La foi évangélique

Chapitre 1
La révélation de Dieu

Dans toute religion, la question primordiale concerne le sujet de l'autorité : de quelle autorité est revêtu ce que nous croyons ? A cette question, les évangéliques (qu'ils soient anglicans, luthériens, presbytériens, baptistes ou autres) répondent d'emblée que ce n'est ni l'Église, ni l'individu qui détiennent cette autorité suprême, mais le Christ et le témoignage que la Bible lui rend.

Ce chapitre se propose d'explorer cet aspect de notre identité évangélique. Pourquoi les évangéliques attribuent-il l'autorité suprême à l'Écriture ? Quelles sont les conséquences de ce postulat ?

La meilleure façon de comprendre la conception évangélique de l'Écriture est peut-être d'examiner le faisceau de trois mots étroitement liés à l'Écriture, à savoir « révélation », « inspiration » et « autorité ».

La révélation

Le mot « révélation » vient du latin revelatio qui signifie « dévoilement ». Il décrit l'action objective qui consiste à ôter le voile recouvrant un objet de façon à le rendre visible. Les chrétiens évangéliques commencent par reconnaître le caractère raisonnable, évident et logique de la révélation. Comme Dieu est notre créateur, infini dans son Être, et que nous sommes des créatures finies liées à l'espace et au temps, il vient tout naturellement à l'esprit que nous ne pouvons pas le découvrir par nos efforts et nos moyens. Dieu nous transcende totalement. En outre, comme il est le Dieu entièrement saint, et que nous sommes des êtres déchus, pécheurs et sous son juste jugement, il existe entre lui et nous un gouffre béant que nous ne pouvons pas enjamber de là où nous sommes. Simultanément créatures finies et déchues, nous ne pouvons pas atteindre Dieu. Nous ne pourrions jamais le connaître, à moins qu'il ne prenne l'initiative de se révéler. Sans cette démarche souveraine, tous les autels du monde devraient porter l'inscription que Paul a lue sur celui d'Athènes : « A UN DIEU INCONNU » (Actes 17.23). Il nous serait à la fois incompréhensible et inaccessible. Cette double évidence constitue la raison primordiale de la révélation divine, et elle fournit à Paul un des thèmes majeurs de sa première lettre aux Corinthiens :

Ainsi est-il écrit :
Je détruirai la sagesse des sages,
Et j'anéantirai l'intelligence des intelligents.
Où est le sage ? où est le scribe ? où est le contestataire de ce siècle ? Dieu n'a-t-il pas frappé de folie la sagesse du monde ? Car puisque le monde, avec sa sagesse, n'a pas connu Dieu dans la sagesse de Dieu, il a plu à Dieu de sauver les croyants par la folie de la prédication [le kerygma, l'Évangile]. (1 Corinthiens 1.19-21)

Et plus loin, l'apôtre ajoute :

Nous prêchons la sagesse de Dieu, mystérieuse et cachée, que Dieu avait prédestinée avant les siècles, pour notre gloire ; aucun des princes de ce siècle ne l'a connue, car s'ils l'avaient connue, ils n'auraient pas crucifié le Seigneur de gloire. Mais c'est, comme il est écrit :
Ce que l'œil n'a pas vu,
Ce que l'oreille n'a pas entendu,
Et ce qui n'est pas monté au cœur de l'homme,
Tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment.
A nous, Dieu nous l'a révélé par l'Esprit. (1 Corinthiens 2.7-10a)

Ces deux affirmations éloquentes soulignent le contraste entre la sagesse de Dieu et celle du monde. D'un côté, Paul déclare la faillite, voire l'incapacité de la sagesse humaine de trouver ou de connaître Dieu. De l'autre, il indique la nécessité de la sagesse divine inaccessible à l'œil, à l'oreille et à l'imagination de l'homme, mais révélée par Dieu, proclamée par les apôtres, et pleinement capable de sauver ceux qui croient.

L'Écriture mentionne quatre types de révélation. Ils décrivent les différentes manières par lesquelles Dieu s'est fait connaître et continue de le faire en partie.

La révélation générale ou naturelle

La « révélation générale » est appelée ainsi parce qu'elle s'applique à tout être, à toute l'humanité. Elle est « naturelle » parce qu'elle utilise le canal de la nature, celui de l'ordre créé. Un exemple tiré de chaque Testament illustrera mon propos.

Dans l'Ancien Testament, la référence la plus complète à une révélation générale se trouve dans les versets 2 à 7 du Psaume 19. « Les cieux racontent la gloire de Dieu. » Leur proclamation est continue et universelle, car « le jour en donne instruction au jour, la nuit en donne connaissance à la nuit » et elle atteint les « extrémités du monde », en particulier par le soleil qui traverse journellement l'étendue du ciel. Bien qu'il ne s'agisse pas à proprement parler d'« un langage » ni de « paroles », il n'en demeure pas moins que les cieux « racontent » métaphoriquement. La terre également puisque « toute la terre est pleine de sa gloire. » (Ésaïe 6.3)

La mention néotestamentaire la plus claire relative à la révélation générale est de la plume de Paul dans sa lettre aux Romains. L'apôtre insiste sur le fait que « Dieu... a manifesté » aux êtres humains ce qu'ils peuvent connaître de lui, car dans toute l'Histoire (« depuis la création du monde »), les attributs invisibles de puissance et de divinité se voient « dans ses ouvrages » (Romains 1.19-21 ; cf. Actes 14.17 ; 17.24s.). Le monde créé est une révélation visible du Dieu invisible. Tout comme les artistes se révèlent dans leur art, le créateur se révèle dans la création. De plus, nous avons une certaine connaissance de l'ordre moral par notre conscience. (Romains 1.32-2.2)

Aujourd'hui encore, Dieu continue de se faire connaître par la création et la conscience. La rationalité, la complexité et la beauté du monde d'un côté, notre sentiment inné du bien et du mal, du devoir et de l'échec de l'autre, nous parlent de Dieu. Mais le drame, c'est que nous avons étouffé cette voix de la vérité pour suivre notre propre voie égoïste. C'est pourquoi nous sommes coupables et inexcusables. (Romains 1.21 ; 2.1) la révélation générale est donc incapable de nous sauver ; elle ne peut que nous condamner. Nous ne pouvons découvrir le chemin du salut en contemplant les étoiles. L'ordre créé nous révèle la gloire de Dieu ; pour connaître sa grâce, nous avons besoin d'une autre révélation.

La révélation spéciale ou surnaturelle

Il existe au moins six différences entre la révélation « générale » et la révélation « spéciale ».

Révélation générale Révélation spéciale
1. Elle est « générale » parce qu'accordée à m'importe qui n'importe où. 1. Elle est « spéciale » parce qu'accordée à des gens particuliers dans des contextes particuliers.
2. Elle est « naturelle » parce qu'elle emprunte le canal de la nature. 2. Elle est « surnaturelle » parce qu'elle emprunte le canal du miracle (l'inspiration des Écritures et l'incarnation du Fils).
3. Elle est « continue » parce que permanente. 3. Elle est « finale » parce que complète en Jésus-Christ et dans le témoignage biblique rendu au Christ.
4. Elle est « glorieuse », parce qu'elle révèle la gloire de Dieu dans la création. 4. Elle est « miséricordieuse » parce qu'elle révèle la grâce de Dieu dans le salut.
5. Elle est « visible » parce qu'elle révèle les œuvres de Dieu. 5. Elle est « audible » parce qu'elle fait entendre les paroles de Dieu.
6. C'est une révélation de « jugement » parce qu'elle condamne ceux qui la rejettent. 6. C'est une révélation de « salut » parce qu'elle sauve ceux qui l'acceptent.

De toutes ces différences, celle qui nous intéresse plus particulièrement maintenant est la deuxième : la révélation générale emprunte le canal de la nature (les cieux et la terre proclament la gloire de Dieu), tandis que la révélation spéciale nécessite un miracle (l'inspiration et l'incarnation). La combinaison de l'inspiration et de l'incarnation est fondamentale. Nous autres évangéliques avons souvent commis l'erreur d'isoler la Bible et de la mettre un cran au-dessus de l'incarnation. Or, le point culminant de la révélation de Dieu est le Fils incarné, la Parole faite chair : « Dieu nous a parlé par le Fils en ces jours qui sont les derniers... ». (Hébreux 1.2a)

En outre, le Fils est décrit comme l'agent de la création, celui qui la soutient et l'héritier de l'univers, le rayonnement de la gloire de Dieu, l'exacte représentation de son Être, celui qui a accompli la purification des péchés et a été élevé à la droite de la majesté divine. (Hébreux 1.1-3)

Comment savons-nous toutes ces choses concernant Jésus-Christ ? Sa vie incarnée n'a duré qu'une trentaine d'années, et nous n'étions pas là pour voir son déroulement. Comment cette vie peut-elle encore avoir des effets bénéfiques pour les générations qui se sont succédées depuis, et comment se fait-il qu'elle n'ait pas été enfouie dans les brumes de l'antiquité ? La réponse réside dans la personne des apôtres. Ils furent choisis et équipés pour rapporter et expliquer ce que Dieu avait dit et fait en Jésus-Christ. C'est par ce moyen seulement que les générations subséquentes ont pu avoir accès au Christ. Le seul Christ authentique est le Christ de la Bible. L'Écriture a donc enfermé le Christ pour pouvoir le présenter aux êtres humains de tous temps et de tous lieux. L'apogée de la révélation de Dieu se trouve donc dans le Christ historique incarné et dans le témoignage biblique intégral que la Bible lui rend.

