Épître aux Corinthiens

III. Amour que Dieu manifeste pour la paix ; dispositions qu’il demande pour la faire régner.

C’est l’humilité de ces hommes si grands et si honorés, c’est leur respect pour l’obéissance, qui nous a rendus meilleurs, ainsi que tous les âges précédents et tous les hommes qui ont reçu les divins oracles avec droiture et avec crainte.

Instruits par tant d’illustres et de glorieux exemples, revenons à cette paix que nous goûtions autrefois ; portons sans cesse nos regards vers notre père, l’auteur de tout ce qui existe. Attachons-nous à cette paix qu’il nous a apportée, ce don par excellence, ce bienfait qui surpasse tous les autres.

Contemplons Dieu par la pensée, considérons des yeux de l’esprit sa volonté toujours amie de la paix ; voyons comme cet amour se manifeste dans toutes ses œuvres.

Les cieux, mis en mouvement par sa main puissante, lui restent paisiblement soumis.

Le jour et la nuit fournissent la carrière qu’il leur a prescrite, et jamais ne se nuisent l’un à l’autre.

Le soleil, la lune, les chœurs des astres, décrivent selon ses ordres, dans une harmonie parfaite, sans la plus légère déviation, les orbites qui leur furent tracés.

La terre, toujours féconde, produit dans chaque saison, d’après sa volonté, une nourriture abondante pour l’homme et pour tous les animaux, sans résistance de sa part, sans le moindre changement aux lois qu’elle a reçues.

Les abîmes qu’on ne peut pénétrer, les profondeurs de la terre qu’on ne peut dévoiler, respectent également ses ordres.

La masse profonde de la mer immense, d’après la disposition du Créateur, s’enfle, s’élève en montagne, et ne franchit point les barrières placées autour d’elle : tel est l’ordre qu’elle a reçu ; elle l’exécute.

Car le Seigneur lui a dit : « Tu viendras seulement jusque-là ; et là se brisera l’orgueil de tes flots. »

L’Océan, d’une profondeur impénétrable, et les mondes semés au-delà de l’Océan[3], sont gouvernés par les mêmes lois.

[3] Cette vérité qu’il y a des terres habitées au-delà de l’Océan, entrevue par saint Clément, a été confirmée par les découvertes modernes.

Les diverses saisons, le printemps, l’été, l’automne et l’hiver, se succèdent paisiblement l’une à l’autre.

Les vents, tenus en équilibre, s’acquittent de leur devoir dans leur temps et ne rencontrent pas le plus léger obstacle.

Des sources toujours jaillissantes, créées pour l’usage de la vie et la santé du corps, ne cessent de présenter à l’homme leurs eaux inépuisables et de soutenir son existence.

Enfin, les plus petits animaux forment des familles où règnent l’union et la paix.

C’est ainsi que le grand ouvrier, le maître de l’univers, a voulu que tout se maintînt dans la paix et dans l’harmonie, prodiguant ses bienfaits à tous, mais les répandant avec surabondance sur nous, qui trouvons sans cesse dans sa clémence un refuge assuré par notre Seigneur Jésus-Christ. Honneur et gloire lui soient rendus dans tous les siècles des siècles !

Craignons, mes bien-aimés, que tant de bienfaits de sa part ne tournent contre nous, si notre vie n’est pas conforme à sa volonté, si nous ne faisons point sous ses yeux ce qu’il lui plaît, dans un esprit d’union et de paix.

L’Écriture nous dit quelque part : « L’esprit de Dieu est un flambeau qui pénètre les cœurs. »

Songeons que le Seigneur est près de nous ; que pas une de nos pensées, pas un des raisonnements que nous formons ne lui échappe.

Il est donc juste de ne pas se dérober à sa volonté comme des transfuges. Ce n’est point à des hommes insensés, superbes, pleins de vanité dans leurs discours, qu’il faut craindre de déplaire, mais à Dieu.

Rappelons nos femmes à leurs devoirs ; qu’elles montrent des mœurs pures et aimables, un esprit de douceur véritable et sincère ; qu’elles manifestent leur discrétion par leur silence ; qu’elles n’écoutent pas leurs affections particulières, mais qu’elles montrent une égale tendresse à tous ceux qui craignent véritablement le Seigneur.

