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Bible de Jérusalem – Jean 11

Résurrection de Lazare.

11 Il y avait un malade, Lazare, de Béthanie, le village de Marie et de sa sœur Marthe.d

d Ces deux sœurs, que l’on retrouvera lors d’un repas donné à Jésus, 12.1s, sont probablement identiques à celles dont parle Luc en Lc 10.38-42. Dans les deux récits, Marthe est la maîtresse de maison qui assure le service du repas, 12.2 ; Lc 10.40. Marie se tient assise aux pieds de Jésus, 11.20 ; 12.3 ; Lc 10.39. On note une tension interne dans le récit johannique aux vv. 1 et surtout 45, Marie semble le personnage principal. Mais dans le cours du récit, et spécialement au v. 5, c’est Marthe qui prend la première place ; au v. 32, Marie ne fait que répéter les paroles prononcées par Marthe au v. 21.

2 Marie était celle qui oignit le Seigneur de parfum et lui essuya les pieds avec ses cheveux ;e c’était son frère Lazare qui était malade.

e Selon toute probabilité, ce n’est pas la pécheresse de Lc 7.37.

3 Les deux sœurs envoyèrent donc dire à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade. » 4 À cette nouvelle, Jésus dit : « Cette maladie ne mène pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu : afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle. »f

f Expression à double sens Jésus sera glorifié par le miracle lui-même, cf. 1.14 ; mais ce miracle entraînera, 11.46-54, sa propre mort, qui sera aussi sa glorification, 12.32.

5 Or Jésus aimait Marthe et sa sœur et Lazare.

6 Quand il apprit que celui-ci était malade, il demeura deux jours encore dans le lieu où il se trouvait ; 7 alors seulement, il dit aux disciples : « Allons de nouveau en Judée. » 8 Ses disciples lui dirent : « Rabbi, tout récemment les Juifs cherchaient à te lapider, et tu retournes là-bas ! » 9 Jésus répondit :

« N’y a-t-il pas douze heures de jour ?
Si quelqu’un marche le jour, il ne bute pas,
parce qu’il voit la lumière de ce monde ;
10 mais s’il marche la nuit, il bute,
parce que la lumière n’est pas en lui. »

11 Il dit cela, et ensuite : « Notre ami Lazare repose, leur dit-il ; mais je vais aller le réveiller. » 12 Les disciples lui dirent : « Seigneur, s’il repose, il sera sauvé. »

13 Jésus avait parlé de sa mort, mais eux pensèrent qu’il parlait du repos du sommeil. 14 Alors Jésus leur dit ouvertement : « Lazare est mort, 15 et je me réjouis pour vous de n’avoir pas été là-bas, afin que vous croyiez.g Mais allons auprès de lui ! »

g La mort de Lazare est l’occasion du miracle, qui fortifiera leur foi.

16 Alors Thomas, appelé Didyme, dit aux condisciples :h « Allons, nous aussi, pour mourir avec lui ! »

h Le texte contient ici le mot grec summathètai , au lieu de l’habituel mathètai , « disciples ». C’est le seul cas dans toute la Bible.

17 À son arrivée, Jésus trouva Lazare dans le tombeau depuis quatre jours déjà. 18 Béthanie était près de Jérusalem, distant d’environ quinze stades,

19 et beaucoup d’entre les Juifs étaient venus auprès de Marthe et de Marie pour les consoler au sujet de leur frère. 20 Quand Marthe apprit que Jésus arrivait, elle alla à sa rencontre, tandis que Marie restait assise à la maison. 21 Marthe dit à Jésus : « Seigneur,i si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.

i Om. « Seigneur ».

22 Mais maintenant encore, je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera. »j

j Marthe a foi en Jésus ; mais elle s’arrête, comme au seuil d’une impossible prière.