Dans le dessein divin de la révélation spéciale, événement et témoignage allaient de pair. Il est important de le rappeler car les savants libéraux (et surtout des néo-orthodoxes) prétendaient habituellement que la révélation de Dieu était personnelle et non propositionnelle. Cette distinction est cependant fallacieuse. Il est vrai que Dieu s'est principalement révélé de façon personnelle, par ses actes de salut et de jugement. Mais comment ces événements auraient-ils pu être bénéfiques pour ceux qu'ils ne concernaient pas au premier chef, s'il n'y avait pas eu des témoins pour les rapporter et les interpréter ? Prenons un exemple. De nombreuses tribus du Moyen-Orient migrèrent à l'époque de l'exode. Comment saurions-nous que la sortie d'Égypte des Israélites était un événement spécial si Dieu n'avait pas suscité Moïse et les prophètes pour nous le dire ? De même, il y eut de nombreux crucifiés du temps où Rome occupait la Palestine. Comment saurions-nous que la crucifixion de Jésus était unique, qu'elle marquait le grand tournant de l'Histoire humaine, si Dieu n'avait pas désigné et préparé les apôtres à en témoigner ? Ainsi, la révélation spéciale de Dieu était généralement une combinaison d'actes et de paroles, d'événements et du témoignage qui leur était rendu.

Ne perpétuons donc pas le mythe selon lequel la révélation divine pouvait être personnelle sans nécessairement être propositionnelle, qu'elle pouvait être actes non accompagnés de paroles. Ne succombons pas à la méfiance actuelle vis-à-vis des mots. Les paroles comptent. Même les images ont besoin des mots pour les expliquer. Dieu a choisi le langage humain pour entrer en communication avec nous. Nous sommes familiarisés avec des expressions comme « La parole de l'Éternel me fut adressée en ces mots... » (P. ex. Jérémie 1.4) ou « Écoutez la parole de l'Éternel » (P. ex. Ésaïe 1.10). « C'est pourquoi nous rendons continuellement grâces à Dieu de ce qu'en recevant la parole de Dieu que nous vous avons fait entendre, vous l'avez accueillie, non comme la parole des hommes, mais comme ce qu'elle est vraiment : la parole de Dieu qui agit en vous qui croyez » (1 Thessaloniciens 2.13). Le langage est le moyen de communication le plus perfectionné que nous connaissions. Nous ne pouvons pas connaître les pensées d'autrui aussi longtemps que nous n'avons pas engagé une conversation avec lui. Nous prétendons parfois lire les pensées des autres, mais c'est impossible. Si mon vis-à-vis se murait dans son silence et adoptait un visage impassible, je n'aurais pas la moindre idée de ce qu'il pense. Si donc nous sommes déjà incapables de lire les pensées de nos semblables, combien moins pouvons-nous lire celles de Dieu !

Car mes pensées ne sont pas vos pensées,
Et vos voies ne sont pas mes voies,
— Oracle de l'Éternel.
Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre,
Autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies
Et mes pensées au-dessus de vos pensées.
Comme la pluie et la neige descendent des cieux
Et n'y retournent pas
Sans avoir arrosé, fécondé la terre
Et fait germer (les plantes),
Sans avoir donné de la semence au semeur
Et du pain à celui qui mange,
Ainsi en est-il de la parole qui sort de ma bouche :
Elle ne retourne pas à moi sans effet,
Sans avoir exécuté ma volonté
Et accompli avec succès
Ce pour quoi je l'ai envoyée. (Ésaïe 55.8-11)

Notez comment l'auteur passe des pensées aux paroles, des pensées dans l'esprit aux paroles dans la bouche. Il commence par affirmer avec force que les pensées et les voies du Seigneur ne sont pas les mêmes que les nôtres. En fait, les pensées et les voies de Dieu sont aux nôtres ce que les cieux sont à la terre, c'est-à-dire infiniment plus élevées. Il nous est donc absolument impossible de nous élever au niveau de l'Esprit infini de Dieu. Il n'existe aucune échelle qui puisse nous permettre de monter aussi haut, aucune passerelle qui puisse nous faire franchir le gouffre entre Dieu et nous. Si Dieu avait décidé de garder le silence, nous ne saurions pas ce qu'il pense et serions totalement incapables de le deviner.

Mais les choses ne sont pas ainsi, car, selon le prophète, Dieu a résolu de parler. Il fait une deuxième référence aux cieux et à la terre. Après avoir rappelé que les cieux sont infiniment plus élevés que la terre, il souligne que la neige et la pluie franchissent la distance. Tous deux « descendent des cieux » et elles n'y retournent pas « sans avoir arrosé [ni] fécondé la terre ». Ainsi en est-il de la parole qui sort de la bouche de Dieu. Elle ne revient pas à lui « sans effet » ; au contraire, elle accomplit ses desseins. Les pensées de l'Esprit de Dieu nous sont inaccessibles à moins qu'elle nous soient communiquées par les paroles de sa bouche. A ce moment, elles deviennent efficaces en accomplissant son dessein.

Cette insistance sur les mots signifie-t-elle que les évangéliques croient en l'inspiration verbale de la Bible ? Beaucoup s'empressent de le nier. Ils établissent une distinction entre les mots et le sens, et aiment citer le grand missionnaire Henry Martyn. Interrogé par un musulman de haut rang qui voulait savoir si le missionnaire croyait en l'inspiration verbale de la Bible de la même façon que lui-même croyait en l'inspiration du Coran, Martyn répondit : « Le sens est de Dieu, mais son expression provient de ses différents auteurs. »1 A première vue, cette nuance paraît judicieuse, mais elle ne tient pas devant un examen plus attentif. On ne peut dissocier le sens d'un texte des mots qui lui donnent ce sens et le communiquent. Les mots sont les briques du discours. Il est impossible de délivrer un message précis sans construire des phrases précises faites de mots précis. Voici ce qu'écrivit Charles Kingsley au milieu du dix-neuvième siècle :

1 Cité par Bebbington, op. cit., p. 86.

Ces biens merveilleux – les mots – sont le privilège de l'homme seul... Sans les mots, nous ne saurions des pensées et des sentiments de nos semblables rien de plus que ce qu'un chien sait d'un de ses congénères... En effet, à bien réfléchir, vous pensez en mots, même si vous ne les articulez pas ; sans eux, nos pensées ne seraient que des soupirs vagues, des sentiments que nous ne comprendrions pas nous-mêmes.

Paul a attaché une grande importance aux mots. Voici ce qu'il déclare : « Et nous en parlons, non avec des discours qu'enseigne la sagesse humaine, mais avec ceux qu'enseigne l'Esprit... » (1 Corinthiens 2.13)

La révélation progressive

En croyant à la révélation divine, nous ne prétendons pas que Dieu a révélé à son peuple tout en une fois. Pas du tout, car il a enseigné ses enfants peu à peu, au fur et à mesure qu'ils étaient capables d'assimiler ce qu'il communiquait, « un peu ici, un peu là » (Ésaïe 28.13), « à plusieurs reprises et de plusieurs manières » (Hébreux 1.1). La comparaison entre l'Ancien et le Nouveau Testament prouve ce fait de façon irréfutable. Ainsi, le système cultuel des sacrifices dans l'Ancien Testament enseignait aux Israélites des vérités fondamentales, comme l'expiation par le sang (Lévitique 17.11). Mais les sacrifices d'animaux ont cessé dans le Nouveau Testament, car ils avaient trouvé leur accomplissement parfait dans le sacrifice du Christ. Des parents avisés n'enseignent pas à leurs enfants des leçons qu'ils contredisent par la suite. Au contraire, ils les étoffent. Autrement, ils se discréditent à leurs yeux.

La doctrine de la Trinité en est peut-être l'exemple le plus frappant. Elle n'est pas explicitement enseignée dans l'Ancien Testament. Certes, celui-ci l'évoque à mots couverts et par des indices. Ainsi les paroles de Dieu « Faisons l'homme à notre image » suggèrent une pluralité de Dieu. Il en est de même de la triple évocation du nom de l'Éternel dans la formule de bénédiction de Nombres 6.22ss, ou encore de la triple répétition de l'adjectif « saint » par le chœur céleste (Ésaïe 6.3 ; Apocalypse 4.8). Les chrétiens voient dans ces passages une allusion voilée à la Trinité, mais pas les Juifs. Car pour ceux-ci, l'Ancien Testament insiste principalement sur le Dieu unique, en réaction au polythéisme grossier des peuples voisins d'Israël. C'est ce que souligne le verset bien connu : « L'Éternel, notre Dieu, l'Éternel est un » (Deutéronome 6.4). Une fois bien convaincu de l'unicité de Dieu, le peuple pouvait passer à la phase suivante et recevoir la révélation que Dieu est en réalité un en trois.

Comme l'a écrit Alec Motyer, nous constatons dans l'Ancien Testament « une vraie progression dans l'accumulation » des révélations. « Il n'y a pas abandon de ce qui était avant en faveur de ce qui est venu après, du rudimentaire au profit du développé, mais un ensemble de vérités qui prend forme et grandit en maturité, et qui, à la fin de l'Ancien Testament est entièrement tendu vers son dénouement radieux. »2

2 Alec Motyer, Look to the Rock : An Old Testament Background to our Understanding of Christ, IVP, 1996, p. 182.

La révélation personnelle

Il est commode de distinguer entre la « révélation » et l'« illumination », deux ministères du Saint-Esprit. La révélation désigne un événement objectif, celui du dévoilement par le Saint-Esprit de la gloire de Dieu dans la nature ou dans l'Écriture. L'illumination décrit un événement subjectif par lequel l'Esprit dessille nos yeux pour nous rendre capables de voir ce que Dieu a révélé.

