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Bible de Jérusalem

1 Maccabées 3.1-9.22

III. Judas Maccabée chef des Juifs (166-160 av. J.-C.)

Éloge de Judas Maccabée.

3 Judas, appelé Maccabée, son fils, se leva à sa place ; 2 tous ses frères et tous les partisans de son père lui prêtèrent leur concours. Ils menèrent le combat d’Israël avec entrain.

3 Il étendit le renom de son peuple,
revêtit la cuirasse comme un géant
et ceignit ses armes de guerre.
Il engagea mainte bataille,
protégeant le camp par son épée,
4 rival du lion dans ses hauts faits,
pareil au lionceau rugissant sur sa proie.
5 Il fit la chasse aux mécréants qu’il dépistait
et livra au feu les perturbateurs de son peuple.
6 Les mécréants furent abattus par la terreur qu’il inspirait,
tous les ouvriers d’iniquité furent bouleversés,
et la libération dans sa main fut menée à bon terme.
7 Il causa d’amers déboires à plus d’un roi,
réjouit Jacob par ses actions,
et sa mémoire sera en bénédiction à jamais.
8 Il parcourut les villes de Juda
pour en exterminer les impies,
et détourna d’Israël la Colère.
9 Son nom retentit jusqu’aux extrémités de la terre,
il a rassemblé ceux qui étaient perdus.

Premiers succès de Judas.i

10 Apollonius rassembla des païens et un fort contingent de Samarie pour faire la guerre à Israël.j

i Ces deux accrochages ne sont pas mentionnés par 2 M.

j D’après Josèphe, Apollonius, cf. 1.29, est gouverneur de Samarie.

11 Judas le sut et sortit à sa rencontre ; il le défit et le tua. Beaucoup tombèrent blessés à mort et le reste s’enfuit. 12 On ramassa les dépouilles ; Judas s’attribua l’épée d’Apollonius et s’en servit au combat tous les jours de sa vie. 13 À la nouvelle que Judas avait rassemblé autour de lui un assemblage de croyants et de gens de guerre, Séron, général de l’armée de Syrie, 14 se dit à lui-même : « Je me ferai un nom et me couvrirai de gloire dans le royaume. Je combattrai Judas et ses hommes, qui méprisent les ordres du roi. » 15 Il partit donc à son tour et avec lui monta une puissante armée d’impies pour l’aider à tirer vengeance des Israélites. 16 Comme il approchait de la montée de Bethoron, Judas sortit à sa rencontre avec une poignée d’hommes. 17 À la vue de l’armée qui s’avançait contre eux, ceux-ci dirent à Judas : « Comment pourrons-nous, en si petit nombre, lutter contre une si forte multitude ? Nous sommes exténués, n’ayant rien mangé aujourd’hui. » 18 Judas répondit : « Qu’une multitude tombe aux mains d’un petit nombre est chose facile, et il est indifférent au Cielk d’opérer le salut au moyen de beaucoup ou de peu d’hommes,

k « au Ciel » mss grecs, Vet. Lat. ; « au Dieu du ciel » le reste du grec. Vulg., mais, par respect, évite systématiquement le mot « Dieu » vv. 19, 50, 60 ; 4.10, 40, 55 ; 9.46 ; 12.15 ; cf. 2 M 9.4.

19 car la victoire à la guerre ne tient pas à l’importance de la troupe : c’est du Ciel que vient la force. 20 Ceux-ci viennent contre nous, débordant d’insolence et d’iniquité, pour nous exterminer, nous, nos femmes et nos enfants, et nous dépouiller. 21 Mais nous, nous combattons pour nos vies et pour nos lois, 22 et lui les brisera devant nous, ne craignez rien de leur part. »l

l Exhortation dans le style deutéronomique, cf. par exemple Dt 1.29s ; 3.18-22 ; 9.1s, etc. La littérature juive de cette époque s’inspire volontiers des récits sur les Patriarches et la conquête. — Le v. 21 résume parfaitement le ressort profond des premières luttes maccabéennes.

23 Lorsqu’il eut cessé de parler, il bondit sur eux à l’improviste. Séron et son armée furent écrasés. 24 Ils les poursuivirent à la descente de Bethoron jusqu’à la plaine. Huit cents hommes environ succombèrent et le reste s’enfuit au pays des Philistins.m

m Expression archaïsante pour désigner la zone maritime, cf. 15.38.