Élevons nos enfants selon la doctrine de Jésus-Christ ; qu’ils apprennent quel est le prix de l’humilité aux yeux de Dieu, combien ont de force auprès de lui la charité et l’innocence du cœur ; combien sa crainte est utile et honorable, comme elle est la sauvegarde de toute âme pure et sainte, qui vit selon lui. Et qui ne l’aurait pas cette crainte ?

Le Seigneur pénètre nos pensées et nos desseins, lui dont l’esprit habite en nous et se retire quand il lui plaît.

C’est une vérité que nous enseigne la foi en Jésus-Christ. Il nous presse ainsi lui-même par l’Esprit-Saint : « Venez, mes enfants, écoutez-moi ; je vous enseignerai la crainte du Seigneur. Quel est l’homme qui veut la vie, qui soupire après les jours de bonheur ? Préservez votre langue de la calomnie et vos lèvres des discours artificieux ; éloignez-vous du mal et faites le bien ; cherchez la paix et poursuivez-la sans relâche. Les yeux du Seigneur sont ouverts sur les justes ; ses oreilles sont attentives à leurs cris. Mais le regard de sa colère est sur ceux qui font le mal ; il efface de la terre jusqu’à leur souvenir. Les justes ont poussé des cris, et le Seigneur les a exaucés et les a délivrés de tous leurs maux. »

Les maux des pécheurs sont sans nombre ; mais le Seigneur environne de sa miséricorde ceux qui espèrent en lui.

Père de bonté et de miséricorde, il a des entrailles de charité pour ceux qui le craignent, et il répand ses grâces, si douces, si suaves, pleines de charité, sur ceux qui s’approchent de lui avec un cœur droit.

Soyons donc sans défiance, sans incertitude sur la grandeur et la richesse de ses dons.

Loin de nous le langage de ces hommes dont parle l’Écriture :

« La misère est le partage de ceux qui ont le cœur double et incertain, et qui disent : Oui, voilà ce que nous entendions répéter par nos pères ; « Nous sommes parvenus à la vieillesse, et rien de tout cela ne se réalise pour nous. »

Ô insensés ! comparez-vous à un arbre. Supposez la vigne : elle bourgeonne d’abord ; un bouton se montre, puis la feuille, ensuite la fleur ; après cela un raisin d’abord vert et acerbe, puis enfin mûr et parfait.

Vous voyez comme, en peu de temps, le fruit de cet arbre est parvenu à sa maturité ; aussi certainement s’accomplira, dans peu et tout à coup, la volonté de Dieu ; témoins ces paroles de l’Écriture : « Le Seigneur, le Saint que vous attendez, viendra bientôt dans son temple. »

Voyez, mes bien-aimés, comme le Seigneur place sans cesse sous nos yeux des preuves de cette résurrection, dont il nous a donné les prémices dans Jésus-Christ, son fils, en le rappelant à la vie. Voyez, dis-je ; cette résurrection qui se renouvelle à tout moment.

Le jour et la nuit nous la manifestent : la nuit se couche, le jour se lève ; le jour s’en va et la nuit arrive.

Voyons les fruits. Ce qui arrive à la semence est connu de tout le monde : le semeur va dans son champ, il la jette en terre. Ainsi répandues, les graines, qui tombent arides et desséchées, se décomposent au bout d’un temps marqué ; après leur décomposition, la vertu toute-puissante de Dieu les ranime, et, d’une seule, elle fait naître plusieurs fruits qui en produisent beaucoup d’autres à leur tour.

Considérons encore le prodige qui a lieu dans certaines contrées de l’Orient, c’est-à-dire en Arabie.

On y trouve un oiseau qui s’appelle phénix ; il est seul et unique de son espèce. Cet oiseau vit environ six cents ans ; quand sa fin approche, il se fait un nid composé de myrrhe, d’encens et d’autres aromates ; puis il entre dans ce nid et y meurt. De sa chair putréfiée naît un ver qui se nourrit d’abord de la substance de l’oiseau mort, et qui se couvre ensuite de plumes.

