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Bible de Jérusalem

Proverbes 30.15-31.9

VII. Proverbes numériquesu

15 La sangsue a deux filles : « Apporte ! Apporte ! »

Il y a trois choses insatiables
et quatre qui jamais ne disent : « Assez ! » :

u Le « proverbe numérique » tient à la fois de la maxime, de l’énigme et de la comparaison. Ce procédé littéraire est attesté dans la littérature hébraïque, sous une forme encore imparfaite, dès l’époque prophétique, Am 1.3, 6, 9, 11, 13 ; Isa 17.6 ; Mi 5.4, cf. Ps 62.12s, et reparaît à travers toute la littérature sapientielle, 6.16s et ici 30.15-33 ; Jb 5.19 ; 40.5 ; Qo 11.2 ; 4.12 (?) ; Si 23.16s ; 25.7 ; 26.5-7, 28 ; 50.25 ; cf. 25.1-2. — Le bref recueil 30.15-33 marque un intérêt particulier pour les merveilles de la nature et les mœurs des animaux.

16 le shéol, le sein stérile,
la terre que l’eau ne peut rassasier,
le feu qui jamais ne dit : « Assez ! »

17 L’œil qui nargue un père
et méprise l’obéissance due à une mère,
les corbeaux du torrent le crèveront,
les aigles le dévoreront.

18 Il est trois choses qui me dépassent
et quatre que je ne connais pas :
19 le chemin de l’aigle dans les cieux,
le chemin du serpent sur le rocher,
le chemin du vaisseau en haute mer,
le chemin de l’homme chez la jeune femme.v

v Non pas les manœuvres pour la séduire, mais le mystère de l’union conjugale et de la procréation.

20 Telle est la conduite de la femme adultère :
elle mange, puis s’essuie la bouche en disant :
« Je n’ai rien fait de mal ! »w

w Ce v. semble être une glose maladroite des deux vv. précédents.

21 Sous trois choses tremble la terre
et il en est quatre qu’elle ne peut porter :
22 un esclave qui devient roi,
une brute gorgée de nourriture,
23 une fille odieuse qui vient à se marier,
une servante qui hérite de sa maîtresse.

24 Il est quatre êtres minuscules sur la terre,
mais sages entre les sages :x

x « entre les sages » versions ; « formés à la sagesse » hébr.

25 les fourmis, peuple chétif,
mais qui, en été, assure sa provende ;
26 les damans,y peuple sans vigueur,
mais qui gîtent dans les rochers ;

y Petit mammifère ressemblant à la marmotte, qui vit dans les rochers et se laisse très difficilement approcher. Cf. Ps 104.18 ; Lv 11.5.

27 chez les sauterelles, point de roi !
mais elles marchent toutes en bon ordre ;
28 le lézard que l’on capture à la main,
mais qui hante les palais du roi.

29 Trois choses ont une belle allure
et quatre une belle démarche :
30 le lion, le plus brave des animaux,
qui ne recule devant rien ;

31 le coq bien râblé, ou le bouc,
et le roi, quand il harangue le peuple.z

z D’après le grec. Hébr. « et un roi (ayant) son armée (?) avec lui ». — Le début du v. est également incertain ; au lieu de « coq » (grec, et aussi d’après l’arabe) on a proposé « cigale » (d’après l’akkadien), ou encore « cheval », « zèbre », « lévrier », etc.

32 Si tu fus assez sot pour t’emporter
et si tu as réfléchi, mets la main sur ta bouche !
33 Car en pressant le lait, on obtient le beurre,
en pressant le nez, on obtient le sang,
en pressant la colère, on obtient la querelle.

VIII. Paroles de Lemuel

31 Paroles de Lemuel, roi de Massa,a que sa mère lui apprit.

a « roi de Massa » en liant les deux mots ; « roi ; oracle » (massa’) hébr., cf. 30.1. — Massa est le nom d’une tribu ismaélite du nord de l’Arabie, Gn 25.14. La sagesse des « fils de l’Orient », Nb 24.21, était réputée, cf. 1 R 5.10 ; Jr 49.7 ; Jb 2.11.

2 Quoi, mon fils ! quoi, fils de mes entrailles !
quoi, fils de mes vœux !
3 Ne livre pas ta vigueur aux femmes,
ni tes voies à celles qui perdent les rois.b

b « à celles qui perdent » le moh-ot conj. ; « pour perdre » lamh-ot hébr. — Au lieu de « tes voies » ûderakêka on propose « tes flancs » wirékêka. Grec « et n’expose pas ton esprit et ta vie à des regrets tardifs ».

4 Il ne convient pas aux rois, Lemuel,
il ne convient pas aux rois de boire du vin,c
ni aux princes d’aimerd la boisson,

c L’insistance sur les dangers du vin est un des traits de la morale du désert (cf. les Rékabites, Jr 35, et les Arabes modernes).

d « d’aimer » ’awweh conj. ; hébr. incertain (ketib « ou » ’ô ; qeré « où » ’ê).

5 de crainte qu’en buvant ils n’oublient ce qui est décrété
et qu’ils ne faussent la cause de tous les pauvres.

6 Procure des boissons fortes à qui va mourir,
du vin à qui est rempli d’amertume
7 qu’il boive, qu’il oublie sa misère,
qu’il ne se souvienne plus de son malheur !

8 Ouvre la bouche en faveur du muet,
pour la cause de tous les délaissés ;e

e Sens incertain ; litt. « fils de disparition ».

9 ouvre la bouche, juge avec justice,
défends la cause du pauvre et du malheureux.