Précis d'histoire de l'Eglise

Chapitre 4 : La réforme dissidente

1. Les anabaptistes

1. Caractéristiques. Les mouvements luthérien, calviniste, anglican, avaient abouti à la formation d’Eglises protégées par l’Etat et dont tous les citoyens d’un pays devaient autant que possible faire partie. Quelques évangéliques de Zurich conçurent le plan de fonder une Eglise totalement séparée de l’Etat, et dans laquelle n’entrerait qu’un petit nombre d’adultes vraiment convertis. Ils s’opposaient, par conséquent, au baptême des enfants, et rebaptisaient leurs adhérents ; d’où leur sobriquet d’anabaptistes ou rebaptiseurs. Ils ne se révoltaient pas contre l’Etat, mais considéraient l’Etat comme une institution mondaine ; ils ne voulaient pas être magistrats, ni prêter serment, ni porter les armes.

En doctrine, ils niaient la prédestination et insistaient sur la nécessité des bonnes œuvres comme fruits de la justification.

2. Débuts. Les premiers chefs du mouvement furent Grebel, Manz et Blaurock. Le premier avec été un collaborateur de Zwingli, mais s’était séparé de lui lorsque la décision d’introduire la réforme fut remise aux mains du Conseil de la ville. Après une discussion publique entre Zwingli et les anabaptistes, le Conseil prit des mesures répressives. Après diverses menaces, Grebel fut mis en prison, Blaurock fut chassé de la ville, et Manz noyé dans le lac de Zurich. A la même époque, Sattler rédigeait à Schleitheim la première confession de foi anabaptiste. Lui-même mourut martyr peu après.

Persécutés à la fois par les catholiques et les protestants, les anabaptistes se multiplièrent pourtant en Suisse, en Allemagne, en Bohême, sans doute parce que beaucoup de petites communautés vaudoises se joignirent à eux.

3. Déviations. Un fâcheux incident aggrava encore la situation des anabaptistes. Quelques-uns de leurs prophètes se mirent à annoncer la venue prochaine du règne de mille ans, et un certain Jean de Leyde rêva de l’établir à Munster, en Westphalie. Son gouvernement sombra dans l’immoralité, la cruauté et le ridicule, sous les coups de l’armée épiscopale. On ne peut rendre les anabaptistes dans leur ensemble responsables de ces excès qu’ils ont nettement désapprouvés.

Menno Simons

4. Organisation. Un prêtre converti, Menno Simons, réussit à réorganiser les communautés anabaptistes ; il combattit le fanatisme, ramena le mouvement à ses tendances primitives et lui donna un nouvel essor. Pendant 25 ans, il travailla inlassablement, par la plume et par la parole, en Allemagne du Nord et en Hollande. Ses adhérents, reconnaissants, prirent alors le nom de Mennonites.

Persécutés partout ailleurs, les Mennonites finirent par obtenir la tolérance aux Pays-Bas. Ils avaient pour livre de chevet leur gros Martyrologe. Ils exprimèrent leur foi dans la Confession de Dortrecht et dans le Catéchisme de Deux-Ponts.

Confession de Schleitheim.

Premièrement : Remarquez ceci pour ce qui est du baptême : le baptême doit être donné à tous ceux qui ont appris la repentance et l’amendement de vie, et qui croient en vérité que leurs péchés ont été ôtés par le Christ, à tous ceux qui veulent marcher dans la résurrection de Jésus-Christ et désirent être ensevelis avec lui dans la mort pour ressusciter avec lui, et à tous ceux qui le désirent et nous le demandent eux-mêmes dans ce sens.

Quatrièmement : Nous nous sommes reconnus unis sur la séparation qui doit se faire d’avec la méchanceté et d’avec le mal que le diable a semés dans le monde, uniquement afin que nous n’ayons pas communion avec eux et ne courions pas avec eux dans la multitude de leurs abominations…

Car il n’y a dans le monde et toute la création que bon et mauvais, croyant et incrédule, ténèbres et lumière, le monde et ceux qui sont sortis du monde, le temple de Dieu et (celui des) idoles, Christ et Bélial, et aucun ne peut avoir de part avec l’autre. L’ordre du Seigneur nous est donc clair quand il nous dit d’être séparés du mal, et qu’ainsi il veut être notre Dieu et nous ses fils et ses filles…

Et enfin : Nous voyons qu’il ne convient pas pour le chrétien de servir comme magistrat pour ces raisons : le régime des magistrats est selon la chair, celui des chrétiens selon l’esprit ; leur habitation reste dans ce monde, celle des chrétiens au ciel ; leur citoyenneté est dans ce monde, celle des chrétiens au ciel ; les armes de leur conflit et de leur guerre sont charnelles et (efficaces) seulement contre la chair, mais celles des chrétiens sont spirituelles, contre les forteresses du diable (Cor. 10.4). Les magistrats du monde sont armés de fer et d’acier, mais les chrétiens sont revêtus de l’armure de Dieu, – vérité, justice, paix, foi et salut – et la parole de Dieu (Eph. 6.14-17).

Extrait de J. YODER et P. WIDMER
Principes et Doctrines Mennonites.

2. Les antitrinitaires

Michel Servet

1. Servet. Michel Servet, juriste et médecin espagnol, en vint de bonne heure à considérer la doctrine de la Trinité comme une erreur, et il entreprit d’amener Calvin à ses idées. Après divers incidents, il se rendit à Genève, fut reconnu, jugé, déclaré coupable d’hérésie et sur le verdict des Eglises de Suisse, condamné à être brûlé vif. Calvin plaida en vain pour qu’il subisse une mort moins cruelle.

2. Sociniens. Ce mouvement doit son origine à l’Italien Lélius Socin (1525-1562), et surtout à son neveu, Fauste Socin (1539-1604), qui répandit les idées que son oncle avait prudemment tenues cachées. D’après eux, la Bible, seule révélation de Dieu, ne peut rien contenir de contraire à la raison humaine ; ils nient en conséquence la Trinité, l’expiation, le salut par la foi ; ils rejettent aussi le baptême des enfants.

Des communautés sociniennes s’organisèrent en Transylvanie et surtout en Pologne, dans la seconde moitié du XVIe siècle.

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