Devenu plus fort, il emporte le petit tombeau qui renferme les restes de son prédécesseur, et, chargé de ce précieux fardeau, il passe d’Arabie en Égypte, jusqu’à la ville d’Héliopolis ; et là, en plein jour, sous les yeux de tous les spectateurs, il vient, en volant, le déposer sur l’autel du soleil et disparaît aussitôt.

De leur côté, les prêtres égyptiens consultent avec soin leurs livres sur les époques, et trouvent que cet oiseau est venu précisément au bout de cinq cents ans[4].

[4] Le fait du phénix passait pour vrai au temps de saint Clément. Plutarque, Pline, Tacite, Pomponius Méla, Philostrate, Libanius, Tacite, en ont parlé comme les Pères de l’Église, qui l’ont rappelé souvent comme une image de la résurrection générale.

Devons-nous, après cela, trouver surprenant si le divin ouvrier de toutes choses ressuscite un jour ceux qui l’ont servi avec piété et avec une foi pleine de confiance, puisque, par l’exemple de cet oiseau, il met au grand jour la magnificence de ses promesses ?

Car il est dit : « Vous ranimerez ma poussière, et je chanterai vos louanges ; » et ailleurs : « Je me suis endormi, j’ai été plongé dans un sommeil profond, et je me suis réveillé parce que le Seigneur est avec moi. »

Et Job s’écrie de son côté : « Vous la ressusciterez cette chair qui a souffert tant de maux ! »

Que nos cœurs soutenus de cette espérance s’attachent à ce Dieu, fidèle dans ses promesses et juste dans ses jugements. Loin de nous tromper, il nous défend de mentir. Rien n’est impossible à Dieu, si ce n’est le mensonge.

Réveillons dans nos cœurs la confiance en lui et songeons que tout est sous sa main.

Il a tout élevé par la puissance de sa parole, et par elle il peut tout renverser.

Qui peut lui dire : « Pourquoi avez-vous fait cela ? » ou qui pourrait résister à la force de son bras ?

Il a tout fait quand il a voulu et comme il a voulu, et tout ce qu’il a décrété aura son effet.

Tout est sous ses regards, rien n’échappe à sa connaissance.

Puisque nous pouvons partout voir et entendre ces vérités, craignons le Seigneur ; renonçons aux désirs impurs, aux œuvres mauvaises, afin qu’au jugement à venir nous soyons couverts de sa miséricorde.

Où se dérober à sa main toute-puissante ? Quel monde pourrait servir d’abri à l’homme qui voudrait lui échapper ?

C’est ainsi que parle l’Écriture.

Où irai-je ? où fuir devant votre face ? Si je monte au ciel, vous y êtes ; si je vais aux extrémités de la terre, j’y trouve votre main ; si je descends au fond des abîmes, votre esprit est là.

Où se cacher, où fuir celui qui embrasse tout ?

Allons à lui avec l’innocence du cœur ; élevons vers son trône des mains pures et sans tache ; aimons ce père de bonté et de miséricorde qui nous a fait participer à son élection divine.

Il est écrit : « Quand le Très-Haut fit la division des peuples, quand il dissémina sur la terre les enfants d’Adam, il marqua les limites des nations selon le nombre des enfants d’Israël. Mais la part du Seigneur fut Jacob, Israël fut son héritage. » Et ailleurs : « Dieu s’est choisi un peuple du milieu des autres peuples, comme un homme choisit les prémices de ses fruits, et de ce peuple sortira le Saint des Saints. »

Puisque nous sommes le partage du Dieu saint, il faut que toutes nos actions tendent à la sainteté ; dès lors loin de nous la médisance, l’impureté, l’excès du vin, l’arrogance, toute passion honteuse, l’adultère si odieux, l’orgueil si détestable.

« Car Dieu, dit l’Écriture, résiste aux superbes et donne sa grâce aux humbles. »

Lions-nous étroitement à ceux que Dieu remplit de sa grâce ; que la paix soit comme notre vêtement ; soyons humbles, chastes, attentifs à éviter tout murmure, toute médisance ; justes en œuvres et non pas seulement en paroles.

« Car, dit l’Écriture, celui qui parle beaucoup écoutera à son tour. » La multitude des paroles prouve-t-elle qu’on est juste ? L’homme, né de la femme, a une vie très-courte : ne la perdez pas dans la multitude des paroles.

