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DEUXIÈME PARTIE

DU DOMAINE TERRESTRE À CELUI DE L'ÂME ET À CELUI DES DÉMONS

Du profane au charnel et au démoniaque

Lisons à présent Jacques 3.15, verset vraiment significatif sur lequel je vais m'arrêter longuement. Évoquant une certaine forme de sagesse, Jacques dit :

« Cette sagesse n'est pas celle qui vient d'en haut ; mais elle est terrestre, charnelle, démoniaque. »

À présent, nous sommes arrivés à la conclusion que « charnel » est « psuchikos », c'est-à-dire « du domaine de l'âme ». Il existe une forme de sagesse qui vient de l'âme. Le déclin se fait en trois étapes : d'abord selon le monde, ensuite selon l'âme, enfin le démoniaque. Je crois que c'est la stratégie principale dont se servent les démons pour miner l'œuvre de Dieu, le peuple de Dieu et l'Église de Dieu ; c'est au travers de cette dégradation du terrestre au charnel et au démoniaque.

Considérons le domaine terrestre. Pour un chrétien, je crois que cela signifie que sa vision est complètement limitée à cette terre. Il ne peut voir au-delà d'elle. Tout ce qu'il espère de Dieu au travers du salut, ce sont des choses qui appartiennent à ce monde et à cette vie : la prospérité, la guérison, le succès, le pouvoir, et bien plus sans doute. Tout cela est, je crois, du domaine de l'âme.

Je vais prendre quelques exemples de personnages qui n'étaient pas « terrestres ». Ils sont tous cités dans Hébreux 11. En fait, nous pourrions en un mot dire de ces saints qu'ils n'étaient ni sous l'influence de leur âme ni sous celle du monde. Voici juste deux exemples parmi eux. Dans Hébreux 11.9-10, il est question d'Abraham :

« C'est par la foi qu'il vint s'établir dans la Terre promise comme en un pays étranger, habitant sous des tentes, ainsi que Isaac et Jacob, héritiers avec lui de la même promesse. Car il attendait la cité qui a de solides fondations, celle dont Dieu est l'architecte et le constructeur. »

Abraham était en Terre promise ; il savait qu'elle lui était promise, mais elle ne lui appartenait pas et jamais il n'y a vécu comme si elle était sienne. Il n'a jamais acheté de maison, il a toujours vécu sous une tente qui se déplace facilement. Notez le contraste avec Lot qui s'est séparé d'Abraham et a tourné son visage vers Sodome. Les habitants de cette ville étaient de grands pécheurs devant le Seigneur et extrêmement mauvais. Lot est allé là où son visage s'était tourné. Ensuite nous le retrouvons non plus se dirigeant vers Sodome, mais habitant Sodome, dans une maison, et non plus sous une tente. Je pense que, dans un sens, Lot représente l'homme de Dieu terrestre, qui vit dans le monde.

Mais Abraham avait une vision qui dépassait le temps et tendait vers l'éternité. Il attendait la cité qu'il n'avait jamais vue mais qui, il le savait, serait un jour son foyer. Je crois que Dieu s'attend que nous, chrétiens, soyons ainsi, que nous ne nous sentions pas à l'aise chez nous sur cette terre. Lorsque nous nous sentons très à l'aise dans ce monde-ci, c'est que nous sommes devenus « charnels ».

Un autre exemple est Moïse. Lisons Hébreux 11.27 :

« C'est par la foi qu'il quitta l'Égypte sans craindre la fureur du roi ; car il tint ferme, comme voyant celui qui est invisible. »

Laissez-moi vous suggérer qu'ici se trouve la clé de l'endurance. Endurer, résister avec patience, c'est voir au-delà du temps, de cette vie présente semée d'épreuves, de frustrations et de déceptions. Ce qui nous fait résister avec patience, c'est la vision qui nous projette au-delà du temps.

Il y a bien d'autres exemples de personnages bibliques comme Abraham et Moïse qui n'étaient pas de ce monde. L'apôtre Paul fait cette remarquable déclaration dans 1 Corinthiens 15.19, à laquelle nous devrions réfléchir sérieusement :

« Si c'est dans cette vie seulement que nous espérons en Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes (les plus à plaindre). »

C'est une remarque bien étonnante ! Si notre foi chrétienne ne s'ouvre que sur une honorable vue matérialiste, nous sommes en effet bien pitoyables et bien à plaindre ! Je dois dire, et je veux le faire avec grâce, qu'une grande partie de l'enseignement donné dans les églises est centrée sur les bontés que Dieu accorde aux croyants dans la vie présente. Ceux-ci se croient prospères et dans la droite ligne du succès ; mais Dieu les considère comme pitoyables. C'est une vérité fondamentale. Les chrétiens des générations avant la Première Guerre mondiale avaient conscience du fait que le monde n'était pas leur foyer. Mais après la guerre, bien des chrétiens ont perdu cette notion et vivent maintenant comme si nous appartenions vraiment à ce monde. Nos pensées, nos ambitions, nos projets sont centrés sur les soucis de notre temps. Nous sommes attachés à ce monde.