25 Judas et ses frères commencèrent à être redoutés et l’effroi fondit sur les nations d’alentour. 26 Son nom parvint jusqu’au roi et toutes les nations commentaient les batailles de Judas.

Préparatifs d’Antochius contre la Perse et la Judée. Régence de Lysias.n

27 Lorsqu’il entendit ces récits, Antiochus entra dans une grande fureur ; il envoya rassembler toutes les forces de son royaume, une armée très puissante.

n Vues générales propres à l’auteur de 1 M, qui met le problème juif au centre des préoccupations d’Antiochus IV. En fait, la campagne d’Asie n’était pas seulement destinée à remettre à flot ses finances, mais aussi à reconquérir l’Arménie.

28 Il ouvrit son trésor, distribua la solde aux troupes pour un an et leur enjoignit d’être prêtes à toute éventualité. 29 Il s’aperçut alors que l’argent manquait dans ses coffres et que les tributs de la province avaient diminué, par suite des dissensions et du fléau qu’il avait déchaînés dans le pays en supprimant les lois qui existaient de toute antiquité. 30 Il craignit de ne pas avoir, comme il était arrivé plus d’une fois, de quoi fournir aux dépenses et aux largesses qu’il faisait auparavant d’une main prodigue, surpassant en cela les rois ses prédécesseurs. 31 L’anxiété s’emparait de son âme, il décida de gagner la Perse pour lever les tributs des provinces et ramasser beaucoup d’argent. 32 Il laissa Lysias, homme de la noblesse et de la famille royale, à la tête de ses affaires depuis l’Euphrate jusqu’à la frontière de l’Égypte,o

o C’est-à-dire la Transeuphratène de l’époque perse. Lysias (également connu par l’historien Polybe) était donc le chef du stratège de Cœlé-Syrie et de Phénicie, cf. 2 M 10.11, ainsi que des stratèges de Haute-Syrie. — L’expression « de la famille royale" correspond à « parent du roi », 2 M 11.1, titre honorifique le plus élevé à la cour séleucide, cf. 10.89.

33 et le chargea de la tutelle d’Antiochus, son fils,p jusqu’à son retour.

p Le futur Antiochus V Eupator, 6.17, dont la tutelle sera confiée deux ans plus tard à Philippe, l’ami intime du roi, 6.14 ; 2 M 9.29.

34 Il lui confia la moitié de ses troupes, avec les éléphants, et lui dicta toutes ses volontés, en particulier au sujet des habitants de la Judée et de Jérusalem : 35 il devait envoyer contre eux une armée pour extirper et faire disparaître la force d’Israël et le petit reste de Jérusalem, effacer leur souvenir de ce lieu, 36 établir des fils d’étrangers sur tout leur territoire et distribuer leur pays en lots.q

q Les Juifs devaient être exterminés ou vendus comme esclaves, 2 M 8.9-11, et leurs terres confisquées puis redistribuées en partie à des étrangers, cf. Dn 11.39. La Judée devenait donc « terre royale », louée à des colons sous forme de lots, suivant l’usage séleucide. Les redevances qu’on en exigeait constituaient un impôt plus lourd que l’ancien tribut.

37 Le roi prit avec lui la moitié restante des troupes et partit d’Antioche, capitale de son royaume, l’an cent quarante-sept ; il traversa l’Euphrate et poursuivit sa marche à travers les provinces d’en haut.r

r Cette expression désigne le plateau iranien, cf. 6.1 ; 2 M 9.25. — On est au printemps 165.

Gorgias et Nikanor conduisent en Judée l’armée de Syrie.

38 Lysias se choisit Ptolémée fils de Dorymène, Nikanor et Gorgias, personnages puissants d’entre les amis du roi.s

s Ptolémée est le stratège de la province de Cœlé-Syrie et Phénicie, 2 M 8.8. Gorgias est un stratège au sens militaire du mot, et c’est lui qui dirigea les opérations, bien que Nikanor eût préséance sur lui comme « premier ami » du roi, 2 M 8.9. On retrouvera ce dernier comme chef de guerre cinq ans plus tard, 7.26.

39 Il envoya avec eux quarante mille hommes de pied et sept mille cavaliers pour envahir le pays de Juda et le dévaster suivant l’ordre du roi. 40 S’étant mis en marche avec toute leur armée, ils arrivèrent près d’Emmaüs dans le Bas-Pays et y dressèrent leur camp.

