Nous devons nous abstenir entièrement de tout discours honteux, et fermer la bouche à ceux qui en prononcent devant nous, tantôt par des regards sévères et méprisants, tantôt par des reproches rudes et amers. « Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme ; mais ce qui sort de la bouche, c’est là ce qui souille l’homme. » Cette obscénité dans les discours est une marque d’ignorance et d’impiété, de bassesse, d’insolence et de dissolution ; il n’y a dans ceux qui les prononcent ni modestie, ni tempérance, ni honnêteté. Les choses honteuses pénètrent dans l’âme par les oreilles comme par les yeux ; de là vient que le divin Pédagogue nous aide dans la lutte que nous avons à soutenir, par des discours chastes et modestes. Ces discours sont comme des remparts placés au-devant de nos oreilles pour empêcher le vice de s’y glisser et de porter dans notre âme le trouble et la corruption. Il dirige en même temps nos yeux vers le spectacle des choses honnêtes, nous disant qu’il est préférable que nos pieds soient la cause de notre chute que nos yeux. L’apôtre condamne en ces termes les discours obscènes : « Que votre bouche ne prononce aucune parole mauvaise, mais que tout ce que vous direz soit propre à nourrir la foi et communiquer la grâce à ceux qui vous entendent. Qu’on n’entende parmi vous ni parole déshonnête, ni folle gaieté, ce qui ne convient pas à votre état, mais plutôt des actions de grâces. Si celui qui appelle son frère fou, sera coupable au jugement de Dieu, que dirons-nous de celui qui ne dit que des folies ? » N’est-ce pas de lui qu’il est écrit : « Or, je vous dis que toute parole oiseuse que les hommes auront proférée, ils en rendront compte au jour du jugement ; car vous serez justifiés par vos paroles, et condamnés par vos paroles ? » Quelle est donc la défense de nos oreilles et la sagesse de nos yeux ? les conversations avec les justes, qui ferment toute voie à l’erreur. Les poètes profanes même nous disent que les discours mauvais corrompent les bonnes mœurs. « Le glorieux apôtre nous dit : Ayez horreur du mal, et attachez-vous constamment au bien ; car celui qui vit avec les saints sera sanctifié. » N’écoutez donc, ne dites, ne regardez rien de honteux, et surtout mettez tous vos soins à ne rien faire qui le soit, soit en découvrant ou regardant quelques parties secrètes du corps. Loin de se plaire à considérer la honteuse nudité du juste, la modestie filiale couvrit ce que l’ivresse avait découvert. Il ne faut pas se garder avec moins de soin et d’attention de ces paroles auxquelles doivent être fermées les oreilles de ceux qui ont cru en Jésus-Christ. Le Pédagogue nous les défend d’abord ; et cette défense est comme un rempart élevé longtemps d’avance contre les assauts de l’incontinence. C’est avec un art admirable qu’il combat et arrache nos vices. Cette défense : « Vous ne commettrez point d’adultère, » est précédée et fortifiée par celle-ci, « vous ne convoiterez point. » L’adultère, en effet, est le fruit de la convoitise, détestable racine de tout mal. Les mots et les choses obscènes nous sont également interdits, et avec raison, car celui qui se plaît aux mauvais discours désirera bientôt les choses mauvaises ; mais celui, au contraire, dont les paroles sont chastes, s’accoutume à repousser courageusement les assauts des passions.
Du reste, nous avons déjà longuement expliqué que la honte n’est point dans les noms des diverses parties du corps humain qui servent à l’acte du mariage ou de la génération. Elles exigent la pudeur et le respect, il est vrai, mais il n’y a point de honte réelle à les nommer et à s’en servir, l’action illégitime est la seule honteuse ; car il n’y a de honteux que le vice et les actions qu’il fait commettre. J’appelle donc avec raison discours honteux ceux qu’on se plaît à tenir sur des actions vicieuses, tels que l’adultère, l’amour des garçons ou sur tout autre sujet de même nature. Ce n’est pas que les paroles inutiles et oiseuses soient permises aux Chrétiens : « Le péché abonde dans la multitude des paroles. » Celui qui se tait est réputé sage, celui qui parle trop est odieux. Celui qui multiplie ses discours hait son âme.