Lorsque nous devenons conformes à ce monde, quelle est l'étape suivante ? Nous devenons « charnels ». L'essence de l'âme, c'est l'ego, le « je ». Être « charnel », c'est être égocentrique, se soucier d'une seule personne : soi. Le croyant charnel se demande sans cesse : « En quoi ceci ou cela me profite-t-il ? » Le croyant spirituel, lui, se demande : « En quoi puis-je glorifier Dieu ? » Je pense que vous serez d'accord avec moi pour dire — et j'espère ne pas être cynique — que beaucoup de croyants sont dirigés au gré de leur ego et de leur âme dans l'Église aujourd'hui.

Puis ce domaine charnel ouvre la porte à celui des démons. Lorsque vous agissez selon la volonté de votre âme et que vous demeurez à ce niveau, vous êtes exposé à leur œuvre. De telles situations permettent en effet aux démons d'infiltrer le peuple de Dieu et de son œuvre. Je vais vous donner cinq exemples qui se sont produits au cours de ce siècle.

Juste avant, nous allons voir deux personnages de l'Ancien Testament qui ont glissé du domaine terrestre à celui du charnel, puis du domaine charnel à celui des démons. C'étaient deux personnes très honorables. La première est Aaron. Dans Exode 32.1-10, nous voyons ce grand sacrificateur oint et consacré fabriquer un veau d'or. Moïse se trouve au sommet de la montagne et le peuple ne l'a pas vu depuis quarante jours :

« Le peuple vit que Moïse tardait à descendre de la montagne ; alors le peuple s'assembla autour d'Aaron et lui dit : Lève-toi, fais-nous des dieux qui marchent devant nous, car ce Moïse, cet homme qui nous a fait monter du pays d'Égypte, nous ne savons pas ce qui lui est arrivé. »

La phrase importante ici est : « L'homme qui nous as fait sortir d'Égypte. » En fait, ce peuple a perdu la vision de Dieu ; il se cherche et recentre sur des conducteurs humains. Cela, et j'en suis persuadé, mène inévitablement à l'idolâtrie. Lorsque nous perdons notre vision de Dieu et que nous nous recentrons sur les serviteurs de Dieu, nous sommes en grand danger.

Aaron répond au peuple :

« Défaites les anneaux d'or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles, et apportez-les-moi. Et tous les gens du peuple se défirent des anneaux d'or qui étaient à leurs oreilles et les apportèrent à Aaron. Il reçut l'or de leurs mains, le façonna avec le burin et fit un veau en métal fondu. Puis ils dirent : Israël ! Les voici tes dieux qui t'ont fait monter du pays d'Égypte. Lorsque Aaron vit cela (voilà une description remarquable : « lorsque Aaron vit son propre veau »), il bâtit un autel devant lui et s'écria : Demain, il y aura fête en l'honneur de l'Éternel ! »

J'ai du mal à comprendre comment Aaron a pu faire cela. Mais s'il a pu le faire, vous et moi le pouvons également. Nous ne sommes pas meilleurs que lui. La plupart d'entre nous n'atteignent même pas son envergure.

Puis il est dit :

« Le lendemain, ils se levèrent de bon matin, et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices d'actions de grâces. Le peuple s'assit pour manger et pour boire ; puis ils se levèrent pour se divertir. »

C'est là la nature de l'idolâtrie, lorsque notre adoration devient une représentation. Nous jouons un rôle. Nous avons glissé du spirituel au charnel, et l'étape ultime est le démoniaque. Ce n'est pas que je veuille critiquer, mais je dois dire que la plupart de ce qui se nomme adoration dans le mouvement charismatique n'en est pas du tout. C'est souvent du réflexe égocentrique : « Seigneur, guéris-moi ! Seigneur, bénis-moi ! Seigneur, fais-moi ceci, fais-moi cela ! » C'est centré sur soi, c'est du domaine charnel. Seul l'esprit peut se focaliser directement sur Dieu.