41 Les trafiquants de la province l’apprirent par la renommée ; ils prirent avec eux de l’or et de l’argent en grande quantité ainsi que des entravest et s’en vinrent au camp pour acheter comme esclaves les Israélites. Un contingent d’Idumée et du pays des Philistins se joignit à eux.u

t « entraves » pedas conj. d’après syr. et Josèphe ; « enfants » paidas grec, lat.

u « Idumée » conj. ; le grec et les versions ont « Syrie » qui doit traduire l’hébr. `aram lu au lieu de ’edom, selon une confusion fréquente, cf. Jg 3.8 ; 2 S 8.12 ; 1 R 11.25 ; 2 R 16.6, etc. — « pays des Philistins », Littéralement « terre des étrangers », en grec allophyles, mot qui dans les LXX désigne les Philistins, cf. 5.68.

42 Judas et ses frères virent que le malheur s’aggravait et que des armées campaient sur leur territoire. Ils connurent aussi la consigne donnée par le roi de livrer leur peuple à une destruction radicale. 43 Ils se dirent alors les uns aux autres : « Relevons notre peuple de sa ruine et luttons pour notre peuple et notre saint lieu. » 44 On convoqua l’assemblée pour se préparer à la guerre, se livrer à la prière et implorer pitié et miséricorde.

45 Or Jérusalem était dépeuplée comme un désert,
de ses enfants nul n’y entrait, nul n’en sortait.
Le sanctuaire était foulé aux pieds
et les fils d’étrangers logeaient dans la Citadelle,
devenue un caravansérail pour les nations.
La joie avait disparu de Jacob
et l’on n’entendait plus ni flûte ni lyre.

Réunion des Juifs à Maspha.

46 Ils se rassemblèrent donc et vinrent à Masphav en face de Jérusalem, car il y avait eu jadis à Maspha un lieu de prière pour Israël.

v La Miçpa biblique, à 13 km au nord de Jérusalem, lieu traditionnel de rassemblement pour Israël, Jg 20.1 ; 1 S 7.5 ; 10.17 ; cf. Jr 40.5.

47 Ils jeûnèrent ce jour-là, revêtirent des sacs, répandirent de la cendre sur leur tête et déchirèrent leurs vêtements. 48 Ils déployèrent le livre de la Loi pour y découvrir ce que les païens demandaient aux représentations de leurs faux dieux.w

w 2 M 8.23 éclaire ce passage. Comme il n’y a plus de prophètes, on ouvre au hasard le livre de la Loi pour y trouver une réponse divine sur l’opportunité et l’issue de la lutte.

49 Ils apportèrent les ornements sacerdotaux, les prémices et les dîmes, ils firent paraître les Naziréens qui avaient accompli la période de leur vœu.x

x Les Naziréens devaient, au terme de leur vœu, offrir un sacrifice dans le Temple, Nb 6.13. Mais le Temple est profané et inaccessible.

50 Ils disaient en élevant la voix vers le Ciel : « Que faire de ces gens-là et où les emmener ? 51 Ton lieu saint, on l’a foulé aux pieds et profané, tes prêtres sont dans le deuil et l’humiliation, 52 et voici que les nations se sont liguées contre nous afin de nous faire disparaître. Tu connais leurs desseins à notre égard. 53 Comment pourrons-nous résister en face d’elles si tu ne viens pas à notre secours ? » 54 Ils firent ensuite sonner les trompettes et poussèrent de grands cris.

55 Après cela, Judas institua des chefs du peuple, chefs de milliers, de centaines, de cinquantaines et de dizaines.y

y Ces divisions ne se retrouvent que partiellement dans les armées hellénistiques et Juda s’inspire surtout de l’organisation judiciaire et militaire ancienne, Ex 18.21 ; Nb 31.48 ; Dt 1.15 ; 2 S 18.1 ; 2 R 1.9-14. Les Esséniens conserveront la même organisation.

56 À ceux qui étaient en train de bâtir une maison, ou qui venaient de se fiancer, de planter une vigne, ou qui avaient peur, il dit de s’en retourner chacun à sa demeure comme le permettait la Loi. 57 La colonne se mit alors en marche et vint camper au sud d’Emmaüs.

58 « Équipez-vous, dit Judas, soyez des braves, tenez-vous prêts à combattre demain ces nations qui sont massées contre nous pour notre ruine et celle de notre sanctuaire, 59 car il vaut mieux pour nous mourir dans la bataille qu’être spectateurs des malheurs de notre nation et de notre lieu saint. 60 Ce que le Ciel aura voulu, il l’accomplira. »

La bataille d’Emmaüs.