Plaçons notre gloire dans le Seigneur ; ce n’est pas de nous qu’elle doit sortir, Dieu déteste celui qui se loue lui-même.

Laissons aux autres le soin de rendre témoignage à nos bonnes œuvres, ainsi qu’il fut rendu à nos pères, ces hommes si justes.

La témérité, l’arrogance, l’audace, caractérisent ceux que Dieu rejette loin de lui ; tandis que la modération, l’humilité, la douceur, sont le partage de ceux qu’il a bénis.

Recherchons avant tout cette bénédiction sainte, et voyons quel est le moyen de l’obtenir ; rappelons dans notre esprit ce qui s’est passé dès les premiers jours.

Pourquoi notre père Abraham a-t-il été béni ? N’est-ce point à cause des œuvres de justice et de vérité qu’il a faites par la foi ?

Isaac, plein de confiance dans ce qui devait arriver, s’offrit volontairement en sacrifice.

Jacob, humblement soumis, sort de son pays pour échapper à son frère, se retire chez Laban, devient son serviteur, et les douze sceptres d’Israël sont remis entre ses mains.

Interrogez les faits séparément et avec attention ; alors vous comprendrez toute l’étendue des dons que Dieu a répandus sur nous par ce patriarche : De lui sont sortis les prêtres et les lévites qui servent devant l’autel du Seigneur ; de lui est né, selon la chair, le Seigneur Jésus ; de lui sont descendus les rois, les princes, les chefs du peuple, par la tribu de Juda ; et les autres tribus, dont il est aussi la tige, n’ont pas été sans gloire. Dieu lui avait fait cette promesse : « Ta race sera aussi nombreuse que les étoiles du ciel. »

Toutefois ces saints patriarches n’ont acquis tant de gloire et de grandeur, ni par eux-mêmes, ni par leurs œuvres, ni par tout le bien qu’ils ont pu faire, mais par la volonté de Dieu seul.

Et nous aussi, appelés à la connaissance de Jésus-Christ, grâce à cette même volonté, si nous sommes justifiés, ce n’est point par nous-mêmes, ni à raison de notre sagesse, de notre intelligence ou de notre piété, ni par aucune œuvre sainte, faite avec un cœur pur, mais par la foi dont le Dieu tout-puissant s’est toujours servi pour justifier tous ceux qu’il a sauvés. À lui la gloire dans tous les siècles !

Que ferons-nous donc, mes frères ? Faut-il pour cela cesser de faire le bien, abandonner les œuvres de charité ? Jamais Dieu ne l’approuverait. Portons-nous, au contraire, avec zèle et ardeur à tous les genres de bonnes œuvres.

Est-ce que le divin ouvrier, le maître de toutes choses, ne s’applaudit pas lui-même dans ses œuvres ?

Les cieux ont été affermis par sa suprême et souveraine puissance, et embellis par son incompréhensible sagesse.

Il a séparé la terre de l’eau qui l’environne ; il l’a consolidée comme une tour inébranlable, en lui donnant pour base sa volonté ; et tous les animaux qui s’y trouvent ont reçu de lui l’ordre de l’habiter.

Sa puissance a creusé le lit de la mer, et renfermé dans son sein tous les poissons qu’elle nourrit et qui auparavant avaient reçu de lui la vie.

De ses mains pures et saintes il a formé l’homme, son chef-d’œuvre, supérieur à toutes les créatures par l’intelligence, l’empreinte de son image.

Dieu s’exprime ainsi lui-même : « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance. » Et après avoir fini de créer, il approuva son ouvrage, bénit ses créatures, et leur dit : « Croissez et multipliez. »

Comprenons par-là que les bonnes œuvres font l’ornement des justes ; et Dieu lui-même, après s’être comme paré de ses ouvrages, se réjouit.

Puisque nous avons ce modèle sous les yeux, faisons-le revivre en nous, conformons-nous à sa volonté, et travaillons de toutes nos forces à faire des œuvres de justice.

Le bon ouvrier reçoit avec confiance le prix de son travail ; mais le lâche, le paresseux n’ose regarder en face le maître qui l’emploie. Soyons donc prompts à faire le bien ; de là dépend tout notre avenir. Car il nous est dit d’avance : « Voici le Seigneur qui vient ; le prix de la victoire est entre ses mains ; il va rendre à chacun selon ses œuvres. »

Aussi Dieu nous engage, avec effusion de cœur, à n’être ni lents, ni tardifs pour le bien.