Ces deux œuvres sont indispensables pour nous faire connaître Dieu. Supposons que nous soyons invités à la cérémonie d'inauguration d'une statue et qu'un ami portant un bandeau sur les yeux nous accompagne. Avant que nous puissions admirer la statue, deux opérations sont nécessaires. Premièrement, le drap qui recouvre le monument doit être ôté. C'est ce qui correspond à l'acte objectif de la « révélation » ou du dévoilement. Mais même lorsque le voile qui couvrait la statue a été enlevé, notre ami aux yeux bandés ne peut en saisir la beauté. Il faut qu'il ôte le bandeau qu'il porte sur les yeux, ce qui correspond à l'acte subjectif de l'« illumination ».

Comme cette opération consiste à faire tomber le voile qui recouvre nos yeux ou notre intelligence, elle est souvent désignée comme « révélation ».

Jésus lui-même s'est exprimé dans ces termes. A une occasion, il a rendu grâces à son Père d'avoir caché ces vérités aux intellectuels arrogants et de les avoir « révélées aux enfants » (Matthieu 11.25), c'est-à-dire aux humbles. Une autre fois, lorsque Pierre l'eut clairement désigné comme Messie, Jésus lui dit : « Tu es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux » (Matthieu 16.17). Ce qui est vrai pour Pierre l'était aussi pour Paul. Sa conversion et sa vocation sur le chemin de Damas étaient si visiblement une initiative de la grâce divine que l'apôtre put écrire : « Mais, quand [Dieu]... a trouvé bon de révéler en moi son Fils... » (Galates 1.15-16). Ayant fait l'expérience de cette illumination céleste, il souhaitait ardemment que d'autres la connaissent également. Il pria que Dieu donne aux Éphésiens « un esprit de sagesse et de révélation » et qu'il « illumine » les yeux de leur cœur pour qu'ils comprennent la plénitude du dessin divin pour eux. (Éphésiens 1.17ss.)

Tels sont donc les quatre aspects de la révélation divine : générale et spéciale, progressive et personnelle. Les chrétiens évangéliques affirment avec force qu'il est impossible de connaître Dieu sans la révélation. Si Dieu est voilé, notre intelligence l'est aussi. Il faut que sa grâce et sa puissance interviennent pour supprimer les deux voiles. Les évangéliques déclarent également que ce que Dieu a révélé est vrai et que notre seule réaction est d'écouter, de croire et d'obéir.

Quel bonheur que Dieu ne nous ait pas abandonnés à nous-mêmes ! Nous aurions été condamnés à tâtonner dans d'épaisses ténèbres, à patauger dans des eaux profondes ou à faire appel à la philosophie humaine. Heureusement qu'il nous a donné sa Parole comme une lampe à nos pieds et une lumière sur notre sentier (Psaume 119.105), comme une « lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu'à ce que le jour commence à poindre » (2 Pierre 1.19).

L'insistance évangélique sur la vérité, révélée par Dieu et donc absolue, contraignante et universelle, n'est absolument pas compatible avec l'esprit du postmodernisme. Elle ne l'était pas non plus avec l'esprit du modernisme d'autrefois. La pensée chrétienne ne réagit pas à la culture contemporaine par un rejet systématique absolu ni par un acquiescement aveugle, mais par le discernement.

Les chrétiens évangéliques ne peuvent en aucun cas être d'accord avec le modernisme, le fruit du Siècle des lumières qui a remplacé la révélation par la raison, proclamé le compétence totale et l'autonomie de l'intelligence humaine, et glorifié la science objective comme base de sa confiance dans l'inéluctable progrès moral. Il était grand temps que cette bulle éclate, et nous pouvons être reconnaissants au postmodernisme de l'avoir percée.

Le professeur Diogenes Allen, du séminaire théologique de Princeton, a écrit avec une forte dose d'optimisme que la fin de l'âge du rationalisme rendait à nouveau « Dieu possible » et créait « une nouvelle ouverture pour la foi ». Il montre que les quatre piliers de la confiance en la Raison sont sur le point de s'écrouler. Les rationalistes déclarent :

  1. que l'univers est autosuffisant et donc Dieu superflu, alors que la philosophie et la cosmologie montrent de plus en plus la plausibilité de Dieu ;
  2. que la morale va de soi et que la révélation n'est pas nécessaire, alors que tout prouve l'impossibilité d'arriver à un consensus en faveur d'une action morale ou tout simplement d'une discussion à ce sujet ;
  3. que la science a rendu le progrès inévitable, alors qu'en réalité l'homme est incapable de résoudre les problèmes sociaux ;
  4. que la connaissance est intrinsèquement bonne, alors que l'évidence nous contraint de reconnaître que la connaissance a souvent été mise au service du mal.

Tout cela indique que « l'embargo sur l'existence possible de Dieu est levé » et que l'Évangile retrouve une nouvelle pertinence.3

3 Diogenes Allen, Christian Belief in a Post-modern World : The Full Wealth of Conviction, Westminster/John Knox Press, 1989, pp. 1-9. Plusieurs autres ouvrages publiés dans les années 1990 ont abordé la question des rapports entre l'évangélisme et le postmodernisme. Mentionnons Revisionning Evangelical Theology : A Fresh Agenda for the 21st Century, de Stanley J. Grenz, IVP, Downers Grove, 1993 ; The Post-Evangelical, de Dave Tomlison, SPCK, 1995 ; Truth is Stranger Than it Used to Be ; Biblical Faith in a Post-modern Age, de Richard Middleton et Brian J. Walsh, SPCK, 1995  et Picking up the Pieces : Can Evangelicals Adapt to Contemporary Culture ?, de David Hilborn, Hodder & Stoughton, 1997. L'ouvrage Evangelical Theology, de Millard J. Erickson, Baker, 1997, dresse un bilan équilibré, négatif et positif, des « post-conservateurs » américains.

Pourtant, parallèlement à cette nouvelle percée de la foi, le postmodernisme reste l'ennemi juré des affirmations chrétiennes relatives à la vérité absolue. Le Dr Os Guinness décrit ainsi la collision entre le postmodernisme et le modernisme :

Alors que le modernisme était un manifeste de confiance en l'homme et d'autosatisfaction, le postmodernisme est une confession d'humilité, sinon de désespoir. Il n'y a plus de vérité, mais seulement des vérités. Il n'y a plus de principes, mais seulement des préférences. Il n'y a plus de raison suprême, mais seulement des raisons... Si le postmodernisme dit juste, alors nous ne pouvons plus aspirer à la vérité, à l'objectivité, à l'universalité et à la réalité.4

4 Os Guinness, Fit Bodies, Fat Minds : Why Evangelicals Don't Think and What to Do about it, Baker, 1994, p. 105.

La foi évangélique refuse évidemment de capituler devant ce pluralisme et ce relativisme. Nous devons continuer d'affirmer avec conviction que la vérité est la vérité. Le Dr Peter Cotterel a bien vu les implications dans la mission chrétienne :

La vérité n'est pas une question d'orgueil ou d'humilité. C'est un fait. L'islam prétend que Jésus n'a pas été crucifié. Le christianisme affirme le contraire. Un seul des deux peut avoir raison. Le judaïsme déclare que Jésus n'est pas le Messie. Nous affirmons qu'il l'est. De nouveau, un seul peut dire vrai. Pour l'hindouisme, Dieu s'est souvent incarné. Pour nous, il ne s'est incarné qu'une seule fois. Nous ne pouvons pas avoir raison tous les deux.5

5 Peter Cotterel dans The London Bible College Review, 1989.

L'inspiration

Si le mot « révélation » indique que Dieu a prit l'initiative de se faire connaître, celui d'« inspiration » précise comment il a choisi de le faire, en tout cas dans la révélation spéciale : il a parlé à des auteurs humains et à travers eux. Dans ce sens, la Bible est un livre unique ; aucun autre ne lui ressemble. Elle est la Parole de Dieu à travers les paroles d'hommes. Elle bénéficie d'une double paternité littéraire : divine et humaine. C'est d'ailleurs pour cela qu'elle exige une double approche, une approche empreinte de respect parce qu'elle est Parole de Dieu, et une approche critique (que nous définirons plus loin) parce qu'elle est la parole d'êtres humains.

La double paternité littéraire de l'Écriture

Les chrétiens évangéliques sont soucieux d'éviter les deux extrêmes opposés du fondamentalisme et du libéralisme. Comme nous l'avons indiqué précédemment, les fondamentalistes (au moins ceux de la vieille école) déclarent que la Bible est la Parole de Dieu, mais ils ont tendance à cantonner les auteurs humains dans un rôle entièrement passif, leurs facultés étant court-circuitées par l'inspiration divine. Ils comparent souvent les auteurs humains de la Bible à des instruments de musique ou à des dictaphones, à des jouets inertes entre les mains de l'Esprit, et non à des personnes vivantes. A l'opposé, pour les libéraux, la Bible est essentiellement la parole d'être humains ; elle a germé dans leur esprit et a bénéficié de quelques flashes d'inspiration divine.

Aucune de ces deux conceptions n'est satisfaisante, car elles ne correspondent pas à ce que la Bible dit d'elle-même. Il existe une troisième conception, appelée double paternité littéraire de la Bible. Celle-ci est simultanément la Parole de Dieu et la parole d'hommes, la Parole divine communiquée à travers des paroles humaines. Les exemples abondent. Le même passage présente le Pentateuque comme « la Loi de Moïse » et « la Loi du Seigneur » (Luc 2.22-23). Jérémie ouvre son livre en parlant des « paroles de Jérémie » et précise peu après : « L' Éternel me dit : Voici que je mets mes paroles dans ta bouche. » (Jérémie 1.1-9) De même nous lisons dans le Nouveau Testament que « Dieu... a parlé par les prophètes » et que « des hommes ont parlé de la part de Dieu » (Hébreux 1.1 ; 2 Pierre 1.21). On peut donc à la fois dire que « la bouche de l'Éternel a parlé » et qu'il « a parlé par la bouche de ses saints prophètes » (Ésaïe 1.20 ; Actes 3.21). De quelle bouche sont sortis les oracles prophétiques ? De la bouche divine ou des bouches humaines ? La seule réponse qui convient est : des deux. Dieu a parlé de sa bouche, mais par l'intermédiaire de la bouche de certains hommes. Considérons ces deux vérités séparément.