4 Gorgias prit avec lui cinq mille hommes de pied et mille cavaliers d’élite, détachement qui partit de nuit 2 en vue de faire irruption dans le camp des Juifs et de les frapper à l’improviste. Les gens de la Citadelle lui servaient de guides. 3 Ce qu’ayant entendu, Judas lui-même se mit en marche avec ses braves pour battre l’armée royale qui était à Emmaüs, 4 pendant que ses effectifs se trouvaient encore dispersés en dehors du camp. 5 Gorgias, de son côté, étant arrivé de nuit au camp de Judas, n’y trouva personne et se mit à chercher les Juifs dans les montagnes car, disait-il : « Ils fuient devant nous. » 6 Au petit jour, Judas parut dans la plaine avec trois mille hommes. Seulement, ceux-ci n’avaient pas les armures ni les épées qu’ils auraient voulues. 7 Ils apercevaient le camp des païens, puissant et fortifié, une cavalerie qui l’environnait, bref, des gens qui avaient l’expérience de la guerre.

8 Judas dit à ses hommes :z « Ne craignez pas cette multitude et ne redoutez pas leur attaque.

z Cf. 3.22. L’exhortation avant le combat, prescrite par Dt 20.2, semble avoir été de règle dans l’Antiquité ; cf. encore 2 M 8.16-20.

9 Rappelez-vous que nos pères furent sauvés à la mer Rouge quand Pharaon les poursuivait avec une armée, 10 et maintenant crions vers le Ciel : s’il veut de nous, il se souviendra de son alliance avec nos pères et il écrasera aujourd’hui cette armée que voici devant nous. 11 Alors toutes les nations reconnaîtront qu’il y a quelqu’un qui rachète et sauve Israël. »

12 Les étrangers levèrent leurs regards et, voyant les Juifs marcher contre eux,

13 ils sortirent du camp pour livrer bataille. Les soldats de Judas sonnèrent de la trompette 14 et engagèrent le combat. Les nations furent écrasées, elles s’enfuirent vers la plaine, 15 mais tous les ennemis qui se trouvaient à l’arrière tombèrent sous l’épée. La poursuite atteignit Gazaraa et les plaines de l’Idumée, d’Azôtos et de Iamnia : trois mille hommes environ y succombèrent.

a C’est Gézer, Jos 10.33, qui sera attaquée par Judas, 2 M 10.32, mais ne sera prise que par Simon qui en fera une résidence pour son fils (Jean Hyrcan), 13.43s ; 14.7, 34 ; 16.1, 21.

16 Revenu de la chasse qu’il venait de donner à la tête de sa troupe, 17 Judas dit au peuple : « Ne soyez pas avides de butin, car un autre combat nous menace. 18 Gorgias et son détachement sont dans la montagne tout près de nous. Tenez tête maintenant à nos ennemis et combattez-les ; après cela vous ramasserez le butin en toute sécurité. » 19 Judas achevait à peine sa phrase qu’une section se fit voir épiant du haut de la montagne. 20 Elle constata que les leurs avaient dû fuir et que le camp avait été la proie des flammes : la fumée que l’on apercevait le manifestait encore. 21 Un tel spectacle les remplit de panique. Voyant en outre dans la plaine l’armée de Judas prête au combat, 22 ils s’enfuirent tous au pays des Philistins. 23 Judas revint alors pour le pillage du camp. On emporta beaucoup d’or et d’argent monnayés, des étoffes teintes de pourpre violette et de pourpre marineb et autres grandes richesses.

b La « pourpre marine », d’un rouge foncé, est celle de Tyr. C’est la « pourpre écarlate » d’Ex 25-29.

24 Les Juifs, à leur retour, louaient et bénissaient le Ciel en disant : « Il est bon et son amour est éternel ! »c

c Littéralement « sa miséricorde est éternelle ». Sans doute chantaient-ils le Ps 118 :, cf. 2 Ch 20.21.

25 Une insigne délivrance s’est opérée ce jour-là en Israël.

26 Ceux des étrangers qui avaient échappé vinrent annoncer à Lysias tout ce qui était arrivé.d

d Cf. 3.37 et 2 M 11.21. Nous sommes au début de 164.