Plaçons en lui notre gloire et notre confiance.

Voyez l’innombrable multitude d’anges qui l’environnent, et leur promptitude à exécuter ses ordres.

« Mille millions d’anges le servaient, nous dit l’Écriture ; dix mille millions étaient devant lui, et ils s’écriaient : Saint, saint, saint est le Dieu des armées ; toute créature est remplie de sa gloire ! »

Ne faisons aussi qu’un seul et même cœur ; crions vers lui de toutes nos forces, lui demandant, tous ensemble, comme d’une seule bouche, qu’il nous fasse participer à ses grandes et magnifiques promesses.

Car il nous dit par son prophète : « L’œil n’a point vu, l’oreille n’a point entendu, le cœur de l’homme n’a point conçu quels biens Dieu tient en réserve pour ceux qui espèrent en lui. »

Que de bonheur renfermé dans les dons de Dieu ! qu’ils sont admirables, ô mes bien-aimés ! La vie avec l’immortalité, la splendeur avec la justice, la vérité avec la liberté, la foi avec la confiance, la continence avec la sainteté : trésors de grâce que nous trouvons ici-bas.

Mais que de biens sont préparés dans l’avenir à ceux qui placent en Dieu leur espérance ! Le Dieu de sainteté, le père de tous les siècles, en connaît seul la grandeur et l’excellence. Oh ! faisons tous nos efforts pour être du nombre de ceux qui vivent dans cette attente et veulent avoir part aux dons qu’il a promis ! Et comment parviendrons-nous, mes frères, à ce bonheur ? Nous l’obtiendrons, si notre esprit est toujours ferme dans la foi ; si nous cherchons ce qui plaît, ce qui est agréable à Dieu ; si nous faisons tout ce qui est conforme à sa volonté sainte ; si nous suivons le chemin de la vérité, rejetant loin de nous l’injustice, l’iniquité, l’avarice, les disputes, les fraudes et les ruses, les murmures et les médisances, la haine de Dieu, l’orgueil et l’ostentation, la fausse gloire et l’amour de la vanité.

Car ceux qui font le mal sont odieux au Seigneur ; et non-seulement ceux qui le font, mais encore ceux qui l’approuvent.

Voici ce que dit le Seigneur, c’est Dieu qui parle à l’impie : « Est-ce à toi qu’il appartient de parler de mes décrets ? Pourquoi ta bouche annonce-t-elle mon alliance ? Tu hais l’ordre, et tu as rejeté ma parole derrière toi. Quand tu voyais un séducteur, tu courais à lui ; tu as partagé l’héritage des adultères.

« Tu as rassasié ta bouche de malice, et ta langue a préparé la fraude. Tranquillement assis, tu parlais contre ton frère ; tu couvrais d’opprobre le visage de ta mère. Voilà ce que tu as fait ; et je me suis tû ! Ton iniquité m’a jugé semblable à toi ; je t’accuserai, je t’exposerai à tes propres yeux.

« Comprenez maintenant, vous qui oubliez le Seigneur, de peur que je ne vous saisisse ; et personne ne vous délivrera. Le sacrifice de louange est le culte qui m’honore, c’est la voie par laquelle je manifesterai le salut du Très-Haut. »

Et cette voie où nous trouvons le salut, c’est Jésus-Christ, le pontife qui présente nos offrandes ; Jésus-Christ, le soutien, l’appui de notre faiblesse.

Par lui nous pourrons attacher nos regards au plus haut des cieux ; par lui nous contemplerons la beauté divine, souveraine, sans tache ; par lui les yeux de notre cœur se sont ouverts ; par lui, et à la clarté de son admirable flambeau, notre esprit sans intelligence et plongé dans la nuit reprend une vie nouvelle.

