettra ; ainsi que vous agirez, on agira envers vous ; on vous donnera comme vous donnerez ; vous serez jugés ainsi que vous aurez jugé ; on aura pour vous l’indulgence que vous aurez pour les autres, la mesure dont vous aurez usé à leur égard servira envers vous. »

Affermissons-nous de plus en plus dans la pratique de ces préceptes. Soyons fidèles observateurs des divins oracles, et n’ayons jamais que d’humbles sentiments de nous-mêmes.

Car Dieu dit encore dans les saintes Écritures : « Sur qui arrêterai-je mes regards, sinon sur l’homme doux, paisible, tremblant à ma voix ? »

La justice, la piété, nous font un devoir d’obéir à ce Dieu plutôt que de suivre, dans les voies de l’orgueil et de la rébellion, ceux qui ont donné l’exemple d’une détestable jalousie.

C’est s’exposer non à une perte légère, mais au plus grand péril, que de céder aveuglément à l’impulsion de ces hommes qui poussent aux querelles et aux discordes pour nous écarter du droit chemin.

Usons de bienveillance les uns à l’égard des autres, prenant pour modèle la douceur et la bonté de celui dont nous tenons la vie. Car il est écrit : « Les bons habiteront la terre ; les justes s’y affermiront, mais les méchants en seront retranchés à jamais. »

Il est dit ailleurs : « J’ai vu l’impie au plus haut degré d’élévation ; il égalait en hauteur les cèdres du Liban. J’ai passé, et déjà il n’était plus. J’ai cherché sa place, je ne l’ai pas trouvée. Gardez l’innocence, aimez la justice. De grands biens sont tenus en réserve pour l’homme pacifique. »

Attachons-nous étroitement à ceux qui fondent la paix sur la piété, et non à ces hommes qui veulent une paix fausse et mensongère.

C’est d’eux qu’il est dit : « Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. »

Et ailleurs : « Ils me flattaient des lèvres, ils me maudissaient dans le cœur. »

Et dans un autre endroit : « Ils l’aimaient seulement de bouche, leur langue mentait au Seigneur ; mais leur cœur n’était pas droit devant lui. Ils n’ont point été fidèles à son alliance. Que les lèvres trompeuses deviennent muettes ! Dieu confondra la bouche qui trompe et la langue qui se glorifie. Ils ont dit : Nous glorifierons notre parole ; nos lèvres sont à nous, et quel est donc notre maître ? À cause de la désolation des opprimés et du gémissement des pauvres, je me lèverai, dit le Seigneur ; je les placerai en lieu sûr, et je serai fidèle à ma parole. »

Jésus-Christ est avec l’homme qui pense humblement de lui-même, et non avec ceux qui élèvent au-dessus de son troupeau une tête orgueilleuse.

Jésus-Christ, notre Seigneur, le sceptre de la majesté divine, malgré sa puissance, est-il venu au monde en étalant le faste et l’orgueil ? N’est-il pas venu, au contraire, dans l’humilité, ainsi que l’Esprit saint l’avait annoncé ? « Seigneur, s’écrie-t-il, qui croira à votre parole ? Pour qui le bras du Seigneur a-t-il été révélé ? Il s’élèvera en la présence de Dieu comme un arbrisseau, comme un rejeton qui sort d’une terre aride. Il n’a ni éclat, ni beauté ; nous l’avons vu, il était méconnaissable ; méprisé, le dernier des hommes, homme de douleurs, il est familiarisé avec la misère ; son visage était obscurci par les opprobres et par l’ignominie, et nous l’avons compté pour rien. Il a vraiment porté lui-même nos infirmités ; il s’est chargé de nos douleurs. Oui, nous l’avons vu comme un lépreux, frappé de Dieu et humilié. Il a été blessé lui-même à cause de nos iniquités ; il a été brisé pour nos crimes ; le châtiment qui doit nous procurer la paix s’est appesanti sur lui ; nous avons été guéris par ses meurtrissures. Nous nous sommes tous égarés comme des brebis ; chacun de nous suivait sa voie, et le Seigneur a fait tomber sur lui l’iniquité de tous. Au milieu des douleurs, il n’a point ouvert la bouche ; il a été à la mort comme un agneau ; il est demeuré comme une brebis devant celui qui la tond ; il est mort au milieu des humiliations après un jugement. Qui racontera sa génération ? Il a été retranché de la terre des vivants. Je l’ai frappé pour les crimes de mon peuple. »

Et dans un autre endroit, Jésus-Christ parle ainsi lui-même : « Pour moi, je suis un ver de terre et non un homme. Je suis l’opprobre des hommes et le rebut du peuple. Tous ceux qui me voient m’insultent ; le mépris sur les lèvres, ils ont secoué la tête en disant : Il a mis son espoir en Dieu ; que Dieu le délivre ; que Dieu le sauve, puisqu’il se plaît en lui. ».

Vous voyez, mes chers frères, le modèle qui nous a été donné. Si le souverain maître s’est abaissé à ce degré d’humilité, que ferons-nous donc, nous qui devons tout à sa grâce, nous qui sommes placés sous le joug de sa miséricorde ?

Retraçons en nous l’humilité de ces hommes qu’on voyait couverts de peaux de chèvres et de brebis, allant partout prêcher l’avènement de Jésus-Christ. Nous voulons parler ici des prophètes Élie, Élisée, d’Ézéchiel, et de tant d’autres qui ont mérité d’être loués par l’Esprit saint dans les divines Écritures.

C’est là qu’Abraham est honoré du plus glorieux témoignage : il est appelé l’ami de Dieu. Mais lui, uniquement occupé de la gloire du Seigneur, s’humilie en s’écriant : « Je ne suis que cendre et poussière ! »

Il est ainsi parlé de Job : « Simple et droit, il craignait le Seigneur et fuyait le mal. » Pour lui, s’accusant lui-même, il dit : « Personne n’est sans souillure, sa vie ne fût-elle que d’un jour. »

Et Moïse, trouvé fidèle dans tout ce qui regardait le service du Seigneur, Moïse, dont Dieu employa le ministère pour dérober Israël aux coups et aux outrages qui l’accablaient, est loin de parler magnifiquement de lui-même au milieu des honneurs qui l’entourent. Lorsque, du sein d’un buisson, la voix de Dieu lui parle, il s’écrie : « Qui suis-je, pour que vous m’interrogiez ? Ma voix est faible, ma langue est embarrassée. » Et ailleurs : « Je ne suis qu’une légère vapeur qui s’élève d’un vase. »

Mais que dirons-nous de David, honoré du plus glorieux suffrage, celui de Dieu même, qui lui parle en ces termes : Enfin, j’ai trouvé un homme selon mon cœur ; c’est David, fils de Jessé. Je l’ai sacré avec l’huile sainte. » Et David, parlant au Seigneur, lui dit : « Ô mon Dieu ayez pitié de moi, selon la grandeur de vos miséricordes ; lavez-moi de plus en plus de mes souillures ; effacez mon iniquité ! J’ai péché contre vous, contre vous seul, et j’ai fait le mal en votre présence ; j’ai été conçu dans l’iniquité ; ma mère m’a conçu dans le péché. »

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