27 Cette nouvelle le bouleversa et lui fit perdre courage, car les affaires avec Israël n’avaient pas été comme il aurait voulu et le résultat était le contraire de ce qu’avait ordonné le roi.

Première campagne de Lysias.

28 L’année suivante, pourtant, Lysias rassembla soixante mille hommes d’élite et cinq mille cavaliers afin de venir à bout des Juifs. 29 Ils vinrent en Idumée et campèrent à Bethsour.e Judas se porta à leur rencontre avec dix mille hommes.

e L’armée avait contourné la Judée par le pays plat. La citadelle séleucide de Bethsour, cf. 6.7, limite sud de la Judée, est à 28 km de Jérusalem, sur la route d’Hébron.

30 Quand il vit cette armée puissante, il pria en ces termes : « Tu es béni, sauveur d’Israël, toi qui as brisé l’attaque du puissant guerrier par la main de ton serviteur David et qui as livré le camp des Philistins aux mains de Jonathan, fils de Saül, et de son écuyer. 31 Enferme de la même façon cette armée entre les mains d’Israël, ton peuple ; qu’ils ne retirent que honte de leurs forces et de leur cavalerie. 32 Sème la panique dans leurs rangs, fais fondre l’assurance qu’ils mettent dans leur force et qu’ils soient ébranlés par leur défaite. 33 Renverse-les sous l’épée de ceux qui t’aiment, et que te louent dans les hymnes tous ceux qui connaissent ton nom ! » 34 On en vint aux mains et il tomba de l’armée de Lysias jusqu’à cinq mille hommes, et cela dans le corps à corps. 35 Voyant la déroute de son armée et l’intrépidité des soldats de Judas qui étaient prêts à vivre ou à mourir courageusement, Lysias reprit le chemin d’Antiochef où il recruta des étrangers pour revenir en Judée avec plus de troupes qu’auparavant.

f L’auteur semble ignorer les tractations qui suivirent ce choc décisif entre Judas et l’importante armée de Lysias, 2 M 11.13s.

Purification du Temple et dédicace.g

36 Alors Judas et ses frères dirent : « Voici nos ennemis écrasés, allons purifier le sanctuaire et faire la dédicace. »

g Centre de la vie religieuse, cadre exigé pour l’observation intégrale de la Loi, le Temple est l’une des préoccupations essentielles des révoltés, cf. 2.7 ; 3.43 ; 2 M 13.10. Pillé et profané par les Gentils, 1.21s, 54, il est purifié et consacré à nouveau au lendemain des premières victoires. La mort d’Antiochus Épiphane, que notre auteur place à tort après les expéditions contre les peuples voisins, chap. 5, n’y fut sans doute pas étrangère. — L’idée de la sainteté du Temple sera particulièrement mise en relief dans le second livre, 2 M 3.12 ; 5.15 ; 13.10 ; 15.18, 37.

37 Toute l’armée s’assembla et ils montèrent au mont Sion. 38 Ils virent là le lieu saint désolé, l’autel profané, les portes brûlées, des arbrisseaux poussés dans les parvis comme dans un bois ou sur une montagne, et les chambres détruites. 39 Ils déchirèrent alors leurs vêtements, menèrent un grand deuil et répandirent de la cendre sur leur tête.

40 Ils tombaient ensuite la face contre terre et, au signal donné par les trompettes, ils poussaient des cris vers le Ciel.

41 Judas donna l’ordre à des hommes de combattre ceux qui étaient dans la Citadelle jusqu’à ce qu’il eût nettoyé le sanctuaire. 42 Puis il choisit des prêtres sans tache et zélés pour la Loi, 43 qui purifièrent le sanctuaire et reléguèrent en un lieu impur les pierres de la souillure.h

h Le mot grec traduit sans doute l’hébr. shiqquç, souvent employé pour désigner les idoles (les « horreurs », cf. Dt 29.16 ; Jr 4.1 ; 7.30 ; etc. ; Ez 5.11 ; 7.20 ; 11.18, etc.), et vise ici l’autel idolâtrique, cf. 1.54.

44 On délibéra sur ce qu’on devait faire de l’autel des holocaustes, qui avait été profané, 45 et il leur vint l’heureuse idée de le supprimer de peur qu’il ne leur devînt un sujet d’opprobre, du fait que les païens l’avaient souillé. Ils le démolirent 46 et en déposèrent les pierres sur la montagne de la Demeure en un endroit convenable, en attendant la venue d’un prophètei qui se prononcerait à leur sujet.

i Le livre revient plusieurs fois sur cette interruption de la prophétie, 9.27 ; 14.41 ; cf. déjà Ps 74.9 ; 77.9 ; Lm 2.9 ; Ez 7.26.