Premièrement, la Bible est la Parole de Dieu. Dans le paragraphe consacré au Saint-Esprit, le Symbole de Nicée déclare qu'il a « parlé par les prophètes ». Ceux-ci introduisaient systématiquement leurs oracles en indiquant que la parole de l'Éternel était venue à eux. Les apôtres ont affirmé la même vérité, même s'ils n'ont pas employé les formules chères aux prophètes.

Le passage classique concernant l'œuvre de l'Esprit dans l'inspiration de l'Écriture se trouve dans 2 Timothée 3.16 : « Toute Écriture est inspirée de Dieu ». Littéralement, il faudrait dire : « “ex-spirée” par Dieu » ou « soufflée par Dieu » (theopneustos). Notons bien ceci : il n'est pas dit que Dieu a inspiré les auteurs pour les rendre capables de transcrire ses paroles, ni qu'il a inspiré après coup leurs écrits pour faire en sorte que ces paroles d'hommes deviennent paroles de Dieu, mais que ce que ces hommes ont écrit leur était « soufflé » de la bouche même de Dieu.6 Cette référence au souffle de Dieu est en accord avec d'autres mentions de la bouche et des paroles de Dieu. Quand nous parlons, le souffle fait sortir les mots de notre bouche. Bien sûr ne versons pas dans une littéralité puérile. Car étant Esprit, Dieu n'a pas de corps et par conséquent pas de bouche ni de souffle. Pourtant le discours humain constitue un modèle intelligible de l'inspiration divine, puisqu'il transforme les pensées de notre esprit en mots que le souffle fait jaillir de notre bouche. Dans ce sens-là, l'Écriture peut à juste titre être définie comme « soufflée par Dieu ».

6 Certaines versions modernes traduisent : « Toute Écriture inspirée est utile... » donnant ainsi à penser que toute Écriture n'est pas inspirée et donc pas utile. Mais (a) le concept d'Écriture non inspirée serait une contradiction en soi, et (b) l'inclusion dans l'original grec de la préposition kai (et) indique que Paul formule deux affirmations. Selon la première, l'Écriture est inspirée par Dieu ; selon la deuxième, l'Écriture est utile. L'étude de B. B. Warfield sur l'inspiration de l'Écriture n'a jamais été surpassée ni réfutée. Voir The Inspiration and Authority of the Bible, Presbyterian and Reformed, 1951, ch. 3.

Deuxièmement, la Bible est aussi des paroles d'hommes. Il est vrai que certains chrétiens célèbres ont voulu remplacer le modèle du discours humain par d'autres modèles, et ont ainsi donné l'impression que l'inspiration était un processus mécanique dans lequel les auteurs humains ne jouaient pratiquement aucun rôle. Ainsi, Tertullien a déclaré que les Écritures ont été « dictées par le Saint-Esprit » ; Athénagore d'Athènes a écrit que « le Saint-Esprit a utilisé les auteurs humains comme un flûtiste souffle dans son instrument » ; pour Augustin, les auteurs humains étaient « les plumes du Saint-Esprit », et pour Calvin, ses « amanuenses ». J. I. Packer a toutefois bien montré que ces métaphores ont été utilisées non pour définir le mécanisme de l'inspiration, car elles auraient été inadéquates, mais pour indiquer le résultat, à savoir que l'Écriture est la Parole de Dieu.7

7 J. I. Packer, « Fundamentalism » and the Word of God, IVF, 1958, pp. 81-82. Packer indique les références.

L'Écriture est un phénomène qui démontre clairement que les auteurs humains étaient actifs et non passifs dans le processus de l'inspiration. Je vais le montrer à partir de considérations historiques, littéraires et théologiques.

1. La narration historique. Près de la moitié de l'Ancien comme du Nouveau Testament, c'est-à-dire une part importante de la Bible se compose de récits historiques. Il s'agit de la plus grande partie du Pentateuque, de Josué, Juges, Ruth, des deux livres de Samuel, des Rois, des Chroniques, des livres d'Esdras, de Néhémie et d'Esther. La partie historique du Nouveau Testament comprend les Évangiles et les Actes. Nous n'imaginons pas que le Saint-Esprit a révélé l'histoire de façon surnaturelle. Les auteurs avaient accès aux documents historiques d'où ils puisaient leurs informations qu'ils intégraient parfois dans leur texte, comme ce fut le cas du décret du roi perse Cyrus, dans Esdras 1. Dans la préface de son Évangile, Luc indique à son destinataire les recherches laborieuses qu'il a entreprises. (Luc 1.1-4) Ces hommes n'étaient donc pas passifs. Le Saint-Esprit a sans aucun doute supervisé leur travail, mais cette inspiration n'a pas rendu pour autant les investigations humaines inutiles.

2. Le style littéraire. Si l'inspiration avait été un processus mécanique (le Saint-Esprit dictant le texte biblique), nous aurions pu nous attendre à une uniformité de style et de vocabulaire. Or ce n'est pas le cas, loin s'en faut. La Bible présente une extraordinaire diversité de genres littéraires (narrations, textes de lois, poésie, oracles prophétiques, psaumes, proverbes et autre littérature sapientiale, Évangiles, lettres et apocalypses), de styles littéraires (depuis le plus raffiné jusqu'au populaire et parfois même trivial), et de langages (chaque auteur ayant ses mots et expressions préférées). Ces caractéristiques littéraires n'ont pas été supprimées par l'inspiration.

3. L'insistance théologique. Cette bibliothèque de soixante-six livres que nous appelons la Bible couvre un spectre théologique très large. Certaines conceptions théologiques (notamment dans la littérature sapientiale) sont de toute évidence le fruit d'une réflexion approfondie. D'ailleurs, il est clairement dit que « l'Ecclésiate a... sondé, mis en ordre un grand nombre de proverbes » et « a tâché de trouver des paroles agréables [qui], transcrites exactement... sont des paroles véridiques. » (Ecclésiaste 12.9-10) C'est pourquoi, nous croyons que ce n'est pas un hasard si Amos fut le prophète de la justice de Dieu, Osée celui de son amour, et Ésaïe celui de sa souveraineté, et si, dans le Nouveau Testament, Paul fut l'apôtre de la grâce et de la foi, Jacques celui des œuvres, Jean celui de l'amour et Pierre celui de l'espérance. Le Saint-Esprit n'a pas davantage étouffé la personnalité individuelle des auteurs humains qu'il n'avait mis de côté leur style littéraire. Au contraire il a préparé et façonné les auteurs bibliques (tempérament, patrimoine génétique, arrière-plan culturel, formation,, éducation et expérience) de manière à pouvoir transmettre par chacun un message distinctif et approprié. Ainsi, par le drame du mariage brisé d'Osée, Dieu a fait comprendre à Israël la permanence de son amour pour lui, un amour fondé sur une alliance ; et il s'est servi de la vision globale que Luc avait en tant que païen et grand voyageur pour souligner l'universalité de l'Évangile.

Troisièmement, la Bible est à la fois la Parole de Dieu et celle des hommes. Nous devons maintenant accoler ces deux paternités littéraires, la divine et l'humaine, en insistant sur chacune sans contredire l'autre.

D'un côté, la Bible est la Parole de Dieu. En effet, Dieu a parlé par des auteurs humains de façon propre à dire ce qu'il avait l'intention de communiquer, mais sans faire violence à la personnalité des auteurs humains et encore moins la réprimer.

De l'autre côté, la Bible est la parole d'hommes. Car « des hommes ont parlé de la part de Dieu » en se servant librement de leurs facultés, sans pour autant altérer, et encore moins détruire le message de l'auteur divin.

Dieu a exprimé ses mots à travers les leurs de telle sorte que leurs mots étaient simultanément les siens. Il en résulte que ce qu'ils disent est bien ce que Dieu dit.

Nous n'avons pas le droit de déclarer cette combinaison impossible. Car le prétendre serait, comme l'indique clairement James Packer,

... une fausse doctrine de Dieu, et surtout de sa providence. Cette déclaration supposerait en effet que Dieu et l'homme entretiendraient entre eux une relation telle qu'ils ne pourraient pas être tous deux des agents libres dans la même action. Si l'homme agit librement (c'est-à-dire volontairement et spontanément), Dieu ne le pourrait pas, et vice versa. Les deux libertés seraient mutuellement exclusives. En réalité, cette idée se rapproche davantage du déisme que du théisme chrétien.8

8 Ibid., p. 81.

« Le remède à ce raisonnement fallacieux, poursuit Packer, se trouve dans l'idée biblique de l'opération concomitante de Dieu dans, avec et par la libre action de l'esprit de l'homme. »9

8 Ibid., p. 82.

Pour clarifier cette notion, différents auteurs anciens et récents, catholiques et protestants, ont proposé une analogie entre la double paternité littéraire de la Bible et les deux natures du Christ. Certes, aucune analogie n'est parfaite, et il est toujours dangereux de raisonner à partir d'une analogie. Dans ce cas, l'imperfection de l'image est évidente, car la Bible n'a pas, comme Jésus-Christ, une divinité intrinsèque. Cependant, dans le Christ comme dans l'Écriture, il y a une telle combinaison du divin et de l'humain que nous devons affirmer chacun sans nier l'autre. Nous devons sauvegarder chacun des deux aspects sans en sacrifier aucun.

