1 Puisque la Loi, les Prophètes 2 et les autres écrivains qui leur ont succédéb nous ont transmis tant de grandes leçons 3 grâce auxquelles on ne saurait trop féliciter Israël de sa science et de sa sagesse ; 4 comme, en outre, c’est un devoir, non seulement d’acquérir la science par la lecture, 5 mais encore, une fois instruit, de se mettre au service de ceux du dehors, 6 par ses paroles et ses écrits : 7 mon aïeul Jésus, après s’être appliqué avec persévérance à la lecture 8 de la Loi, 9 des Prophètes et 10 des autres livres des ancêtres, 11 et y avoir acquis une grande maîtrise, 12 en est venu, lui aussi, à écrire quelque chose sur des sujets d’enseignement et de sagesse 13 afin que les hommes soucieux d’instruction, se soumettant aussi à ces disciplines, 14 apprissent d’autant mieux à vivre selon la Loi. [a Ce prologuze du traducteur grec ne fait pas partie du livre de l’Ecclésiastique proprement dit et n’est pas habituellement considéré comme canonique.] [b C’est la tradiction tripartite de la Bible hébraïque, cf. 1 M 12.9 et la Table. De même en 8-10, 24-25. Mais il n’est pas sûr qu’à l’époque (fin du IIe s. av. J.-C.) ces trois parties aient eu exactement le même contenu qu’aujourd’hui, surtout en ce qui concerne la troisième.]
15 Vous êtes donc invités 16 à en faire la lecture 17 avec une bienveillante attention 18 et à vous montrer indulgents 19 là où, en dépit de nos efforts d’interprétation, nous pourrions sembler 20 avoir échoué à rendre quelque expression ; 21 c’est qu’en effet il n’y a pas d’équivalence 22 entre des choses exprimées originairement en hébreu et leur traduction dans une autre langue ; 23 bien plus, 24 si l’on considère la Loi elle-même, les Prophètes 25 et les autres livres, 26 leur traduction diffère considérablement de ce qu’exprime le texte original.
27 C’est en l’an 38 du feu roi Évergètec qu’étant venu en Égypte et y ayant séjourné, 28 j’y découvris une vie conforme à une haute sagessed 29 et je me fis un devoir impérieux d’appliquer, moi aussi, mon zèle et mes efforts à traduire le présent livre ; 30 j’y ai consacré beaucoup de veilles et de science 31 pendant cette période, 32 afin de mener à bien l’entreprise et de publier le livre 33 à l’usage de ceux-là aussi qui, à l’étranger, désirent s’instruire, 34 réformer leurs mœurs, et vivre conformément à la Loi. [c Probablement Ptolémée VII Évergète Physcon (170-117). La date correspondrait donc à 132 av. J.-C.] [d « une vie conforme à », litt. « une copie de » : traduction incertaine. On peut aussi comprendre « ... Je trouvai que l’instruction (religieuse) était loin d’égaler (la nôtre) » ; ou encore : « je trouvai une copie renfermant une instruction non médiocre ». D’après l’interprétation adoptée, Ben Sira, présentant au public grec le livre de son grand-père, veut satisfaire une communauté déjà cultivée et digne de cet enrichissement.]
1 Toute sagesse vient du Seigneur,f
elle est près de lui à jamais.
e Ce chapitre aborde deux thèmes fondamentaux du livre, la sagesse qui vient de Dieu et la crainte du Seigneur, nécessaires pour accueillir le don d’en-haut.
f Le terme « Seigneur » (Kyrios) traduit communément dans les LXX le nom de « Yahvé ». Le traducteur de Ben Sira l’emploie très fréquemment, même pour rendre les autres noms divins.
2 Le sable de la mer, les gouttes de la pluie,
les jours de l’éternité, qui peut les dénombrer ?
3 La hauteur du ciel, l’étendue de la terre,
la profondeur de l’abîme,g qui peut les explorer ?
g « la profondeur de l’abîme » lat., cf. syr. ; « l’abîme et la sagesse » grec.
4 Avant toutes choses fut créée la Sagesse,
l’intelligence prudente vient des temps les plus lointains.
5 La source de la sagesse, c’est la parole de Dieu dans les cieux ;
ses cheminements, ce sont les lois éternelles.h
h Les passages imprimés en italiques proviennent de la seconde édition du texte grec, cf. Introduction ; les principaux témoins seront souvent indiqués en notes pour 1.5, Gr II et lat.
6 La racine de la sagesse, à qui fut-elle révélée ?
Ses ressources, qui les connaît ?
7 La science de la sagesse, à qui est-elle apparue ?
et la richesse de ses voies, qui l’a comprise ?i
i Gr II et lat. Doublet de 1.6 ?
8 Il n’y a qu’un être sage, très redoutable
quand il siège sur son trône : c’est le Seigneur.
9 C’est lui qui l’a créée,j vue et dénombrée,
qui l’a répandue sur toutes ses œuvres,
j L’auteur insiste sur l’unicité et la transcendance de Dieu. Attribut de Dieu, qualité du monde créé par lui, don de Dieu aux hommes, et souvent personnifiée par les livres sapientiaux, Pr 8.22, la sagesse reste cependant ici une créature, qu’on ne peut identifier avec Dieu.
