Précis d'histoire de l'Eglise

Chapitre 2 : Le monachisme en Occident

Le monastère de Lérins continue à constituer un centre de vie intellectuelle et théologique. Il est la pépinière où se recrutent la plupart des dignitaires de la Gaule du Sud, entre autres Césaire d’Arles qui mena la controverse semi-pélagienne à bonne fin. Cependant deux mouvements nouveaux voient le jour au Ve et au VIe siècles.

1. Le monachisme irlandais. Patrick (Ve siècle), après s’être formé à Marmoutiers, fonda en Irlande des quantités de couvents qui étaient autant de centre d’évangélisation dans le pays païen. L’Eglise d’Irlande devint ainsi une église de moines.

Trois grands noms sont à retenir : Colomba (VIe siècle), qui a fondé le couvent de Iona en Ecosse ; Colomban (fin du VIe, début VIIe siècle) qui a fondé des couvents en Gaule et en Italie : Luxeuil dans les Vosges ; Bobbio en Italie, où il mourut ; Gall, disciple de Colomban, qui a fondé le couvent de St-Gall, d’où l’Evangile se répandit en Allemagne.

L’Eglise iro-bretonne était assez indépendante de la papauté ; l’autorité épiscopale y était faible ; les églises étaient simples, sans images ; la prédication se faisait en langue vulgaire ; on y reconnaissait l’autorité de l’Ecriture seule, sans s’attacher à la tradition ; on y avait conservé l’usage de célébrer Pâques le 14 nisan, quel que soit le jour de la semaine. La discipline y était très sévère, avec pénitences nombreuses (jeûnes, prières, flagellation ; réclusion dans un monastère).

Les monastères irlandais ont été des centres de culture et de piété en même temps que l’activité missionnaire.

2. Le monachisme bénédictin. Le fondateur du mouvement monastique occidental fut cependant l’Italien Benoît de Nursie (480-543). Après avoir vécu quelques années en anachorète, il fonda un monastère au Mont-Cassin, au début du VIe siècle. Il composa pour les moines une règle sévère. Avant d’entrer dans l’ordre, le futur moine accomplissait un noviciat prolongé ; puis devait prêter les trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. Ces vœux, contrairement à ceux des moines basiliens, étaient perpétuels. Le moine devait à son abbé un obéissance aveugle comme à Dieu même.

Les moines bénédictins se sont répandus dans toute l’Europe Occidentale et ont rendu en leur temps des services considérables. Ils ont défriché des régions inhospitalières et sauvages. Au milieu de l’ignorance grandissante, des monastères ont été des foyers de vie intellectuelle.

Le mérite d’avoir orienté les Bénédictins vers l’étude revint en particulier à Cassiodore qui, après avoir joué un rôle auprès du roi Ostrogoth Théodoric, se retira dans un couvent et composa un gros ouvrage d’histoire.

L’obéissance des moines.

La première étape de l’humilité, c’est l’obéissance sans délai. Elle convient à ceux qui estiment qu’il n’y a rien de plus cher, pour eux, que le Christ, à cause du service saint dont ils ont fait profession, à cause de la crainte de l’enfer et de la gloire de la vie éternelle, à peine le supérieur a-t-il commandé quelque chose, qu’ils ne savent souffrir aucun délai dans l’exécution, tout comme si l’ordre venait de Dieu. C’est d’eux que le Seigneur dit : « Dès que son oreille m’a entendu, il m’a obéi ». Et il dit aussi à ceux qui enseignent « Qui vous écoute m’écoute »…

Ainsi, ne vivant pas à leur guise et n’obéissant pas à leurs désirs ni à leurs inclinations, mais marchant selon le jugement et le commandement d’un autre, ils désirent vivre en communauté, et avoir un abbé à leur tête. Sans aucun doute, de tels hommes suivent la sentence du Seigneur, qui dit : « Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé ».

Mais cette obéissance sera alors bien reçue de Dieu et douce aux hommes, si ce qui est ordonné est exécuté sans trouble, sans lenteur, sans murmure, sans réplique ni refus, car l’obéissance qu’on rend aux supérieurs, on l’adresse à Dieu. Lui-même à dit, en effet : « Qui vous écoute m’écoute ». Et il faut qu’elle soit offerte de bon cœur par les disciples, « car Dieu aime celui qui donne avec joie ».

De ce fait, si le disciple obéit de mauvais gré, et s’il murmure non seulement de bouche, mais aussi dans son cœur, même s’il exécute l’ordre, cependant ce ne sera plus agréable à Dieu, qui voit le cœur murmurer, et pour un tel acte, il n’obtient aucune récompense. Bien au contraire, il encourt la peine des murmurateurs, s’il ne fait satisfaction et ne se corrige.

Règle de St Benoît, § 5.
Traduit par Dom Ant. DUMAS.

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