La plupart des musiques jouées dans l'Église aujourd'hui répondent aux désirs de l'âme et la stimulent. Elles ressemblent beaucoup à celles jouées dans le monde pour stimuler les sens. Je ne suis pas musicien et je ne chante pas trop juste, mais j'ai une sensibilité qui saisit l'impact de la musique. J'ai vécu cinq ans en Afrique et j'ai conscience que les thèmes et les rythmes répétitifs peuvent insensibiliser, et à l'extrême, en augmentant le volume sonore, faire perdre toute capacité de discernement. En Afrique, ces musiques rythmées servent à entrer en transe et à appeler les démons.

Nous sommes étonnés de la différence complète entre l'attitude du peuple lorsque Dieu lui a parlé des cieux et celle qu'il a eue juste deux mois plus tard. Voilà un renversement total. Dans Exode 20, lorsque le peuple a reçu la révélation unique de Dieu, telle qu'aucune autre nation ne les avait jamais eue, il a réagit avec respect, crainte et révérence. Nous lisons dans Exode 20.18-21, après que Dieu, du haut de la montagne, a énoncé les dix commandements :

« Tout le peuple observait le tonnerre, les éclairs, le son du cor et la montagne fumante. À ce spectacle le peuple tremblait et se tenait dans l'éloignement. Ils dirent à Moïse : Parle-nous toi-même, et nous écouterons, mais que Dieu ne nous parle pas, de peur que nous mourions. Moïse dit au peuple : Soyez sans crainte, car c'est pour vous mettre à l'épreuve que Dieu est venu, et c'est pour que vous ayez pour lui de la crainte, afin de ne pas pécher. Le peuple se tenait dans l'éloignement ; mais Moïse s'approcha de la nuée où était Dieu. »

Les Israélites étaient si impressionnés par la sainteté et la majesté de Dieu qu'ils ont dit : « Moïse, nous ne pouvons pas écouter davantage cette voix. Écoute-la pour nous, et nous écouterons ce que tu nous diras. » Cependant, en moins de deux mois, ils avaient glissé de cette attitude à celle qui consiste à vouloir un veau d'or à adorer, et à voir en Moïse, et non en Dieu, la personne qui les avait fait sortir d'Égypte.

Dans 1 Corinthiens 10.5-7, parlant des expériences vécues par Israël lors de sa sortie d'Égypte, Paul dit :

« Mais la plupart d'entre eux ne furent pas agréables à Dieu, puisqu'ils tombèrent morts dans le désert. Or ce sont là des exemples pour nous, afin que nous n'ayons pas de mauvais désirs, comme ils en ont eus. Ne devenez pas idolâtres, comme certains d'entre eux, selon qu'il est écrit : Le peuple s'assit pour manger et pour boire ; puis ils se levèrent pour se divertir. »

Que s'est-il passé ? Leurs besoins physiques satisfaits, l'estomac plein et le corps vêtu chaudement, ils ont cherché un peu de divertissement. « Divertissons-nous à présent ! Dansons ! » Je suis très inquiet lorsque l'adoration devient représentation, divertissement. Aujourd'hui nous rencontrons beaucoup cela. L'adoration n'a rien à voir avec le divertissement. Le divertissement dit : « Excite-moi ! Procure-moi des sensations ! Assouvis mes désirs ! » Tout cela au profit de l'âme. L'esprit est exclu.

Un autre exemple montrant le passage du domaine spirituel à celui de l'âme, puis à celui des démons est encore plus effrayant. Il se trouve dans Lévitique 9.23 à 10.2. Il se situe à une époque glorieuse pour Israël. Le peuple de Dieu avait exécuté ses ordres concernant les sacrifices, et son obéissance étant complète, Dieu a envoyé sa gloire et a consumé par le feu le sacrifice sur l'autel :

« Moïse et Aaron entrèrent dans la tente de la Rencontre. Lorsqu'ils en sortirent, ils bénirent le peuple. Et la gloire de l'Éternel apparut à tout le peuple. Un feu sortit de devant l'Éternel, et consuma sur l'autel l'holocauste et les graisses. Tout le peuple le vit ; ils poussèrent des cris de joie et se jetèrent face contre terre. »

Une démonstration de la gloire de Dieu à la vue de tous est un feu qui a entièrement consumé le sacrifice sur l'autel. Puis suivent deux versets parmi les plus tragiques de la Bible :

« Les fils d'Aaron, Nadab et Abihou, prirent chacun un brasier, y mirent du feu et posèrent du parfum dessus ; ils apportèrent devant l'Éternel du feu étranger, ce qui était en contradiction avec l'ordre de Dieu. Alors le feu sortit de devant l'Éternel et les consuma : ils moururent devant l'Éternel. »

Nadab était le fils aîné d'Aaron ; il devait succéder à son père et devenir le grand sacrificateur. Le même feu qui a consumé le sacrifice a brûlé vif les adorateurs. Qu'est-ce qu'un « feu profane » ? Je comprends qu'il s'agit d'un feu qui ne vient pas de l'autel du sacrifice ordonné par Dieu. Le « feu profane », dans notre expérience de vie, c'est l'adoration dans un esprit tout autre que le Saint-Esprit. Et la sanction, c'est la mort.