10 en toute chair selon sa largesse,
et qui l’a distribuée à ceux qui l’aiment.
L’amour du Seigneur est une sagesse digne d’honneur ;
il l’accorde en partage à ceux qui le craignent.k
k Lat. ajoute « dans l’Esprit Saint », interpolation chrétienne.
11 La crainte du Seigneur est gloire et fierté,
gaieté et couronne d’allégresse.
l Gr II et lat. (1.14-15) ; « craignent » conj. ; litt. « à ceux à qui il est apparu il l’accorde en partage dans sa vision » confusion entre les verbes originaux hébreux « craindre », yr’, et « voir », r’h.
12 La crainte du Seigneur réjouit le cœur,
donne gaieté, joie et longue vie.
La crainte du Seigneur est un don qui vient du Seigneur ;
de fait, elle établit sur les chemins de l’amour.
13 Pour qui craint le Seigneur, tout finira bien,
au jour de sa mort il sera béni.
14 Le principe de la sagesse, c’est de craindre le Seigneur ;
et pour les fidèles, elle est créée avec eux dans le sein.
15 Parmi les hommes, elle s’est fait un nid, fondation éternelle,
et à leur race elle s’attachera fidèlement.
16 La plénitude de la sagesse, c’est de craindre le Seigneur,
elle les enivre de ses fruits ;
17 elle remplit toute leur maison de choses désirables
et de ses produits leurs greniers.
18 Le couronnement de la sagesse, c’est la crainte du Seigneur,
elle fait fleurir bien-être et santé.
Tous deux sont dons de Dieu, en vue du bien-être
et pour ceux qui l’aiment, la fierté s’élargit.
19 m Il fait pleuvoir la science et l’intelligence,
il a exalté la gloire de ceux qui la possèdent.
m La crainte du Seigneur, pour un Juif, n’est autre chose que la religion ou la piété. On voit dès le début de ce développement que l’idée de crainte physique, de terreur devant la puissance redoutable de Yahvé, a pratiquement disparu de la théologie juive.
20 La racine de la sagesse, c’est de craindre le Seigneur,
et sa frondaison, c’est une longue vie.
21 La crainte du Seigneur ôte les péchés ;
celui qui persévère détourne toute colère.n
n Le texte reçu et lat. ajoutent « Le Seigneur l’a vue et dénombrée », repris à 1.9.
22 La passion du méchant ne saurait le justifier,o
car le poids de sa passion est sa ruine.
o Lat. « 26 La crainte du Seigneur, c’est la piété dans la connaissance, 27 mais la sagesse est abhorrée des pécheurs. La crainte du Seigneur chasse le péché. »
23 L’homme patient tient bon jusqu’à son heure,
mais à la fin, sa joie éclate.
24 Jusqu’à son heure, il dissimule ses paroles,
et tout le monde proclame son intelligence.
25 Dans les trésors de la sagesse sont les maximes de la science,
mais le pécheur a la piété en horreur.
26 Convoites-tu la sagesse ? Garde les commandements,p
le Seigneur te la prodiguera.
p « la passion du méchant » conj. ; « la passion méchante » grec. À la place de 1.22-27, la version syriaque Peshitta insère Heureux l’homme qui la médite, car la Sagesse lui est préférable à tous les trésors. Heureux l’homme qui s’en approche et qui s’occupe de ses commandements. Elle lui prépare une couronne éternelle et une victoire perpétuelle parmi les saints. Il se réjouit d’elle et elle se réjouit de lui et ne le rejette pas pour toujours. Les anges du Seigneur se réjouissent de lui et proclament tous les louanges du Seigneur. Ce livre est tout entier rempli de vie. Heureux l’homme qui l’écoute et agit en conformité. Écoutez-moi, vous qui craignez Dieu, prêtez l’oreille et comprenez mes paroles. Qui veut hériter la vie comme un héritage éternel et une grande joie ? Prête l’oreille à mes paroles et mets-les en pratique et tu seras inscrit dans le livre de vie. Aime la crainte du Seigneur et fixe ton cœur en elle et tu n’auras rien à redouter. Approche-toi d’elle et ne tarde pas, car tu trouveras la vie pour ton esprit. Et quand tu l’approches, que ce soit en héros et en vaillant !
27 Car la crainte du Seigneur est sagesse et instruction,
ce qu’il aime, c’est la fidélité et la douceur.
28 Ne sois pas indocile à la crainte du Seigneur,
et ne la pratique pas avec un cœur double.
29 Ne sois pas hypocrite devant le monde,q
et veille sur tes lèvres.
q Pour Ben Sira, recevoir de Dieu la sagesse suppose une attitude d’accueil et de vénération, la crainte du Seigneur, manifestée dans la Loi, 19.20 ; cf. Qo 12.13.
30 Ne t’élève pas, de peur de tomber
et de te couvrir de honte,
car le Seigneur révélerait tes secrets
et, au milieu de l’assemblée, il te renverserait,
parce que tu n’as pas pratiqué la crainte du Seigneur
et que ton cœur est plein de fraude.