Par lui enfin Dieu a voulu nous faire goûter le fruit de la science immortelle. Il est, en effet, la splendeur de sa gloire, aussi supérieur aux anges que le nom qu’il a reçu l’emporte sur celui de ses créatures. Car il est écrit au sujet des anges : « Dieu a pris les esprits pour ambassadeurs et les flammes pour ministres. »

Mais voici ce que le Seigneur dit de son fils : « Tu es mon fils ; je t’ai engendré aujourd’hui ; demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage et la terre pour empire. »

Et ailleurs, il lui parle ainsi à lui-même : « Asseyez-vous à ma droite, jusqu’à ce que je réduise vos ennemis à vous servir de marchepied. » Et quels sont ces ennemis ? Ceux dont le cœur est mauvais, ceux qui opposent leur volonté à la volonté divine.

Pour nous, combattons en braves soldats de toutes nos forces, sous ce chef dont les ordres sont toujours justes.

Voyons ceux qui portent les armes sous nos princes : avec quel ordre, quelle promptitude, quelle soumission ils exécutent le commandement !

Tous ne sont pas bons préfets, ni tribuns, ni centurions, ni officiers ; il ne se trouve dans un corps, ni cinquante préfets des soldats, ni cinquante officiers des grades suivants ; mais chacun dans son rang exécute les ordres du général ou des autres chefs.

Les grands ne peuvent être sans les petits, ni les petits sans les grands. Partout cette fusion existe, elle est nécessaire pour le service. Voyons notre corps : la tête sans les pieds n’est rien, ni les pieds sans la tête ; les moindre parties sont utiles, nécessaires au corps entier : toutes conspirent au même but : sa conservation, et toutes dans cette vue sont soumises à une même dépendance.

Qu’ainsi se conserve tout ce corps que nous formons en Jésus-Christ ; que chacun de nous soit soumis à son frère selon la mesure de grâce qui lui a été départie.

Que le fort n’outrage point le faible, que le faible respecte le fort ; que le riche fasse du bien au pauvre, et que le pauvre rende grâce à Dieu de lui avoir donné le riche pour l’aider dans sa misère.

Que le sage montre sa sagesse, non par de vains discours, mais par de bonnes œuvres ; que celui qui est vraiment humble ne se rende pas témoignage à lui-même, mais qu’il laisse ce soin à d’autres.

Que celui dont le corps est pur ne s’enfle pas d’orgueil. Qu’il sache que c’est d’un autre que lui que vient le don de la continence.

Rappelons-nous, mes frères, de quelle matière nous avons été formés, ce que nous étions, dans quel état nous sommes entrés dans ce monde, sortant comme d’un sépulcre et du sein des ténèbres.

Le Dieu auteur de notre être nous a introduits dans ce monde, son ouvrage, où ses dons nous étaient préparés d’avance.

Puisque nous avons tout reçu de lui, nous devons lui rendre grâce de tout : à lui donc la gloire dans tous les siècles des siècles.

Le fou et l’insensé, l’homme vain et l’ignorant, se moquent et se rient de nous ; ils cherchent, par l’orgueil de leurs pensées, à s’élever au-dessus des autres.

Mais que peut un faible mortel ? Quelle force dans un peu de terre ? Car il est écrit : « Une image inconnue s’arrêta devant mes yeux, et j’entendis sa voix comme un léger souffle. L’homme sera-t-il justifié devant Dieu ? Sera-t-il pur devant son créateur ?

« Ceux qui étaient ses ministres ont été ébranlés, et il a trouvé le mal dans les anges, et les cieux mêmes ne sont pas purs devant lui. Le sont-ils, ceux qui habitent des maisons d’argile et qui sont faites de boue ainsi que nous ? Dieu les a frappés ; ils seront rongés des vers. Du matin au soir, la faux les moissonne ; et parce qu’aucun d’eux n’a compris, ils périront éternellement. Toute leur gloire meurt avec eux ; ils ont passé, ils n’avaient pas la sagesse.

« Appelle maintenant quelqu’un pour te répondre ; invoque le secours des esprits célestes ; la colère tue l’insensé et l’envie achève sa ruine. J’ai vu l’impie affermi dans ses racines, et aussitôt j’ai maudit son éclat. Ses enfants ont vécu dans la misère ; foulés aux pieds près des portes de la ville, nul ne les a défendus. L’homme affamé a dévoré ses moissons, malgré la haie qui les entoure ; l’homme altéré a bu ses richesses. »

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