47 Ils prirent des pierres brutes, selon la Loi, et en bâtirent un autel nouveau sur le modèle du précédent. 48 Ils réparèrent le sanctuaire et l’intérieur de la Demeure et sanctifièrent les parvis. 49 Ayant fait de nouveaux ustensiles sacrés, ils introduisirent dans le Temple le candélabre, l’autel des parfums et la table. 50 Ils firent fumer l’encens sur l’autel et allumèrent les lampes du candélabre qui brillèrent à l’intérieur du Temple. 51 Ils déposèrent les pains sur la table, suspendirent les rideaux et achevèrent tout ce qu’ils avaient entrepris.

52 Le vingt-cinq du neuvième mois — nommé Kisleu — en l’an cent quarante-huit,j ils se levèrent au point du jour

j Décembre 164, troisième anniversaire du premier sacrifice offert à Zeus, cf. 1.59.

53 et offrirent un sacrifice légal sur le nouvel autel des holocaustes qu’ils avaient construit. 54 L’autel fut inauguré au son des hymnes, des cithares, des lyres et des cymbales, à la même époque et le même jour que les païens l’avaient profané. 55 Le peuple entier se prosterna pour adorer, puis il fit monter la louange vers le Ciel qui l’avait conduit au succès. 56 Huit jours durant, ils célébrèrent la dédicace de l’autel, offrant des holocaustes avec allégresse et le sacrifice de communion et d’action de grâces.

57 Ils ornèrent la façade du Temple de couronnes d’or et d’écussons, remirent à neuf les entrées ainsi que les chambres qu’ils pourvurent de portes. 58 Une grande joie régna parmi le peuple et l’opprobre infligé par les païens fut effacé.

59 Judas décida avec ses frères et toute l’assemblée d’Israël que les jours de la dédicace de l’autel seraient célébrés en leur temps chaque année pendant huit jours, à partir du vingt-cinq du mois de Kisleu, avec joie et allégresse.k

k Cette fête de la Dédicace, en hébreu Hanukka, est l’une des plus récentes du calendrier d’Israël, cf. Ex 23.14. On y chantait le Hallel (Ps 113—118), on y portait des rameaux verts et des palmes. Ces ressemblances avec la fête des Tentes sont soulignées par 2 M 1.9 ; 10.6. C’était d’ailleurs à la fête des Tentes que le Temple de Salomon avait été inauguré, 1 R 8.2, 62-66. On y allumait aussi des lampes, qui donnèrent bientôt à la fête son autre nom de « fête des lumières ». Ces lampes, symbole de la Loi, placées aux ouvertures de chaque maison, assurèrent le maintien et la popularité de la fête après la destruction du Temple. Elle a une grande importance dans 2 M, cf. les deux lettres préliminaires et 2 M 10.1-8. Elle est mentionnée dans Jn 10.22.

60 Ils bâtirent en ce temps-là tout autour du mont Sion des murs élevés et de fortes tours, de peur que les nations ne vinssent comme auparavant fouler ces lieux. 61 Judas y plaça une garnison pour le garder. Il fortifia Bethsourl pour que le peuple eût une forteresse face à l’Idumée.

l Le grec ajoute « pour le garder », dittographie.

Expédition contre les Iduméens et les Ammonites.m

5 Lorsque les nations d’alentour eurent appris que l’autel avait été reconstruit et le sanctuaire rétabli comme il était auparavant, elles en furent très irritées

m Ces campagnes contre les peuples qui entourent la Judée, rapportées au chap. 5, s’échelonnent du début jusqu’à l’automne de 163, donc après la mort d’Antiochus Épiphane. Les raids menés l’année précédente contre Joppé et Jamnia, 2 M 12.1-9, en furent le prélude.

2 et décidèrent d’exterminer les descendants de Jacob qui vivaient au milieu d’elles ; elles se mirent à opérer des meurtres et des expulsions parmi le peuple.

