24 La Sagesse fait son propre éloge,
au milieu de son peuple elle montre sa fierté.
h « Éloge de la Sagesse » sous-titre grec. On comparera ce morceau aux autres discours de la Sagesse personnifiée (Pr 1.20-33 ; 8.1-36 ; 9.1-6) et aux éloges de la sagesse (Jb 28 ; Ba 3.9 — 4.4). C’est ici le chapitre central du livre, où la doctrine de la sagesse est présentée dans son ensemble, avec de nombreuses réminiscences des livres bibliques antérieurs l’auteur propose une interprétation du passé, du point de vue de la Sagesse. Plus encore que dans les Proverbes, on est frappé par certaines expressions qui annoncent une théologie de la Trinité la Sagesse est à la fois intimement unie à Dieu et distincte de lui, caractéristiques que l’on appliquera plus tard soit à la personne du Verbe, soit à celle de l’Esprit. Cf. Jn 1.1. Pour l’auteur cependant, la Sagesse dont il a déjà parlé en 1.1-10 ; 4.11-19 ; 6.18-36 ; 14.20. 15.10, est la Présence universelle de Dieu qui se révèle et croît en Israël, tel l’arbre de vie, et s’offre toujours à lui.
2 Dans l’assemblée du Très-Haut elle ouvre la bouche,
et devant sa Puissance elle montre sa fierté.
3 « Je suis issue de la bouche du Très-Hauti
et comme une vapeur j’ai couvert la terre.
i Le lat. ajoute « première-née avant toute créature, c’est moi qui fit lever dans le ciel la lumière indéfectible »; cf. Gn 1.3-5 ; Pr 8.22 ; Col 1.15.
4 J’ai habité dans les cieux
et mon trône était une colonne de nuée.j
j La colonne de nuée du désert, qui dans les textes anciens est la manifestation de la présence de Yahvé.
5 Seule j’ai fait le tour du cercle des cieux,
j’ai parcouru la profondeur des abîmes.
6 Dans les flots de la mer, sur toute la terre,
chez tous les peuples et toutes les nations, j’ai régné.k
k « j’ai régné » 1 Ms grec, syr., lat. ; « j’ai acquis » grec.
7 Parmi eux tous j’ai cherché le repos,
j’ai cherché en quel patrimoine m’installer.
8 Alors le créateur de l’univers m’a donné un ordre,
celui qui m’a créée m’a fait dresser ma tente,
Il m’a dit : « Installe-toi en Jacob,
en Israël reçois ton héritage. »
9 Avant les siècles, dès le commencement il m’a créée,
éternellement je subsisterai.
10 Dans la Tente sainte, en sa présence, j’ai officié ;l
c’est ainsi qu’en Sion je me suis établie,
l Pour Ben Sira, le culte du Temple de Jérusalem est encore une œuvre de la Sagesse, soit simplement parce que, comme l’ordre du monde, il est une expression de la perfection divine, soit plus précisément parce qu’il se trouve codifié dans la Loi, expression parfaite de la Sagesse, 24.23.
11 et que dans la cité bien-aimée j’ai trouvé mon repos,
qu’en Jérusalem j’exerce mon pouvoir.
12 Je me suis enracinée chez un peuple plein de gloire,
dans le domaine du Seigneur se trouve mon héritage.
13 J’y ai grandi comme le cèdre du Liban,
comme le cyprès sur le mont Hermon.
14 J’ai grandi comme le palmier d’Engaddi,m
comme les plants de roses de Jéricho,
comme un olivier magnifique dans la plaine,
j’ai grandi comme un platane.
m « Engaddi » 2 Mss grecs ; « sur les rivages » texte reçu.
15 Comme le cinnamome et l’acanthe j’ai donné du parfum,
comme une myrrhe de choix j’ai embaumé,
comme le galbanum, l’onyx, le labdanum,n
comme la vapeur d’encens dans la Tente.
n Après différents parfums naturels qui entrent dans la composition de l’huile d’onction, Ex 30.23, c’est à l’encens liturgique, Ex 30.34, que Ben Sira la compare. — Galbanum et labdanum sont des gommes-résines aromatiques comme la myrrhe ; l’onyx est une sécrétion de certains mollusques, utilisée dans la fabrication de l’encens.
16 J’ai étendu mes rameaux comme le térébinthe,
ce sont des rameaux de gloire et de grâce.
17 Je suis comme une vigne aux pampres gracieux,
et mes fleurs sont des produits de gloire et de richesse.