Oui, Jésus est à la fois Dieu et homme. Ne soulignons jamais sa divinité d'une manière qui porte ombrage à la réalité de son humanité, et ne montons jamais son humanité en épingle au risque de minimiser sa divinité. Il en est un peu de même pour la Bible. Elle a à la fois une origine divine et une origine humaine. Veillons donc à ne pas insister exagérément sur son origine divine au point de nier la liberté d'action des auteurs humains, et à ne pas valoriser le rôle libre et actif de ceux-ci au point de nier le fait que Dieu a placé sa parole dans leur bouche.

L'affirmation « Jésus est le Fils de Dieu » est vraie, mais elle n'est qu'une demi-vérité dangereuse. Elle est sans doute à l'origine du docétisme, une hérésie selon laquelle Dieu n'était apparu qu'en apparence d'homme. C'est pourquoi nous devons nous empresser d'ajouter que Jésus est aussi le Fils de l'homme.

L'affirmation « La Bible est la Parole de Dieu » est vraie, mais elle n'est, elle aussi, qu'une dangereuse demi-vérité. Elle peut conduire à l'hérésie du fondamentalisme, qui prétend que Dieu a dicté de façon purement mécanique ; c'est pourquoi nous devons aussi ajouter avec empressement que la Bible est la Parole de Dieu à travers les paroles d'hommes.

Elle est autant la Parole de Dieu que la parole d'hommes. C'est en cela que réside sa double origine littéraire.

Deux façons d'aborder l'Écriture

Cette double paternité exige une double approche. Étant donné la nature très particulière du livre qu'est la Bible, nous devons l'aborder de deux façons distinctes et complémentaires. Parce qu'elle est la Parole de Dieu, nous devons la lire comme aucun autre livre : à genoux, dans une attitude mentale d'humilité, de révérence, de prière et de soumission. Mais comme elle est aussi la parole d'hommes, nous devons la lire comme tout autre livre, d'une manière réfléchie et avec un esprit critique. Puisque nous autres évangéliques avons tendance à négliger ce dernier aspect, je vais l'examiner en premier.

L'approche critique de l'Écriture

La simple mention de l'expression « critique biblique » est propre à glacer d'effroi n'importe quel évangélique. Deux raisons expliquent cette réaction ; elles doivent être exorcisées.

Le mot « critique » est souvent mal compris. Les gens pensent que les adversaires de la Bible la critiquent en portant systématiquement sur elle des jugements négatifs, voire destructeurs. Le vocable « critique » n'a pas ce seul sens. Ainsi, un critique littéraire n'est pas une personne qui critique la littérature et trouve à redire à tout ce qu'elle lit, mais un savant qui passe en revue des ouvrages et juge leur valeur. Il en est de même d'un critique d'art ou de théâtre. Le critique biblique n'est pas forcément quelqu'un qui cherche à discréditer les documents bibliques, mais un érudit qui les examine sous différents angles et porte un jugement de valeur sur eux. Dans ces exemple, la « critique » n'est pas synonyme de destruction, mais d'investigation, pas synonyme de jugement mais d'évaluation.

Notre méfiance d'évangéliques à l'égard de la critique biblique tient aussi au fait que les premiers critiques, il y a environ 250 ans, étaient des intellectuels extrêmement sceptiques, le produit de ce que l'on a appelé l'« âge de la Raison » ou le « Siècle des lumières ». Ces rationalistes adoptaient une approche incrédule à l'égard de l'Écriture et en tiraient des conclusions systématiquement destructrices. L'un des premiers et des plus virulents pourfendeurs de la Bible fut Herrmann Reimarus, un déiste du dix-huitième siècle, professeur de langues orientales à l'université de Hambourg. Il rejetait catégoriquement l'idée de révélation, les miracles, la divinité de Jésus, sa mort expiatoire et sa résurrection. Il attira aussi l'attention, presque avec jubilation, sur les désaccords qu'il croyait avoir relevés entre les différents récits de la résurrection. Lui et d'autres avec lui ont conféré au mot critique son sens péjoratif.

Tout comme la « critique » ne signifie pas systématiquement « jugement », ceux qui s'y adonnent, c'est-à-dire les critiques bibliques ne sont pas forcément des incroyants. Plusieurs sont même des croyants très pieux et très respectueux. Pour simplifier à l'extrême ce sujet compliqué, disons qu'il existe quatre domaines principaux de critique biblique. La première est la critique textuelle qui a pour noble objectif d'établir le texte authentique de l'Écriture. La deuxième est la critique historique : elle s'intéresse à l'étude des circonstances historiques qui ont entouré la composition des livres bibliques et à l'évaluation de l'élément historique dans le texte lui-même. Troisièmement, la critique littéraire examine à la fois les sources que l'auteur biblique avait à sa disposition, et les formes dans lesquelles le matériau oral fut préservé et accessible. La quatrième, la critique rédactionnelle est précieuse car elle reconnaît que les auteurs et les éditeurs (rédacteurs) bibliques avaient une motivation théologique sous-jacente à leurs écrits. En nous appuyant sur ces outils critiques dans notre étude, nous admettons les dimensions humaines (littéraire, historique et théologique) du texte biblique.

Dans les quatre domaines de la critique biblique, la question la plus importante concerne les présuppositions avec lesquelles le critique aborde le texte : sont-elles chrétiennes ou non ? La réponse à cette question conditionne dans une grande mesure les conclusions du critique. Les présuppositions non chrétiennes les plus fréquentes, qui ont d'ailleurs abouti à des conditions désastreuses, sont les suivantes :

  1. L'histoire se déroule dans un continuum clos de cause à effet, sans aucune possibilité d'intervention divine ou de prophétie.
  2. L'univers est un système autosuffisant dans lequel les miracles sont impossibles.
  3. La religion est un phénomène humain qui a évolué au cours des siècles. Partie d'un animisme primitif, elle a évolué vers le monothéisme en passant par le polythéisme. Il n'est absolument pas question d'une révélation.

Ces présuppositions sont totalement étrangères au christianisme. Elle reflètent un scepticisme effréné incompatible avec la foi biblique. Ceux qui s'y accrochent entrent en permanence en conflit avec la Bible et avec sa vision très différente de l'histoire, de la cosmologie et de la religion.

L'approche déférente de l'Écriture

Après l'approche critique de l'Écriture, passons à l'approche respectueuse. Loin de s'exclure et de se contredire, elles se complètent. Dans la première, nous passons les Écritures au peigne fin, tandis que dans la seconde, nous demandons à l'Écriture de nous examiner attentivement.

Parce que nous croyons que l'Écriture est « la Parole de Dieu écrite », elle ne ressemble à aucun autre livre. C'est pourquoi nous l'abordons différemment de tout autre livre. Nous nous agenouillons – non parce que nous adorerions la Bible, mais parce que nous adorons le Dieu de la Bible et que nous voulons nous humilier devant lui. Nous nous rappelons les paroles de Jésus selon lesquelles Dieu s'est volontairement caché à certaines personnes (les orgueilleux), alors qu'il s'est révélé aux enfants, autrement dit à ceux qui s'approchent humblement de lui. (Matthieu 11.25) Ainsi donc, comme Marie de Béthanie, nous nous asseyons aux pieds du Maître pour écouter ses paroles. (Luc 10.39) Comme le jeune garçon Samuel, nous lui disons : « Parle, car ton serviteur écoute » (1 Samuel 3.10) Nous supplions le Saint-Esprit, divin auteur du livre, d'en être également l'interprète et d'illuminer notre intelligence obscurcie. Nous demandons à Dieu de traverser nos systèmes de défense et de nous rendre capables d'entendre non l'écho apaisant de nos propres préjugés culturels, mais le coup de tonnerre de sa Parole. A vrai dire, je crains que cette humilité risquée devant le Dieu vivant fasse tragiquement défaut chez de nombreux critiques bibliques, et même chez certains prédicateurs évangéliques.

Tout comme une compréhension juste et équilibrée de l'Écriture requiert que nous prenions en considération ses dimensions divine et humaine et la considérions comme la Parole de Dieu à travers des auteurs humains, une approche correcte et équilibrée de l'Écriture exige que nous combinions la critique et la déférence, et que nous en fassions une étude sérieuse dans un esprit de prière. Pour conclure cette section, j'évoque deux exemples, l'un de l'Ancien Testament, l'autre du Nouveau.

Lorsque, sur les bords du Tigre, Daniel eut une vision, l'être divin et humain à la fois qui apparut lui dit : « Daniel, soit sans crainte ; car dès le premier jour où tu as eu à cœur de comprendre et de t'humilier devant ton Dieu, tes paroles ont été entendues, et c'est à cause de tes paroles que je suis venu. » (Daniel 10.12)

De même, dans son souci que Timothée comprenne bien et suive les instructions qu'il lui donnait, Paul l'exhorta à combiner sa propre réflexion avec une dépendance du Seigneur pour être illuminé, autrement dit à associer étude et prière. « Comprends ce que je dis ; car le Seigneur te donnera l'intelligence en tout. » (2 Timothée 2.7)

L'autorité

Si le mot « révélation » souligne l'initiative de Dieu pour se faire connaître et le mot « inspiration » le moyen employé, le mot « autorité » indique le résultat. Parce que l'Écriture est la révélation de Dieu par l'inspiration de l'Esprit, elle a autorité sur nous.

