8 Quand il fut descendu de la montagne, des foules nombreuses se mirent à le suivre.
i Par ses miracles Jésus manifeste son pouvoir sur la nature, 8.23-27 ; 14.22-23, particulièrement sur la maladie, 8.1-4, 5-13, 14-15 ; 9.1-8, 20-22, 27-31 ; 14.34-36 ; 15.30 ; 20.29-34 et p ; Mc 7.32-37 ; 8.22-26 ; Lc 14.1-6 ; 17.11-19 ; Jn 5.1-16 ; 9.1-41 ; sur la mort, 9.23-26 ; Lc 7.11-17 ; Jn 11.1-44, et sur les démons, 8.29. Différents par leur simplicité des prodiges merveilleux de l’hellénisme et du judaïsme rabbinique, les miracles de Jésus s’en distinguent surtout par leur signification spirituelle et symbolique ils annoncent les châtiments, 21.18-22, et les dons de l’ère messianique, 11.5 ; 14.13-21 ; 15.32-39 ; Lc 5.4-11 ; Jn 2.1-11 ; 21.4-14, et inaugurent le triomphe de l’Esprit sur l’empire de Satan, 8.29, et les forces du Mal, péchés, 9.2, et maladies, 8.17. Accomplis parfois par pitié, 20.34 ; Mc 1.41 ; Lc 7.13, ils sont destinés surtout à confirmer la foi, 8.10 ; Jn 2.11. Aussi Jésus ne les opère-t-il qu’à bon escient, réclamant le secret pour ceux qu’il veut bien consentir, Mc 1.34, et se réservant de fournir plus tard le miracle décisif de sa propre Résurrection, 12.39-40. Ce pouvoir de guérison, Jésus l’a communiqué à ses apôtres en les envoyant prêcher le Royaume, 10.1, 8 ; c’est pourquoi a fait précéder les consignes de la mission, 10, par une série de dix miracles, 8-9, comme signes du missionnaire, Mc 16.17s ; Ac 2.22 ; cf. Ac 1.8.
5 Comme il était entré dans Capharnaüm, un centurion s’approcha de lui en le suppliant :
j Cette foi que Jésus requiert dès le début de son activité, Mc 1.15, et qu’il requerra sans cesse, est un mouvement de confiance et d’abandon par lequel l’homme renonce à compter sur ses pensées et sur ses forces, pour s’en remettre à la parole et à la puissance de Celui en qui il croit, Lc 1.20, 45 ; 21.25, 32. Jésus la demande en particulier à l’occasion de ses miracles, 8.13 ; 9.2, 22, 28-29 ; 15.28 ; Mc 5.36 ; 10.52 ; Lc 17.19, qui sont moins des actes de miséricorde que des signes de sa mission et du Royaume, 8.3, cf. Jn 2.11 ; aussi ne peut-il en accomplir s’il ne trouve pas cette foi qui doit leur donner leur vrai sens, 12.38-39 ; 13.58 ; 16.1-4. Exigeant un sacrifice de l’esprit et de tout l’être, la foi est un geste difficile d’humilité, 18.6, que beaucoup refusent de faire, particulièrement en Isräel, 8.10 ; 15.28 ; 27.42 ; Lc 18.8, ou ne font qu’à moitié, Mc 9.24 ; Lc 8.13. Les disciples eux-mêmes sont lents à croire, 8.26 ; 14.31 ; 16.8 ; 17.20, même après la Résurrection, 28.17 ; Mc 16.11-14 ; Lc 24.11, 25, 41. La foi la plus sincère de leur chef, le « Roc », 16.16-18, sera ébranlée par le scandale de la Passion, 26.69-75, mais elle en triomphera, Lc 22.32. Quand elle est forte, la foi opère des merveilles, 17.20 ; 21.21 ; Mc 16.17, obtient tout, 21.22 ; Mc 9.23, en particulier la rémission des péchés, 9.2 ; Lc 7.50, et le salut, dont elle est la condition indispensable, Lc 8.12 ; Mc 16.16, cf. Ac 3.16.
k À la suite de Isa 25.6 ; 55.1-2 ; Ps 22.27, etc., le judaïsme a souvent représenté les joies de l’ère messianique sous l’image d’un festin cf. 22.2-14 ; 26.29 ; Lc 14.15 ; Ap 3.20 ; 19.9.
l C’est-à-dire les Juifs, héritiers naturels des promesses. Ceux d’entre eux qui n’auront pas cru au Christ verront des païens prendre leurs places.
m Image biblique de la colère et du dépit des impies à l’égard des justes : cf. Ps 35.16 ; 37.12 ; 112.10 ; Jb 16.9. Elle décrit chez la damnation.
14 Étant venu dans la maison de Pierre, Jésus vit sa belle-mère alitée, avec la fièvre.
