Précis d'histoire de l'Eglise

Chapitre 7 : Les travaux d’érudition

En marge des mouvements théologiques allemands, tout un travail d’érudition s’accomplit dans les diverses disciplines. Des savants de tous les pays y prennent part.

1. Etudes sur l’Ancien Testament. Les hypothèses contradictoires de la critique négative sont assez dépourvues d’intérêt.

Jean Astruc (1684-1766)

Édouard Reuss

Après Richard Simon, qui ne croyait pas que le Pentateuque fut de Moïse, l’initiateur de cette critique fut le Français Astruc (1684-1766). Il publia en 1753 ses Conjectures sur les mémoires originaux dont il paraît que Moïse s’est servi pour composer le Livre de la Genèse. Il se basait sur le fait que Dieu est appelé tantôt Elohim, tantôt Yahweh. En Allemagne Eichhorn (1752-1827) et de Wette (1780-1849), en Hollande Kuenen (1828-1891), prof. à Leyde, en France Reuss (1804-1891), prof. à Strasbourg élaborèrent toujours plus cette hypothèse.

Julius Wellhausen

Graf (1815-1869) et Wellhausen (1844-1918) donnèrent à l’hypothèse des sources du Pentateuque sa forme classique. Ils admettent un auteur Elohiste (E), un Jahwiste (J), un Deutéronomiste (D) contemporain de Josias, un auteur sacerdotal (P) postérieur à l’exil, enfin un rédacteur (R). Ils datent tous les autres livres de l’Ancien Testament de façon à les faire cadrer avec ce schéma.

L. Gauthier et Alex Westphal ont popularité ces théories en langue française. Il ne manquait pas de théologiens pour s’opposer à cette construction, Oehler (1812-1872), auteur d’un ouvrage remarquable sur la Théologie de l’Ancien Testament, en Amérique le grand érudit Dick Wilson, en Hollande le prof. Aalders. Le Norvégien Mowinckel a exposé des théories très originales, en particulier sur les Psaumes.

Les découvertes archéologiques ont prouvé que bien des détails mis en doute par les critiques sont rigoureusement exacts. Les trouvailles faites depuis 1947 à Qumran près de la Mer Morte ont très fortement ébranlé les positions des théologiens qui acceptent encore les idées de Graf et de Wellhausen. Elles montrent combien le texte que nous possédons est bien conservé.

Parmi les archéologues bibliques, citons le Genevois Ed. Naville (1844-1926) et André Parrot, sans parler des catholiques.

Plusieurs savants de tendances théologiques diverses on fait progresser la connaissance de l’hébreu, en particulier Gesenius (1736-1842). Kittel a rendu de grands services par les bonnes éditions de l’Ancien Testament.

2. Etudes sur le Nouveau Testament. La critique s’est attaquée au Nouveau Testament comme à l’Ancien. Nous avons déjà parlé des deux principaux mouvements négateurs, l’école de Tubingue au XIXe siècle, la Formgeschichte au XXe.

On peut encore mentionner Paulus (1761-1851) qui niait la possibilité du miracle et cherchait à expliquer ceux du Nouveau Testament comme des phénomènes naturels ; de Wette, Reuss, Wellhausen qui ne se sont pas cantonnés dans la critique de l’Ancien Testament, mais ont appliqué leurs principes au Nouveau ; Jülicher, très négatif lui aussi. En France Goguet (1880-1955) est le représentant le plus marquant de la critique du Nouveau Testament.

Frédéric Godet (1812-1900)

Du côté conservateur, outre Hengstenberg, Zahn et Schlatter maintinrent l’intégrité du Nouveau Testament. Frédéric Godet, professeur à Neuchâtel, par ses commentaires et ses introductions, défendit la bonne cause en un temps difficile.

Constantin von Tischendorf

Des travaux très utiles furent réalisés par Tischendorf (1815-1874), Soden, Nestlé et d’autres pour établir le texte du Nouveau Testament sur la base des meilleurs manuscrits. La découverte de plusieurs manuscrits et papyrus importants facilita ce travail.

John Nelson Darby

3. Etudes sur la prophétie. Ce ne sont pas uniquement des mouvements hérétiques qui ont étudié cette question. Darby a mis au point une interprétation de la prophétie assez nouvelle qui distingue deux phases dans le retour du Seigneur et qui voit dans les visions de l’Apocalypse des événements encore à venir. Cette conception s’est imposée à beaucoup même en dehors des cercles des Frères. Nous en trouvons l’exposé le plus connu dans l’ouvrage Jésus revient de Blackstone. D’autres, comme Guinness, ont maintenu l’interprétation dite historique de la prophétie. Nous assistons de toute façon à un réveil réjouissant de l’intérêt pour ces questions au sein du peuple chrétien.

4. Histoire de l’Eglise. Neander (1789-1850), israélite converti, s’est adonné à l’étude du christianisme primitif. Il a su y intéresser ses contemporains.

Harnack (1851-1930) était de tendance libérale. Il avait une érudition extraordinaire, si bien que ses ouvrages sont intéressants même pour ceux qui ne partagent pas ses idées.

Les principaux sont l’Histoire des Dogmes, l’Histoire de la Littérature de l’Eglise Primitive, la Diffusion de l’Evangile dans les premiers siècles.

En France, il faut retenir le nom du Doyen Doumergue (1844-1937) et son volumineux ouvrage sur Calvin et plus près de nous celui du professeur Léonard (1890-1961).

William James (1842-1910)

5. Psychologie religieuse. Cette discipline a été créée en quelque sorte par le professeur William James dans son ouvrage l’Expérience religieuse. Malheureusement beaucoup de ceux qui se sont occupés de cette question étaient libéraux. En langue française, heureusement, nous avons dans ce domaine les bons livres du Docteur Tournier.

6. Histoire des religions. Cette discipline, elle aussi, s’est développée au cours des cent dernières années. Plusieurs ont cherché à mettre le christianisme sur le même plan que les autres religions, ou sont partis d’un a priori évolutionniste. Cependant, Lang et le P. Schmidt en sont arrivés à penser que la religion primitive de l’humanité était une sorte de monothéisme.

Friedrich Max Müller (1823-1900)

Le pionnier de cette discipline a été l’Allemand Max Müller. En France on peut noter Réville († 1906), professeur au Collège de France.

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