16 « Mais à qui vais-je comparer cette génération ? Elle ressemble à des gamins qui, assis sur les places, en interpellent d’autres,
« Nous vous avons joué de la flûte,
et vous n’avez pas dansé !
Nous avons entonné un chant funèbre,
et vous ne vous êtes pas frappé la poitrine ! »
18 Jean vient en effet, ne mangeant ni ne buvant, et l’on dit : « Il est possédé ! »
19 Vient le Fils de l’homme, mangeant et buvant, et l’on dit : « Voilà un glouton et un ivrogne, un ami des publicains et des pécheurs ! » Et justice a été rendue à la Sagesse par ses œuvres. »f
f Var. « par ses enfants », cf. Lc 7.35. — À la façon d’enfants boudeurs qui repoussent tous les jeux qu’on leur offre (ici jeux de mariage et d’enterrement), les Juifs rejettent toutes les avances de Dieu, aussi bien la pénitence de Jean que la condescendance de Jésus. L’une et l’autre se légitiment pourtant par les situations différentes de Jean-Baptiste et de Jésus par rapport à l’ère messianique cf. 9.14-15 ; 11.11-13. — En dépit de la mauvaise volonté des hommes, le sage dessein de Dieu se réalise et se justifie lui-même par la conduite qu’il inspire à Jean-Baptiste et à Jésus. Les « œuvres » de ce dernier, en particulier, c’est-à-dire ses miracles, v. 2, sont le témoignage qui convainc ou condamne, vv. 6 et 20-24. Jésus est encore rapproché de la Sagesse en 11.28-30 ; 12.42 ; 23.34 ; Jn 6.35 ; 1 Co 1.24. — Une autre exégèse ne voit ici qu’un proverbe dont l’application aux incrédules annonce que leur fausse sagesse, cf. v. 25, récoltera ses justes fruits, à savoir les châtiments divins, vv. 20-24.
20 Alors il se mit à invectiver contre les villes qui avaient vu ses plus nombreux miracles mais n’avaient pas fait pénitence.
21 « Malheur à toi, Chorazeïn ! Malheur à toi, Bethsaïde ! Car si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon,g il y a longtemps que, sous le sac et dans la cendre, elles se seraient repenties.
g Villes dont les menaces des prophètes avaient fait des types d’impiété : Am 1.9-10 ; Isa 23 ; Ez 26-28 ; Za 9.2-4.
p Divinité cananéenne dont le nom signifie « Baal le Prince » (et non « Baal du fumier » comme on l’a souvent dit), ce qui explique que l’orthodoxie monothéiste en ait fait le « Prince des démons ». La forme « Béelzéboub » (syr. et Vulg.) est un jeu de mots méprisant (cf. déjà 2 R 1.2s) qui transforme ce titre en « Baal des mouches ».
25 Connaissant leurs sentiments, il leur dit : « Tout royaume divisé contre lui-même court à la ruine ; et nulle ville, nulle maison, divisée contre elle-même, ne saurait se maintenir.
q Littéralement « vos fils », tournure sémitique.
29 « Ou encore, comment quelqu’un peut-il pénétrer dans la maison d’un homme fort et s’emparer de ses affaires, s’il n’a d’abord ligoté cet homme fort ? Et alors il pillera sa maison.
30 « Qui n’est pas avec moi est contre moi, et qui n’amasse pas avec moi dissipe.
r L’homme est excusable de se méprendre sur la dignité divine de Jésus, voilée par ses humbles apparences de « Fils de l’homme », 8.20 ; il ne l’est pas de fermer ses yeux et son cœur aux œuvres éclatantes de l’Esprit. En les niant, il rejette l’avance suprême que lui fait Dieu, et se met hors du salut, cf. He 6.4-6 ; 10.26-31.
u Image tirée de la Bible, cf. Os 1.2.
v En 16.4 Matthieu ne précise pas, comme ici au v. 40, le sens du « signe de Jonas », et Lc 11.29s l’entend de la prédication de Jésus, qui est un signe pour ses contemporains comme Jonas le fut pour les Ninivites. Cette deuxième interprétation est d’alleurs sous-jacente ici au v. 41. Or elle est moins vraisemblable. Non seulement la prédication déjà actuelle de Jésus ne peut être annoncée comme future, mais encore, et surtout, dans la tradition juive Jonas était célèbre pour sa délivrance miraculeuse, bien plus que pour sa prédication aux païens, qui déplaisait plutôt. Même si son explicitation du v. 40 est tardive, l’interprétation de doit donc mieux refléter que celle de Lc la pensée de Jésus il annonce de façon voilée son triomphe final. Marc n’a pas d’allusion à Jonas, cf. Mc 8.12.