Mais notre époque déteste l'autorité. Nous sommes en quête de liberté et partout on nous ressasse (à tort) que toute forme d'autorité va à l'encontre de notre recherche, et même qu'autorité et liberté sont incompatibles. Depuis les années 1960, marquées par l'apparition du mouvement de la libre parole à l'université de Californie, à Berkeley, et la construction de barricades par les étudiants dans les rues de Paris, on assiste à une forte contestation de l'autorité. Ceux qui détiennent le pouvoir et les institutions établies sont remis en question. Le « radical » est justement celui qui refuse de se soumettre simplement parce que l'ordre lui vient d'en-haut ou qu'il s'appuie sur le passé.

Cette révolte contre l'autorité partout dans le monde s'est accompagnée d'une perte d'autorité dans l'Église. Songez à la multiplicité des dénominations protestantes, et à notre tendance au morcellement indéfini ; aux factions rivales dans les anciennes Églises d'Orient et d'Occident, alors que des fissures apparaissent dans ces puissances monolithes ; aux controverses au sein et à propos du Conseil Œcuménique des Églises dont la doctrine est juste mais nettement insuffisante ; et au spectacle désolant qu'offrent sur le petit écran des responsables d'églises qui ne savent pas ce qu'ils croient, et lorsqu'ils le savent, ne sont pas moins en désaccord les uns avec les autres. Nous nageons en pleine confusion théologique, et sommes plongés dans le chaos. La cause essentielle de cet état est le manque de volonté pour se mettre d'accord. La question d'autorité est au cœur de cette situation.

En théorie, tous les chrétiens confessent que « Jésus-Christ est Seigneur » (Voir par exemple Philippiens 2.9-11), car après sa résurrection, le Seigneur a solennellement affirmé que tout pouvoir lui avait été donné « dans le ciel et sur la terre » (Matthieu 28.18). Tout le Nouveau Testament considère comme un fait acquis que l'Église est sous l'autorité du Seigneur Jésus ressuscité. Charles Lamb, l'essayiste britannique du dix-neuvième siècle aurait déclaré : « Si Shakespeare entrait dans cette pièce, nous nous lèverions pour le saluer respectueusement ; mais si Jésus devait entrer, nous tomberions sur notre face et chercherions a embrasser la frange de son vêtement. »

Pour ma part, je pense que nous ferions davantage que baiser sa tunique ; avec Thomas, nous confesserions : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Si Jésus-Christ apparaissait de façon tellement visible que personne ne songerait à mettre son identité en doute, et s'il parlait de manière tellement claire et audible que le sens de ses paroles n'échapperait à personne, il est logique de penser que l'Église écouterait, croirait et obéirait. Mais Jésus-Christ ne se présente pas de cette façon et ne s'adresse pas ainsi à son Église, en tout cas pas avant son retour, et alors il sera trop tard.

Comment donc le Seigneur Jésus exerce-t-il son autorité et gouverne-t-il son Église aujourd'hui ? Quatre réponses ont été proposées à cette question.

1. Pour le catholique romain, le Christ gouverne son Église par l'intermédiaire du magistère, l'autorité magistrale conférée au pape et au collège des évêques actuels, et par l'intermédiaire de la tradition passée. Les églises orthodoxes insistent elles aussi sur la tradition élaborée par les sept premiers conciles œcuméniques.

2. Le libéral estime que le Christ dirige son Église par la raison et la conscience individuelles, éclairées par le Saint-Esprit, ou par le consensus d'une opinion évoluée. Il ajoute parfois l'expérience à la raison, désirant ainsi associer le rationnel à l'émotionnel ; les chrétiens pentecôtistes et charismatiques confèrent un réel poids à l'expérience.

3. Pour l'anglican moyen, le Christ gouverne son Église par la « corde à trois brins », à savoir l'Écriture, la tradition et la raison. Autrement dit, l'autorité est dispersée et non centralisée. Cette conception est typique du caractère « modérement raisonnable » d'un anglicanisme qui évite de se polariser et choisit de préférence la via media, le juste milieu. Pourtant, dans la pratique, la corde à trois bruns ne fonctionne pas dans ce cas. En effet, que se passe-t-il lorsque les trois autorités sont en conflit les unes avec les autres ? Il faut que l'Écriture prenne le dessus. Dans le livre Law of Ecclesiastical Polity (1593-97), auquel se réfèrent souvent les dirigeants anglicans, Richard Hooker n'enseigne pas que l'Écriture, la tradition et la raison détiennent une autorité légale. Voici ce qu'il écrit :

L'Écriture enseigne clairement que c'est avant tout à elle que sont dues confiance et obéissance ; l'homme peut ensuite se servir de la force de sa raison pour tirer des conclusions ; après elles, il peut enfin écouter la voix de l'Église.10

10 Richard Hooker, Laws of Ecclesiastical Polity, 1593-1597, Livre V.8.11.

4. Pour l'évangélique, le Christ gouverne son Église par le moyen de l'Écriture. Celle-ci constitue le sceptre du Roi Jésus. La tradition est certes importante, car elle nous fait connaître l'enseignement des premiers conciles et les premières confessions de foi. Nous évangéliques, devrions cultiver un respect plus profond pour la tradition, puisqu'elle correspond à la manière dont l'Église, éclairée par l'Esprit, a interprété l'Écriture au fil des siècles. Il est bien évident que toute tradition n'est pas l'interprétation correcte de l'Écriture. Mais en l'ignorant, nous faisons croire que le Saint-Esprit a commencé son ministère d'enseignement, voire qu'il ne s'est manifesté que lorsque nous sommes apparus dans l'Histoire ! N'oublions cependant pas que Jésus a subordonné la tradition à l'Écriture, appelant la première « la tradition des hommes » et la seconde « la parole de Dieu » (Marc 7.1-13). Faisons de même en assignant une place secondaire à la tradition, même à la tradition des anciens évangéliques.

La raison et l'expérience tiennent également une place importante, car Dieu a fait de nous des créatures douées de raison et de sentiments. La raison ne doit toutefois pas juger l'Écriture, mais s'asseoir humblement à ses pieds en cherchant à la comprendre et à l'appliquer. Quant à l'expérience d'un cœur brûlant, elle est un des moyens par lequel le Saint-Esprit atteste la vérité de sa Parole. (Luc 24.32)

Ces quatre groupes (catholiques romains, libéraux, anglicans et évangéliques) s'approprient tous une promesse particulière du Christ. Effectivement, le Seigneur a déclaré que lorsque le Saint-Esprit, l'Esprit de vérité, sera venu, « il vous conduira dans toute la vérité » (Jean 16.12-13). Les catholiques romains appliquent cette promesse à leur évêques qu'ils croient être les successeurs des apôtres. Les libéraux expliquent que l'Esprit conduit l'individu ou l'Église contemporaine dans la vérité. Frank Griswold, évêque et président de l'Église épiscopale américaine, a fait récemment une déclaration impudente à cet égard. Il reconnaît que l'Église épiscopale va au-delà de l'Écriture. Il justifie cette attitude comme étant la « vérité » dans laquelle le Saint-Esprit conduit l'Église. C. E. Bennison, évêque de Pennsylvanie, va encore plus loin. « Puisque nous avons écrit la Bible, déclare-t-il avec une certaine assurance, nous pouvons la réécrire. » Non, nous n'avons pas écrit la Bible. Dans les épîtres du Nouveau Testament, l'Église n'écrivait pas en son propre nom. C'étaient les apôtres qui, au nom du Christ, s'adressaient à l'Église.

Revenons à la promesse du Christ selon laquelle l'Esprit de vérité « vous » conduira dans toute la vérité. Qui ce « vous » désigne-t-il ? Il s'agit d'une question herméneutique cruciale. J'ai l'audace de prétendre que les catholiques et les libéraux sont dans l'erreur, car le « vous » ne peut s'appliquer à eux. Ce pronom personnel désigne les apôtres. Examinons le contexte immédiat : « J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les comprendre maintenant. Quand il sera venu, lui, l'Esprit de vérité, il vous conduira dans toute la vérité... et vous annoncera les choses à venir. » (Jean 16.12-13) Les deux premiers « vous » désignent indubitablement les apôtres qui s'étaient montrés incapables d'assimiler tout ce que le Christ leur avait enseigné au cours de son ministère terrestre. Il est donc logique que les deux autres « vous » de ce passage s'appliquent également à eux. Nous n'avons pas le droit de changer l'identité de ce pronom personnel au milieu d'une phrase. Jésus a donc promis que l'Esprit de vérité accomplirait après la Pentecôte, ce que lui-même s'était refusé de faire pendant son ministère public. Cette promesse s'est réalisée par la rédaction du Nouveau Testament.

Si, tout au long de son histoire, l'Église s'est soumise à l'Écriture et si les évangéliques continuent de le faire, c'est parce que le Seigneur Jésus a donné l'exemple. L'autorité du Christ et celle de l'Écriture vont de pair. L'Église ne peut s'arroger la liberté de démentir ce que son Seigneur a soutenu.

Il est vrai que Jésus a vécu à la période qui sépare les deux Testaments. Il s'appuyait sur l'Ancien, déjà complet, et tendait vers le Nouveau, encore en gestation. C'est pourquoi, il a adopté une attitude différente vis-à-vis de chacun d'eux. Il a confirmé l'autorité de l'Ancien Testament en s'y soumettant. Il a obéi aux commandements moraux, il a fait face à la tentation par un vigoureux gegraptai gar, « il est écrit » ; il a accepté l'enseignement vétérotestamentaire à propos de sa messianité en tant que Fils de l'homme et Serviteur du Seigneur (« Le Fils de l'homme doit souffrir... ») ; dans ses discussions publiques avec les pharisiens et les sadducéens, il a fait de l'Écriture la référence suprême (« Vous êtes dans l'erreur, parce que vous ne comprenez ni les Écritures, ni la puissance de Dieu »). Sa propre attitude d'humble soumission à l'Écriture est irrécusable ; il serait pour le moins étrange que ses disciples adoptent une opinion moins élevée que la sienne à l'égard de la Parole de Dieu.11

11 Remarquons que dans les six antithèses du Sermon sur la Montagne « vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens, mais moi, je vous dis... », Jésus n'oppose pas ce qui a été « écrit » (l'Écriture), mais ce qui a été « dit » (la tradition orale).

