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Bible de Jérusalem – Genèse 38

Histoire de Juda et de Tamar.u

38 Il arriva, vers ce temps-là, que Juda se sépara de ses frères et se rendit chez un homme d’Adullam qui se nommait Hira.

u Tradition yahviste relative aux origines de la tribu de Juda. Vivant à l’écart de ses frères, Juda s’est allié aux Cananéens. De son union, avec sa belle-fille Tamar sont issus les clans de Pérèç et de Zérah, Nb 26.21 ; 1 Ch 2.3s ; Pérèç est l’ancêtre de David, Rt 4.18s, et par lui du Messie, Mt 1.3 ; Lc 3.33. Ainsi s’affirme le mélange des sangs dans Juda et sa destinée différente de celle des autres tribus (Jg 1.3 ; Dt 33.7 ; et toute la suite de l’histoire).

2 Là, Juda vit la fille d’un Cananéen qui se nommait Shua, il la prit pour femme et s’unit à elle.

3 Celle-ci conçut et enfanta un fils, qu’elle appela Er.v

v Texte corrigé d’après les deux versets suivants et sam. ; en hébr. « il l’appela ».

4 De nouveau, elle conçut et enfanta un fils, qu’elle appela Onân. 5 Encore une fois, elle enfanta un fils, qu’elle appela Shéla ; elle se trouvait à Kezib quand elle lui donna naissance.

6 Juda prit une femme pour son premier-né Er ; elle se nommait Tamar. 7 Mais Er, premier-né de Juda, déplut à Yahvé, qui le fit mourir. 8 Alors Juda dit à Onân : « Va vers la femme de ton frère, remplis avec elle ton devoir de beau-frèrew et assure une postérité à ton frère. »

w Selon la loi du « lévirat », cf. Dt 25.5.

9 Cependant Onân savait que la postérité ne serait pas sienne et, chaque fois qu’il s’unissait à la femme de son frère, il laissait perdre à terre pour ne pas donner une postérité à son frère. 10 Ce qu’il faisait déplut à Yahvé,x qui le fit mourir lui aussi.

x Dieu condamne à la fois l’égoïsme d’Onân et sa faute contre la loi naturelle et donc divine du mariage.

11 Alors Juda dit à sa belle-fille Tamar : « Retourney comme veuve chez ton père, en attendant que grandisse mon fils Shéla. » Il se disait : « Il ne faut pas que celui-là meure comme ses frères. » Tamar s’en retourna donc chez son père.

y « Retourne », « s’en retourna », conj. L’hébr. « reste », « resta » a les mêmes consonnes.

12 Bien des jours passèrent et la fille de Shua, la femme de Juda, mourut. Lorsque Juda fut consolé,z il monta à Timna pour la tonte de ses brebis, lui et Hira, son ami d’Adullam.

z C’est-à-dire simplement lorsqu’il eut accompli tous les rites du deuil, cf. Jr 16.7.

13 On avertit Tamar : « Voici, lui dit-on, que ton beau-père monte à Timna pour tondre ses brebis. » 14 Alors, elle quitta ses vêtements de veuve, elle se couvrit d’un voile, s’enveloppa et s’assit à l’entrée d’Énayim, qui est sur le chemin de Timna. Elle voyait bien que Shéla était devenu grand et qu’elle ne lui avait pas été donnée pour femme.a

a Tamar, mise comme une prostituée, attend Juda sur le chemin. Elle est poussée, non par l’impudicité, mais par le désir d’avoir un enfant du sang de son mari défunt. Son action sera reconnue « juste » par Juda, v. 26, et louée par ses descendants, Rt 4.12.

15 Juda l’aperçut et la prit pour une prostituée, car elle s’était voilé le visage.

16 Il se dirigea vers elle sur le chemin et dit : « Laisse, que j’aille avec toi ! » Il ne savait pas que c’était sa belle-fille. Mais elle demanda : « Que me donneras-tu pour aller avec moi ? » 17 Il répondit : « Je t’enverrai un chevreau du troupeau. » Mais elle reprit : « Oui, si tu me donnes un gage en attendant que tu l’envoies ! »

18 Il demanda : « Quel gage te donnerai-je ? » Et elle répondit : « Ton sceau et ton cordon et la canne que tu as à la main. »b Il les lui donna et alla avec elle, qui devint enceinte de lui.

b Le sceau enfilé sur un cordon et la canne sont des objets personnels, de vraies pièces d’identité.

19 Elle se leva, partit, enleva son voile et reprit ses vêtements de veuve.

20 Juda envoya le chevreau par l’intermédiaire de son ami d’Adullam, pour reprendre les gages des mains de la femme, mais celui-ci ne la retrouva pas.

21 Il demanda aux gens du lieu : « Où est cette prostituéec qui était à Énayim, sur le chemin ? » Mais ils répondirent : « Il n’y a jamais eu là de prostituée ! »

c Proprement « prostituée sacrée », hiérodule d’un culte païen. Nous sommes en milieu cananéen.

22 Il revint donc auprès de Juda et dit : « Je ne l’ai pas retrouvée. Et même, les gens du lieu m’ont dit qu’il n’y avait jamais eu là de prostituée. » 23 Juda reprit : « Qu’elle garde tout : il ne faut pas qu’on se moque de nous, mais j’ai bien envoyé le chevreau que voici, et toi, tu ne l’as pas retrouvée. »

24 Environ trois mois après, on avertit Juda : « Ta belle-fille Tamar, lui dit-on, s’est prostituée, elle est même enceinte par suite de son inconduite. » Alors Juda ordonna : « Qu’elle soit amenée dehors et brûlée vive ! »d

d Tamar est femme d’Er et, par la loi du lévirat (cf. Dt 25.5), promise à Shéla. Bien qu’habitant chez son père, elle reste donc sous l’autorité de Juda, qui la condamne comme adultère, Lv 20.10 ; Dt 22.22 ; cf. Jn 8.5. La peine du feu fut ensuite réservée aux filles de prêtres, Lv 21.9.

25 Mais, comme on l’amenait, elle envoya dire à son beau-père : « C’est de l’homme à qui appartient cela que je suis enceinte. Reconnais donc, dit-elle, à qui appartient ce sceau, ce cordon et cette canne. » 26 Juda les reconnut et dit : « Elle est plus juste que moi. C’est qu’en effet je ne lui avais pas donné mon fils Shéla. » Et il n’eut plus de rapports avec elle.

27 Lorsque vint le temps de ses couches, il apparut qu’elle avait dans son sein des jumeaux. 28 Pendant l’accouchement, l’un d’eux tendit la main et la sage-femme la saisit et y attacha un fil écarlate, en disant : « C’est celui-là qui est sorti le premier. » 29 Mais il advint qu’il retira sa main et ce fut son frère qui sortit. Alors elle dit : « Comme tu t’es ouvert une brèche ! » Et on l’appela Pérèç. 30 Ensuite sortit son frère, qui avait le fil écarlate à la main, et on l’appela Zérah.e

e Pérèç signifie « brèche ». Le nom de Zérah doit faire allusion au fil rouge qui liait sa main.

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