23 Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera. » — 24 « Je sais, dit Marthe, qu’il ressuscitera à la résurrection, au dernier jour. » 25 Jésus lui dit :

« Moi, je suis la résurrection.k
Qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ;l

k Aux vv. 23-26, Jean utilise un procédé littéraire classique chez lui, 2.19, pour donner un enseignement sur la résurrection. Marthe comprend le verbe (v. 23) au sens de l’eschatologie juive héritée de Daniel Dn 12.2 à la mort, l’homme descend au shéol, Nb 16.33, comme une ombre privée de vie, mais il ressuscitera au dernier jour. Jésus rectifie cette idée dans le sens d’une eschatologie déjà réalisée il est lui-même la résurrection, v. 25. Celui qui croit en lui ne mourra jamais, v. 26 ; cf. 8.51, il est déjà passé de la mort à la vie, 5.24 ; 1 3.14, il est déjà ressuscité dans le Christ grâce à la vie nouvelle qui est en lui, Rm 6.1-11 ; Col 2.12-13 ; 3.1. La mort comme la concevait Daniel est abolie. Cette vue nouvelle suppose une distinction entre l’âme, qui ne meurt pas, et le corps, qui se corrompt dans la terre. — Add. « et la vie ».

l Aux v. 25-26, nous avons une nouvelle utilisation de la formule « je suis » pour introduire une définition du Christ, 6.35. Mais ici, la réponse du Christ semble trop complexe (opposer 8.12 par exemple), avec une reprise rédactionnelle constituée par l’expression « croit en moi ». Le texte primitif devait avoir simplement « Qui croit en moi () ne mourra jamais ». Cette affirmation (cf. note précédente) semble contredite par l’expérience humaine, d’où la glose.

26 et quiconque vit et croit en moi
ne mourra jamais.
Le crois-tu ? »

27 Elle lui dit : « Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu,m celui qui vient dans le monde. »

m Comme pour Nathanaël, 1.49, l’expression « Fils de Dieu » n’est pour Marthe qu’un simple titre messianique (voir aussi Marc , Mc 15.39 et Mt 4.3). L’évangéliste lui donne un sens plus fort (cf. 10.34 et la note).

28 Ayant dit cela, elle s’en alla appeler sa sœur Marie, lui disant en secret : « Le Maître est là et il t’appelle. » 29 Celle-ci, à cette nouvelle, se leva bien vite et alla vers lui. 30 Jésus n’était pas encore arrivé au village, mais il se trouvait toujours à l’endroit où Marthe était venue à sa rencontre. 31 Quand les Juifs qui étaient avec Marie dans la maison et la consolaient la virent se lever bien vite et sortir, ils la suivirent, pensant qu’elle allait au tombeau pour y pleurer.

32 Arrivée là où était Jésus, Marie, en le voyant, tomba à ses pieds et lui dit : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort ! » 33 Lorsqu’il la vit pleurer, et pleurer aussi les Juifs qui l’avaient accompagnée, Jésus frémit en son esprit et se troubla. 34 Il dit : « Où l’avez-vous mis ? » Ils lui dirent : « Seigneur, viens et vois. » 35 Jésus versa des larmes.n

n L’évangéliste emploie deux verbes différents klaiein , « se lamenter », pour Marie et les Juifs, 11.31, 33, et dakruein , « verser des larmes » — seul emploi dans le Nouveau Testament —, ici pour Jésus. Certains y voient une allusion à l’agonie de Jésus, cf. He 5.7.

36 Les Juifs dirent alors : « Voyez comme il l’aimait ! » 37 Mais quelques-uns d’entre eux dirent : « Ne pouvait-il pas, lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, faire aussi que celui-ci ne mourût pas ? » 38 Alors Jésus, frémissant à nouveau en lui-même, se rend au tombeau. C’était une grotte, avec une pierre placée par-dessus. 39 Jésus dit : « Enlevez la pierre ! » Marthe, la sœur du mort, lui dit : « Seigneur, il sent déjà : c’est le quatrième jour. »o

o Ce détail est donné pour prouver la réalité de la mort, et donc celle de la résurrection, cf. 19.35.