Pour ce qui est de l'autorité du Nouveau Testament, le problème se pose un peu différemment. Jésus n'a pas seulement prévu la formation du Nouveau Testament parallèlement à l'Ancien, mais il lui a fixé le même objectif, à savoir raconter et interpréter ce que Dieu accomplissait. C'est pourquoi Jésus a choisi et formé douze apôtres. Ces hommes étaient uniques sous trois rapports. Ils ont été personnellement appelés par Jésus, ils ont été ses témoins oculaires (Paul leur a été adjoint en tant que témoin de sa résurrection) et ont été inspirés de façon surnaturelle par le Saint-Esprit. Par conséquent ils parlaient et écrivaient au nom du Christ, pleinement convaincus d'être revêtus de son autorité. Paul loue même les Galates qui avaient été prêts à le recevoir « comme un ange de Dieu, comme le Christ-Jésus » (Galates 4.14). Je suis reconnaissant aux évêques anglicans réunis à la conférence de Lambeth en 1958 d'avoir écrit que les livres du Nouveau Testament « étaient reconnus comme le témoignage rendu par les apôtres à la vie, l'enseignement, la mort et la résurrection du Seigneur et comme leur interprétation de ces événements. L'Église doit se plier devant cette autorité apostolique. »12

12 La Conférence de Lambeth de 1958, SPCK, partie 2, p. 5.

Le Seigneur Jésus-Christ a donc systématiquement souligné l'autorité de l'Ancien Testament en s'y référant et en s'y soumettant. Il a également veillé à la formation du Nouveau Testament en choisissant ses apôtres et en les qualifiant pour cette tâche. Ainsi, bien que de manières différentes, l'Ancien et le Nouveau Testaments portent le sceau de son autorité. Si donc nous voulons nous soumettre à l'autorité du Christ, nous devons nous soumettre à celle de l'Écriture, car l'autorité de l'Écriture est indissociable de celle de Jésus-Christ.

Trois autres vocables

Dans notre compréhension de l'Écriture, nous nous sommes arrêtés jusqu'ici sur la portée des trois mots « révélation », « inspiration » et « autorité », en ajoutant implicitement à ce dernier l'adjectif « suprême » pour indiquer que l'autorité de l'Écriture surpasse les autorités moindres comme la tradition, la raison et l'expérience. Pour être complets, nous devons encore examiner trois autres termes qui appartiennent à la conception évangélique de la Bible.

La clarté

C'est une notion sur laquelle les Réformateurs ont beaucoup insisté. Ils entendaient par là que la Bible avait la vertu de la clarté ou de la transparence. Ils ne voulaient certainement pas dire par là que tout le contenu de la Bible est clair. Comment auraient-ils pu affirmer pareille chose, alors que l'eunuque éthiopien reconnaissait son besoin d'un guide pour lui expliquer les Écritures et que Pierre avouait que les lettres de Paul contenaient « des passages difficiles à comprendre » ? (Actes 8.31 ; 2 Pierre 3.16) Si un apôtre reconnaissait ne pas toujours comprendre un autre apôtre, nous ne ferions certainement pas preuve de modestie en déclarant que nous le pouvons ! Les Réformateurs disaient simplement que l'essence du message biblique, la voie du salut par grâce au moyen de la foi est assez simple pour être à la portée des gens sans grande instruction. C'est aussi ce qui les a incités à mettre une Bible en langue vernaculaire entre les mains de tout le monde. La Confession de Westminster (1643-46) définit bien la clarté de l'Écriture :

Tout dans l'Écriture n'est pas également évident, ni également clair pour tous. Cependant, ce qu'il faut nécessairement connaître, croire et observer en vue du salut est si clairement exposé et révélé dans tel ou tel autre passage de l'Écriture que l'ignorant, et pas seulement l'homme cultivé, peut, sans difficulté, en acquérir une compréhension suffisante (I.7).

Pleine suffisance

La suffisance de l'Écriture (sola Scriptura) était un autre thème important des Réformateurs. Ils n'entendaient pas par là que l'Écriture était suffisante en matière d'instruction, mais suffisante en matière de salut. Ils ne prétendaient certainement pas que les chrétiens ne devaient lire que la Bible. Après l'invention de l'imprimerie, ils encouragèrent le peuple à s'instruire lui-même, à lire d'autres ouvrages et à se doter d'une culture aussi vaste que possible. Mais en ce qui concerne le salut, un seul livre est nécessaire. La suffisance de l'Écriture est directement liée à la suffisance du Christ à qui elle rend témoignage.

L'article VI de la confession anglicane résume bien cette doctrine :

L'Écriture sainte contient tout ce qui est nécessaire au salut, si bien que ce qui ne s'y trouve pas ou ne peut être prouvé par elle ne doit être imposé à qui que ce soit comme un article de foi ou présenté comme une condition préalable ou nécessaire au salut.

Cet article a été écrit en pensant à l'Église de Rome, car elle exigeait (et exige toujours) de ses membres l'acceptation de certaines traditions qui n'ont aucun fondement biblique.

Actuellement, le danger viendrait de certains responsables d'églises pentecôtistes et charismatiques qui affirment qu'aujourd'hui Dieu donne à nouveau à son Église des apôtres et des prophètes dont l'enseignement vient compléter celui de l'Écriture. Tous les évangéliques sont d'accord pour reconnaître qu'il existe aujourd'hui des ministères apostoliques (exercés par exemple par des missionnaires pionniers, des fondateurs d'églises, des responsables d'églises dont des évêques) et des ministères prophétiques (des chrétiens qui possèdent une sagesse divine particulière pour répondre à des besoins spécifiques). Mais les évangéliques sont également d'accord pour affirmer qu'il n'existe aujourd'hui aucun apôtre ni prophète qui soit revêtu de la même autorité que ceux d'autrefois dont les enseignements constituent les fondations de l'Église. (Éphésiens 2.20) Si c'était le cas, leur enseignement devrait être ajouté à l'Écriture, ce qui réduirait à néant le principe de sa pleine suffisance.

L'inerrance

L'inerrance de l'Écriture est un autre mot qui appelle un éclaircissement. Depuis la publication, en 1976, du livre Battle for the Bible, du Dr Harold Lindsell, le combat des évangéliques américains s'est surtout focalisé sur le mot « inerrance », tout comme les Britanniques avaient beaucoup discuté du mot « infaillibilité ».

Cinq raison liées à ce mot « inerrance » me mettent mal à l'aise.

Premièrement, la révélation de Dieu dans l'Écriture est si riche, à la fois dans sa forme et dans son fond, qu'elle ne peut se réduire à un ensemble de propositions sur lesquelles nous mettrions l'étiquette « vérité » ou « erreur ». La question « vrai ou faux ? » ne peut s'appliquer à une grande partie de l'Écriture.

Deuxièmement, le mot « inerrance » est formé d'une double négation. Personnellement, je préfère une simple affirmation qu'une double négation. Il vaut mieux affirmer que la Bible est vraie et donc fiable. Dans ses conférences, J. I. Packer déclare que les défenseurs de l'inerrance biblique cherchent essentiellement à prouver « la totale fiabilité de l'Écriture comme conséquence de son entière véracité ».13 Les évangéliques ne peuvent qu'approuver sans réserve.

13 Alister McGrath, To Know and Serve God : A Biography of J. I. Packer, Hodder & Stoughton, 1997, pp. 201-202.

Troisièmement, le mot « inerrance » émet des signaux faux et provoque des réactions fausses. Au lieu de nous encourager à sonder les Écritures pour que nous croissions dans la grâce et la connaissance de Dieu, ce mot inspire en nous une attitude de détectives lancés à la recherche de pièces à conviction et nous campe dans une attitude excessivement défensive devant tout ce qui a l'apparence de contradictions.

Quatrièmement, il n'est ni sage ni juste de faire du mot « inerrance » un nouveau « Chibboleth » pour savoir qui est évangélique et qui ne l'est pas. La marque de l'évangélisme authentique n'est pas l'adhésion, mais la soumission. Je m'explique. Le vrai évangélique n'est pas celui qui souscrit à une formule irréprochable au sujet de la Bible, mais celui qui se soumet concrètement à l'enseignement de la Bible et qui décide d'avance de le faire aussi pour tout ce qu'elle pourra lui enseigner plus tard.

Cinquièmement, il est impossible de prouver que la Bible ne contient aucune erreur. En présence d'une contradiction apparente, en général les chrétiens ne la nient pas, ne rejettent pas la Bible pour autant, ne cherchent pas à harmoniser les récits en cause coûte que coûte, mais préfèrent attendre de nouvelles lumières. Un bon nombre de prétendues contradictions ont ainsi été résolues.

En 1989, 650 responsables évangéliques américains se sont rassemblés pour une délibération sur les « Affirmations évangéliques », sous l'égide de la National Association of Evangelicals et de Trinity Evangelical Divinity School. Il rédigèrent à cette occasion un document complet de qualité. Voici ce qui y est dit à propos de la Bible :

Nous affirmons l'entière véracité et l'autorité pleine et ultime des Écritures de l'Ancien et du Nouveau Testament en tant que Parole de Dieu écrite. Devant elle, la seule attitude qui convient est celle de l'acquiescement et de l'obéissance humbles.