3 Judas fit la guerre aux fils d’Ésaü en Idumée, au pays d’Akrabattène,n parce qu’ils tenaient assiégés les Israélites. Il leur porta un grand coup, les refoula et s’empara de leurs dépouilles.

n « Idumée » nom grécisé d’Édom, le pays des « Fils d’Ésaü », cf. Nb 20.23. — « Akrabattène » district d’Akrabatta, sans doute l’actuel Aqrabeh, au sud-est de Sichem.

4 Il se souvint aussi de la méchanceté des fils de Baïâno qui étaient pour le peuple un piège et un traquenard par les embûches qu’ils lui dressaient sur les chemins.

o Tribu semi-nomade, qui rançonnait peut-être les voyageurs sur la route de Jérusalem à Jéricho.

5 Les ayant bloqués dans leurs tours, il les assiégea et les voua à l’anathème ; il mit le feu à ces tours et les brûla avec tous ceux qui s’y trouvaient. 6 Puis il passa chez les Ammonites, chez qui il trouva une forte troupe et un peuple nombreux que commandait Timothée. 7 Il leur livra de nombreux combats ; ils furent écrasés devant lui et il les tailla en pièces.

8 Il prit Iazèr et les villages de son ressort, et revint en Judée.

Préliminaires des campagnes en Galilée et en Galaad.

9 Les nations en Galaadp se coalisèrent contre les Israélites qui habitaient sur leur territoire afin de les exterminer, et ceux-ci se réfugièrent dans la forteresse de Dathéma.

p Galaad était primitivement le pays au sud du Yabboq, mais il comprit bientôt la région entre Yabboq et Yarmuk et, à l’époque hellénistique, le plateau syrien, au nord du Yarmuk, où les Juifs comptaient de nombreuses colonies.

10 Ils envoyèrent à Judas et à ses frères des lettres ainsi conçues : « Les nations qui nous entourent sont coalisées contre nous pour nous exterminer. 11 Elles se disposent à venir prendre la forteresse où nous avons trouvé un refuge et c’est Timothée qui commande leur armée. 12 Viens donc maintenant nous arracher de leurs mains, car déjà nombre d’entre nous ont succombé. 13 Tous nos frères établis au pays de Tobieq ont été mis à mort, on a emmené en captivité leurs femmes et leurs enfants, pris leurs biens et fait périr en ces lieux environ un millier d’hommes. »

q La région entre Amman et le Jourdain, gouvernée par la famille juive des Tobiades, cf. Ne 2.10 ; 6.17s ; 13.8. — Cet épisode cruel explique peut-être le raid de représailles ordonné par Judas, 2 M 12.17s.

14 On était encore à lire ces lettres, quand arrivèrent de la Galilée d’autres messagers, les vêtements déchirés, porteurs des mêmes nouvelles : 15 « De Ptolémaïs,r disaient-ils, de Tyr et de Sidon, on s’est coalisé contre nous avec toute la Galilée des Nations pour nous exterminer. »

r Ptolémaïs est le nom donné à Akko (cf. Jos 19.30 ; Jg 1.31) par Ptolémée II en 261 av. J.-C.

16 Lorsque Judas et le peuple eurent entendu ces discours, ils tinrent une grande assemblée pour délibérer sur ce qu’ils devaient faire en faveur de leurs frères en butte à la tribulation et aux attaques des ennemis. 17 Judas dit à son frère Simon : « Choisis-toi des hommes et va délivrer tes frères qui sont en Galilée ; moi et Jonathan, mon frère, nous irons en Galaaditide. » 18 Il laissa en Judée Joseph, fils de Zacharie, et Azarias, chef du peuple, avec le reste de l’armée pour faire la garde. 19 Il leur donna cet ordre : « Gouvernez ce peuple et n’engagez pas de combat avec les nations jusqu’à notre retour. » 20 À Simon furent assignés trois mille hommes pour aller en Galilée, à Judas huit mille hommes pour la Galaaditide.

Expéditions en Galilée et en Galaaditide.

21 Étant donc allé dans la Galilée, Simon livra plusieurs combats aux païens, qui furent balayés devant lui ; 22 il les poursuivit jusqu’à la porte de Ptolémaïs. Ils avaient laissé sur le terrain environ trois mille hommes dont il recueillit les dépouilles. 23 Il prit avec lui les Juifs de Galilée et d’Arbattas avec leurs femmes, leurs enfants et tout leur avoir, et les emmena en Judée au milieu d’une joie débordante.

s La région d’Arbatta (la transmission textuelle du toponyme n’est pas sûre) doit être la Narbatène de Josèphe, entre Galilée et Samarie. — L’auteur de 2 M, qui ne s’intéresse qu’à Judas, ne dit rien de cette campagne de Galilée.