16 Le soir venu, on lui présenta beaucoup de démoniaques ; il chassa les esprits d’un mot, et il guérit tous les malades,
Il a pris nos infirmités et s’est chargé de nos maladies.n
n Pour Isaïe, le Serviteur a « pris » sur lui-même nos douleurs par sa propre souffrance expiatrice. entend que Jésus les a « prises » en les enlevant par ses guérisons miraculeuses. Cette interprétation, apparemment forcée, est en réalité d’une profonde vérité théologique ; c’est parce que Jésus, le « Serviteur », est venu prendre sur lui l’expiation des péchés, qu’il a pu soulager les hommes des maux corporels, qui sont la suite et la peine du péché.
18 Se voyant entouré de foules nombreuses, Jésus donna l’ordre de s’en aller sur l’autre rive.o
o La rive orientale du lac de Tibériade.
p Fils de l’homme. Ce sémitisme énigmatique revêt deux sens un sens ordinaire « homme », « être humain » (Ez 2.1, Ps 8.4) ; souvent simple équivalent de « je », « moi », parfois par modestie comme c’est le cas ici ; un sens théologique par référence à Dn 7.13-14, où le titre de Fils de l’homme désigne un être céleste, transcendant, peut-être angélique, voire divin, auquel est donné le Royaume de Dieu. Cet être céleste est plus clairement dessiné dans les livres apocryphes, 1 Henok 46-9 etc, et 4 Esdras 13, où il est identifié avec le Messie. Il s’agit donc d’une expression qui se réfère paradoxalement à la fois à l’humilité et à l’exaltation divine, ce qui en fait, malgré de possibles confusions, une clé christologique. Dans le NT l’expression ne se trouve que sur les lèvres de Jésus (4 exceptions Jn 12.34, Ac 7.56, Ap 1.13 ; 14.14), le plus souvent comme une référence à sa propre personne. Dans les Synoptiques cette formule se réfère (a) à la vie présente, terrestre de Jésus (par ex. ici) ; (b) aux prédictions de sa souffrance, mort et résurrection (par ex., Mc 8.31, 9.31, 10.33-34) ; (c) à sa venue comme Fils de l’homme dans un avenir glorieux (par ex. Mc 8.38, 13.26, 14.62 et par.).
21 Un autre des disciples lui dit : « Seigneur, permets-moi de m’en aller d’abord enterrer mon père. »
23 Puis il monta dans la barque, suivi de ses disciples.
28 Quand il fut arrivé sur l’autre rive, au pays des Gadaréniens,q deux démoniaques,r sortant des tombeaux, vinrent à sa rencontre, des êtres si sauvages que nul ne se sentait de force à passer par ce chemin.
q Ainsi nommés d’après la ville de Gadara, sise au sud-est du lac. La var. « Géraséniens » (Mc, Lc et Vulg. de Mt) dérive du nom d’une autre ville, Gérasa ou peut-être Chorsia ; la var. « Gergéséniens » provient d’une conjecture d’Origène.
r Deux démoniaques, au lieu d’un chez Mc et Lc ; de même deux aveugles à Jéricho, 20.30, et deux aveugles à Bethsaïde, 9.27, miracle qui est un démarquage du précédent. Ce dédoublement des personnages peut être un procédé de style de Mt.
s En attendant le jour du Jugement, les démons jouissent d’une certaine liberté d’exercer leurs sévices sur la terre. Ap 9.5, ce qu’ils font de préférence en possédant les hommes, 12.43-45. Cette possession s’accompagne souvent d’une maladie, celle-ci étant, à titre de suite du péché, 9.2, une autre manifestation de l’emprise de Satan, Lc 13.16. Aussi les exorcismes de l’Évangile, qui apparaissent parfois comme ici à l’état pur, cf. 15.21-28 ; Mc 1.23-28 ; Lc 8.2, se font-ils souvent par mode de guérison, 9.32-34 ; 12.22-24 ; 17.14-18 ; Lc 13.10-17. Par son pouvoir sur les démons, Jésus décrit l’empire de Satan, 12.28 ; Lc 10.17-19 ; cf. Lc 4.6 ; Jn 12.31, et inaugure le règne messianique dont l’Esprit Saint est la promesse caractéristique, Isa 11.2 ; Jl 3.1s. Si les hommes refusent de le comprendre, 12.24-32, les démons, eux, le savent bien, ici et Mc 1.24 ; 3.11 ; Lc 4.41 ; Ac 16.17 ; 19.15. Ce pouvoir d’exorcisme, Jésus le communique à ses disciples en même temps que le pouvoir des guérisons miraculeuses, 10.1, 8, qui lui est connexe, 8.3 ; 4.24 ; 8.16 ; Lc 13.32.
t Pour un auditoire judéochrétien, un tel récit avait un aspect humoristique et un aspect pragmatique utilitaire, comme l’élimination de rats ou de vermine.