40 Jésus lui dit : « Ne t’ai-je pas dit que si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ? » 41 On enleva donc la pierre. Jésus leva les yeux et dit :

« Père, je te rends grâces de m’avoir écouté.
42 Je savais que tu m’écoutes toujours ;
mais c’est à cause de la foule qui m’entoure
que j’ai parlé,
afin qu’ils croient que tu m’as envoyé. »

43 Cela dit, il s’écria d’une voix forte : « Lazare, viens dehors ! » 44 Le mort sortit, les pieds et les mains liés de bandelettes,p et son visage était enveloppé d’un suaire. Jésus leur dit : « Déliez-le et laissez-le aller. »

p Il est peut-être vain de se demander si c’était la coutume juive de lier les mains et les pieds des morts lorsqu’on les ensevelissait. Jean veut indiquer que Lazare est libéré des liens de la mort déliez-le !, Ps 116.3 ; cf. Ps 18.6 ; Ac 2.24.

Les chefs juifs décident la mort de Jésus.

45 Beaucoup d’entre les Juifs qui étaient venus auprès de Marie et avaient vu ce qu’il avait fait, crurent en lui. 46 Mais certains s’en furent trouver les Pharisiens et leur dirent ce qu’avait fait Jésus. 47 Les grands prêtres et les Pharisiens réunirent alors un conseil : « Que faisons-nous ? disaient-ils, cet homme fait beaucoup de signes. 48 Si nous le laissons ainsi, tous croiront en lui, et les Romains viendront et ils supprimeront notre Lieu saintq et notre nation. »

q Littéralement « notre Lieu » soit Jérusalem, soit tout le pays juif, soit plus probablement le Lieu Saint par excellence, le Temple, Mt 24.15. Cf. Isa 60.13 ; 2 M 1.29 ; 2.18 ; Ac 6.13.

49 Mais l’un d’entre eux, Caïphe, étant grand prêtre cette année-là, leur dit : « Vous n’y entendez rien. 50 Vous ne songez même pas qu’il est de votre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas tout entière. » 51 Or cela, il ne le dit pas de lui-même ; mais, étant grand prêtre cette année-là, il prophétisa que Jésus allait mourir pour la nation — 52 et non pas pour la nation seulement, mais encore afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés.r

r Par son élévation sur la croix, le Christ attirera tous les hommes à lui parce que, reconnu pour le véritable envoyé de Dieu, son enseignement de « vérité » sera accepté par tous, 12.31.

53 Dès ce jour-là donc, ils résolurent de le tuer.

54 Aussi Jésus cessa de circuler en public parmi les Juifs ; il se retira dans la région voisine du désert, dans une ville appelée Éphraïm,s et il y séjournait avec ses disciples.

s Éphraïm, 2 S 13.23, ou Ophra, Jos 18.23, est l’actuelle et-Taiyibé, à 25 kilomètres au N.-N.-E. de Jérusalem, à la limite du désert de Judée.

6. FIN DU MINISTÈRE PUBLIC
ET PRÉLIMINAIRES DE LA DERNIÈRE PÂQUE

L’approche de la Pâque.

55 Or la Pâque des Juifs était prochet et beaucoup de gens montèrent de la campagne à Jérusalem, avant la Pâque,u pour se purifier.

t ne cessera de souligner la relation de la mort de Jésus avec la Pâque, 13.1 ; 18.28 ; 19.14, 42.

u Om. « avant la Pâque ».

56 Ils cherchaient Jésus et se disaient les uns aux autres, en se tenant dans le Temple : « Qu’en pensez-vous ? qu’il ne viendra pas à la fête ? » 57 Les grands prêtres et les Pharisiens avaient donné des ordres : si quelqu’un savait où il était, il devait l’indiquer, afin qu’on le saisît.

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