18 Je suis la mère du bel amour et de la crainte,
de la connaissance et de la sainte espérance.
À tous mes enfants je donne
des biens éternels, à ceux qu’il a choisis.o
o Le texte de ce verset est incertain ; on peut comprendre aussi « je suis donnée éternellement... » ou « je donne mes produits éternels à ceux... ». Le lat. remplace ce v. par « En moi est toute grâce de voie et de vérité, en moi toute espérance de vie et de force », cf. Jn 14.6.
19 Venez à moi, vous qui me désirez ;
et rassasiez-vous de mes produits.
20 Car mon souvenir est plus doux que le miel,
mon héritage plus doux qu’un rayon de miel.
21 Ceux qui me mangent auront encore faim,
ceux qui me boivent auront encore soif.
22 Celui qui m’obéit n’aura pas à en rougir
et ceux qui œuvrent par moi ne pécheront pas. »p
p Le lat. ajoute « ceux qui me mettent en lumière auront la vie éternelle », cf. Dn 12.3.
23 Tout cela n’est autre que le livre de l’alliance du Dieu Très-Haut,
la Loi promulguée par Moïse,
laissée en héritage aux assemblées de Jacob.
q Le discours terminé, l’auteur l’interprète la Sagesse a sa meilleure expression dans la Loi, comprise comme révélation de Dieu.
24 Ne cessez d’être forts dans le Seigneur,
attachez-vous à lui pour qu’il vous affermisse.
Le Seigneur tout-puissant est l’unique Dieu
et il n’y a pas d’autre sauveur que lui.r
r Le lat. ajoute un texte différent « Le Seigneur a promis à David son serviteur de faire surgir de lui un roi très vaillant qui siégera à jamais sur un trône de gloire », cf. 2 S 7.12 ; 1 Ch 28.5-7 ; Ps 89.37-38 ; 132.11 ; Lc 1.32-33.
25 C’est elle qui fait abonder la sagesse comme les eaux du Phisôn,s
comme le Tigre à la saison des fruits ;
s Dans tout ce passage, l’auteur songe au paradis terrestre et à ses quatre fleuves. Gn 2.10s, symboles de fertilité.
26 qui fait déborder l’intelligence comme l’Euphrate,
comme le Jourdain au temps de la moisson ;
27 qui fait couler la discipline comme le Nil,t
comme le Gihôn aux jours des vendanges.
t « couler ... comme le Nil » (ye’ôr) d’après syr. ; « briller ... comme une lumière » (’ôr) grec.
28 Le premier n’a pas fini de la connaître,
et de même le dernier ne l’a pas dépistée.
29 Car ses pensées sont plus vastes que la mer,
ses desseins plus grands que l’abîme.
30 Et moi,u je suis comme un canal issu d’un fleuve,
comme un cours d’eau conduisant au paradis.
u Le lat. et le ms grec 248 précisent erronément « Moi, la Sagesse. » En fait c’est l’auteur qui se met en scène pour définir son rôle de sage, cf. 33.16 s ; 39.1-11, tout en continuant à exploiter l’image des vv. précédents. la Sagesse est un vaste cours d’eau qui irrigue tout Israël, il est, lui, un canal qui en procède et qui arrose son modeste jardin.
31 J’ai dit : « Je vais arroser mon jardin,
je vais irriguer mes parterres. »
Et voici que mon canal est devenu fleuve
et le fleuve est devenu mer.v
v Par la grâce du Seigneur, les eaux deviennent de plus en plus abondantes. Le scribe devient un prophète qui s’adresse à toutes les générations, v. 33. L’auteur s’inspire probablement d’images analogues telles que Ez 47.1-12 ; Isa 11.9, etc.
32 Je ferai luire encore la discipline comme l’aurore,
je porterai au loin sa lumière.w
w Le lat. ajoute « Je pénétrerai les profondeurs de la terre, je visiterai tous ceux qui dorment et j’illuminerai ceux qui espèrent dans le Seigneur. » Comme les autres ajouts du lat. dans ce chapitre, celui-ci peut être compris du Christ, cf. 1 P 3.19, identifié à la Sagesse ; cependant il n’est pas absolument sûr que ces additions soient d’origine chrétienne ; les spéculations juives sur la Sagesse peuvent le plus souvent en rendre compte.
33 Je répandrai encore l’instruction comme une prophétie
et je la transmettrai aux générations futures.
34 Voyez : ce n’est pas pour moi seul que je travaille,
mais pour tous ceux qui la cherchent.