Nous lisons, dans Nombres 16.1-35, l'insurrection menée par les chefs de tribus contre Moïse dans le désert, lorsqu'ils ont pris deux cent cinquante brasiers, les ont allumés et ont dit : « Nous valons bien Aaron. Nous avons autant que lui le droit d'être sacrificateurs. ». Et Moïse leur a répondu : « Très bien ! Présentons l'affaire à Dieu. ». Alors il leur a commandé de s'assembler devant Dieu avec leurs brasiers et le feu de Dieu est descendu du ciel et a consumé les deux cent cinquante hommes. La leçon pour moi est simple : chacun est responsable de ce que contient son brasier. Vous êtes responsables de l'état d'esprit dans lequel vous vous approchez de Dieu. »

Ce n'est pas que vous allez être consumé par le feu, mais les jugements de Dieu sont souvent exemplaires. En d'autres termes, Dieu n'a pas jugé par exemple chaque ville où régnait l'homosexualité comme il l'a fait pour Sodome et Gomorrhe. Mais son jugement sur ces deux cités a été exemplaire : il montre à jamais ce qu'est l'homosexualité aux yeux de Dieu.

De même, lorsque Ananias et Saphira ont tenté par leur offrande de tricher avec Dieu, tous deux sont tombés morts, car ils s'étaient montrés meilleurs qu'ils n'étaient vraiment devant Dieu et l'assemblée (Actes 5). Chaque croyant agissant ainsi ne décède pas. S'il en était ainsi, il y aurait beaucoup moins de croyants dans l'Église. Mais l'appréciation de Dieu à cet égard ne change pas.

Ainsi se trouve la démonstration du danger d'approcher Dieu avec ce qui s'appelle « un feu profane » : tout esprit qui n'est pas le Saint-Esprit. Et je considère que cela est très réel.

Voyons l'application donnée par le Nouveau Testament dans Hébreux 12.28-29, sans oublier que les épîtres sont destinées aux chrétiens, et non aux non-croyants :

« C'est pourquoi, puisque nous recevons un royaume inébranlable, ayons de la reconnaissance, en rendant à Dieu un culte qui lui soit agréable, avec piété et avec crainte. Car notre Dieu est aussi un feu dévorant. »

Je me demande dans quelle mesure de « crainte » de Dieu, de « révérence », nous rencontrons aujourd'hui dans l'Église. Dans combien d'assemblées trouvons-nous la crainte de la présence de Dieu ?

J'ai rencontré récemment un ami qui est pasteur en Angleterre et voici ce qu'il m'a dit : « Je vois des gens qui parlent de Dieu comme s'il était quelqu'un qu'ils avaient rencontré au café ! » Nous avons cette relation de copinage avec Jésus. Il nous invite à l'intimité et la communion, mais nous ne devons jamais perdre le sens de la révérence de Dieu. C'est là la racine même des problèmes dont nous avons parlé.

Pour revenir un moment aux mouvements spirituels contemporains que je viens de décrire, je pourrais facilement dire qu'ils ont démarré de manière authentique et spontanée dans le Saint-Esprit. Une partie venait de l'Esprit saint, mais c'est devenu un mélange. Certaines choses sont de Dieu et d'autres ne le sont pas.

Pourquoi ? Quel est le problème ? Ma réponse est que nous sommes passés vers une manière de vivre les choses d'une façon naturelle, qui vient de l'âme : une focalisation sur soi, de la vérité biblique objective à l'expérience personnelle subjective.

Bien trop souvent, le sens de révérence et de crainte envers la sainteté de Dieu a été remplacée par la frivolité et la désinvolture qui ne sont pas bibliques. En fait, je dirais que la désinvolture est devenue une maladie endémique du mouvement charismatique contemporain. Si nous en sommes coupables, il faut nous en repentir.

Dieu m'a convaincu de désinvolture plus d'une fois ; j'ai confessé ce péché et je m'en suis repenti. Il faut mettre une garde sur nos lèvres et contrôler nos propos. Charles Finney a dit un jour : « Dieu ne sert pas d'un bouffon pour réveiller les consciences. » L'une des caractéristiques du Saint-Esprit est de convaincre de péché, de justice et de jugement (Jean 16.8). Si les gens ne sont pas convaincus de péché, il nous faut alors nous demander si le Saint-Esprit est bien à l'œuvre dans ce cas.

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