Dans leur conclusion, les responsables évangéliques écrivirent :

Les évangéliques considèrent la Bible comme la Parole de Dieu, et par conséquent comme entièrement vraie et digne de confiance (c'est ce que nous entendons par les mots infaillible et inerrante).14

14 Kenneth S. Kantzer et Carl F. H. Henry, Evangelical Affirmation, Academie Books, Zondervan, 1990, pp. 32, 38.

Deux précisions

Lorsque les évangéliques affirment que l'Écriture est la Parole de Dieu, ils le font à deux conditions précises. Premièrement, ils sous-entendent l'Écriture dans ses documents originaux. Ainsi, dans sa Confession de foi, l'International Fellowship of Evangelical Students (IFES) qui regroupe les Groupes Bibliques Universitaires (GBU) de nombreux pays, déclare que l'Écriture est inspirée « dans les originaux ». Nous ne reconnaissons aucune autorité à un texte particulier ou à une traduction biblique, mais seulement au texte original tel qu'il a été rédigé par son auteur. Nos adversaires ne peuvent alors s'empêcher de rire et de nous railler, car tous les autographes bibliques ont été perdus. Quel est l'intérêt, demandent-ils, de conférer une autorité à un texte qui n'existe pas ? Mais les évangéliques sont prêts à affronter les moqueries des sceptiques, car le principe énoncé est vital. Nous savons que les manuscrits hébreux et grecs qui nous sont parvenus, y compris les remarquables codex du quatrième siècle comportent des erreurs de copistes. Nous n'attribuons certainement pas leurs fautes à l'inspiration divine ! Au contraire, comme nous l'avons déjà souligné, les évangéliques sont très attachés à la science de la critique textuelle qui compare les manuscrits, les versions (traductions) et les citations faites par les Pères de l'Église dans le but de reconstituer le texte original. C'est l'une des responsabilités primordiales de l'Église.

Deuxièmement, ils pensent à l'Écriture correctement interprétée. De même que nous refusons de reconnaître l'autorité divine sur les erreurs de copistes, nous le refusons aussi sur les erreurs des interprètes. En cherchant à découvrir la véritable interprétation d'un texte, le principe le plus important à observer concerne l'intention de son auteur : « un texte signifie ce que son auteur pensait ».15

15 E. D. Hirsch, Validity in Interpretation, Yale University Press, 1967, p. 1.

C'est pourquoi, « refuser à l'auteur original le droit d'en fixer le sens » c'est « rejeter le seul principe normatif capable de conférer une validité à une interprétation ».16 A la conception évangélique s'oppose celle des postmodernistes qui s'affairent à « déconstruire » les textes, c'est-à-dire à les arracher à leurs auteurs pour que les lecteurs puissent y trouver le sens qu'ils veulent.

16 Op. cit., p. 5.

Les évangéliques ne doivent pas baisser pavillon devant ce « déconstructionisme » nouveau et désastreux. Nous préférons la déclaration de Lausanne qui décrit l'Écriture comme « exempte d'erreurs dans tout ce qu'elle affirme ».17 Cette précision est essentielle. Tout comme les mots « dans les textes originaux » nous obligent à avoir recours à la science de la critique textuelle, les mots « dans tout ce qu'elle affirme » et « correctement interprétée » nous obligent à faire appel à la science de l'herméneutique. Deux exemples vont illustrer mon propos.

17 John Stott, Making Christ Known : Historic Mission Documents from the Lausanne Movement 1974-1989, Paternoster, 1997, pp. 13-14. La déclaration de Chicago sur l'inerrance biblique (1978) développe une clause de la déclaration de Lausanne disant que l'Écriture « doit être acceptée comme instruction de Dieu dans tout ce qu'elle affirme, obéie comme commandement de Dieu dans tout ce qu'elle exige, et reçue comme gage de Dieu dans tout ce qu'elle promet. »

Premièrement, nous ne devons pas penser que tous les personnages de l'Ancien Testament sont de bons exemples à imiter, car plusieurs sont présentés comme de mauvais exemples à éviter. (Voir 1 Corinthiens 10.1-11) Dans certains passages, il nous est clairement dit si le récit rapporté est un « avertissement » (1 Corinthiens 10.11) ou un « encouragement » (Romains 15.4). Parfois le récit n'est accompagné d'aucun jugement moral, et nous en sommes invités à nous en faire une opinion personnelle à la lumière du reste de l'Écriture. D'autres récits encore, notamment ceux de la période sombre des Juges, présentent des personnages bons et mauvais à la fois. Ainsi, Samson et Jephté figurent dans la galerie des héros de la foi (Hébreux 11.32), car ils se montrent loyaux à Yahweh au milieu d'un peuple qui offrait des sacrifices à Baal. Mais leur conduite était parfois déplorable. Samson s'est conduit comme un adolescent gâté, un grand gamin dépourvu de contrôle de soi. Quant à Jephté, malgré le vœu qu'il a fait, il n'aurait jamais dû sacrifier sa fille car les sacrifices humains étaient l'une des pires atrocités pour lesquelles le pays, selon la parole de Dieu, « vomirait ses habitants ». Bien que l'auteur ne condamne pas la morale de son temps, il laisse néanmoins clairement entendre qu'il la réprouvait, ce que souligne son refrain répété plusieurs fois : « En ce temps-là, il n'y avait point de roi en Israël. Chacun faisait ce qui lui semblait bon. » (Juges 17.6 ; 21.25 ; cf. 18.1 et 19.1)

L'autre exemple a trait aux Évangiles. Ne leur collons pas nos normes de précision informatique et n'attendons pas qu'ils s'y conforment. Prenons le cas de la chronologie. Matthieu et Marc situent la visite de Jésus à Nazareth, ainsi que son sermon dans la synagogue et son rejet par la population vers le milieu de son ministère public. Luc place cet événement tout au début, immédiatement après le baptême et la triple tentation. (Luc 4.14ss) Nous aurions cependant tort d'accuser Luc de s'être fourvoyé. A l'évidence, il considère l'incident survenu à Nazareth comme une préfiguration du ministère et du rejet de Jésus. Il l'inscrit donc en exergue au début de son Évangile, et il établit sa chronologie de la vie de Jésus sous un angle théologique. Permettons à chaque auteur biblique d'exposer les points forts de sa théologie et les principes littéraires qu'il décide de suivre.

Telles étaient donc les deux précisions indispensables. Lorsque nous affirmons notre foi en l'entière véracité et fiabilité de l'Écriture, nous sous-entendons l'Écriture a) dans les documents originaux et b) correctement interprétée. Cela implique évidemment de notre part un travail supplémentaire pour interpréter et appliquer correctement l'Écriture. Ce faisant, nous abandonnerons quelques-unes des assurances bon marché après lesquelles nos critiques nous accusent de soupirer. Mais au moins, nous sauvegarderons notre intégrité. Car même si nous sommes parfois en désaccord à propos de nos interprétations, le texte biblique lui-même demeure normatif pour nous tous ; nous avons le devoir et le droit de nous y référer constamment, d'examiner toutes les interprétations à sa lumière et de les modifier le cas échéant. Il convient de noter l'humour, mais aussi la justesse, de la théologienne suisse Suzanne de Dietrich qui disait : « La Bible rassemble tous les protestants... jusqu'à ce qu'ils l'ouvrent » !

J'espère que ce chapitre plutôt long aura démontré que nous, les évangéliques, nous sommes premièrement et avant tout le peuple de la Bible, proclamant haut et fort les grandes vérités de sa révélation, de son inspiration et de son autorité. Nous avons de l'Écriture une conception plus élevée que n'importe qui dans l'Église chrétienne. L'utilisation que nous en faisons doit correspondre à la place qu'elle occupe dans notre pensée.

Comme tout le monde, ceux qui se réfèrent à la Bible sont des gens très occupés qui n'ont pratiquement pas le temps de faire tout ce qu'ils devraient et voudraient. Nous devons pourtant lutter pour mettre journellement du temps de côté afin de lire un passage de la Bible, car notre vie, notre santé et notre croissance spirituelles dépendent d'elle. Même si la discipline du culte matinal ensemble lors du petit déjeuner est devenu impossible pour beaucoup aujourd'hui, avec des adultes qui foncent vers leur lieu de travail et les enfants à l'école, une famille chrétienne devrait tout de même réussir à se rassembler autour de la Bible une fois par semaine, le samedi ou le dimanche. Quant à l'église, si nous sommes pasteurs, j'espère que nous nous plions à la discipline exigeante d'une prédication foncièrement biblique, et si nous sommes laïcs, encourageons nos pasteurs à le faire. L'exposé consciencieux de la Parole de Dieu du haut de la chaire reste une caractéristique essentielle des églises évangéliques.

Les paroles de Jésus, empruntées au Deutéronome, ont franchi les siècles et nous rappelent que les êtres humains ne vivent pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. (Matthieu 4.4)

Bibliographie

J. I. Packer, Connaître Dieu, Éditions Grâce et Vérité.
René Pache, L'inspiration et l'autorité de la Bible, Éditions Emmaüs.
Alfred Kuen, Comment interpréter la Bible, Éditions Emmaüs.
Raymond E. Brown, Que sait-on du Nouveau Testament ? Éditions Bayard, 2000.
Paul Wells, Quand Dieu a parlé aux hommes, Éditions Ligue pour la Lecture de la Bible, 1985.
John Stott, L'autorité de la Bible, Éditions Ligue pour la Lecture de la Bible, 2000.

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