24 Cependant Judas Maccabée et Jonathan, son frère, passaient le Jourdain et marchaient trois jours dans le désert. 25 Ils rencontrèrent les Nabatéenst qui les accueillirent avec des sentiments pacifiques et leur racontèrent tout ce qui était arrivé à leurs frères en Galaaditide

t Ce sont les « Arabes » de 2 M 5.8 ; 12.10, et Jonathan conservera leur amitié, 9.35, après un violent engagement, cf. 2 M 5.11s. Leur centre était Pétra, mais au siècle suivant ils seront les maîtres d’une grande partie du plateau transjordanien et même quelque temps de Damas. Ici, nous sommes en présence de caravaniers, venant sans doute de Bosora (v. 28, l’actuelle Boçra, en Syrie méridionale, où confluent les pistes du désert) et du Hauran, où ils avaient été témoins des faits rapportés à Judas.

26 et comment nombre d’entre eux se trouvaient enfermés à Bosora, à Bosor, en Aléma, à Chaspho, à Maked et à Karnaïn,u qui sont toutes de fortes et grandes villes ;

u Le nom de presque tous ces bourgs subsiste, à peine déformé, dans la toponymie du Hauran et du Golân.

27 qu’il y en avait aussi d’enfermés dans les autres villes de Galaaditide et que leurs ennemis avaient résolu pour demain d’attaquer ces places fortes, de s’en emparer et d’y exterminer en un seul jour tous ceux qui s’y trouvent.

28 Brusquement, Judas fit prendre à son armée le chemin de Bosora à travers le désert. Il prit la ville et, après avoir passé tous les mâles au fil de l’épée et ramassé tout le butin, il la livra aux flammes. 29 Il en repartit nuitamment et l’on marcha jusqu’aux abords de la forteresse.v

v Dathéma, v. 9, site non identifié à l’ouest de Boçra.

30 Au point du jour, en levant les yeux ils aperçurent une foule innombrable dressant des échelles et des machines pour s’emparer de la place ; déjà on attaquait. 31 Voyant que l’attaque était commencée et qu’une clameur immense mêlée au son des trompettes montait de la ville vers le ciel, 32 Judas dit aux hommes de son armée : « Combattez aujourd’hui pour vos frères ! » 33 Il les fit avancer en trois corps sur les arrières de l’ennemi. Les trompettes sonnèrent et les invocations retentirent. 34 Les troupes de Timothée, reconnaissant que c’était Maccabée, prirent la fuite à son approche. Celui-ci leur infligea une grande défaite, car ils laissèrent ce jour-là près de huit mille hommes sur le terrain. 35 S’étant ensuite retourné sur Aléma,w il l’attaqua, la prit, et, après avoir tué tous les mâles et ramassé le butin, il la livra aux flammes.

w « Aléma » 1 Ms grec et cf. v. 7 ; la tradition manuscrite est hésitante.

36 De là il alla s’emparer de Chaspho, de Maked, de Bosor et des autres villes de Galaaditide. 37 Après ces événements Timothée rassembla une autre armée et vint camper en face de Raphôn, de l’autre côté du torrent. 38 Judas envoya reconnaître le camp et on lui fit ce rapport : « Auprès de ce chef se sont groupés tous les païens qui nous entourent, formant une armée extrêmement nombreuse 39 où des Arabes ont été enrôlés comme auxiliaires ; ils sont campés au-delà du torrent, prêts à venir t’attaquer. » Judas alla à leur rencontre. 40 Mais Timothée dit aux commandants de son armée, au moment où Judas et sa troupe approchaient du cours d’eau : « S’il passe vers nous le premier, nous ne pourrons lui résister, parce qu’il aura un grand avantage sur nous ; 41 mais s’il a peur et campe de l’autre côté du fleuve, nous traverserons en face de lui et nous le vaincrons. »

42 Lorsqu’il arriva près du cours d’eau, Judas posta le long du torrent les scribes du peuplex et leur donna cette consigne : « Ne laissez personne dresser sa tente, mais que tous marchent au combat ! »

x Les officiers d’administration de l’armée, cf. Ex 5.6 ; Dt 20.5, 8s ; Jos 1.10 ; 3.2.

43 Il traversa le premier et marcha sur l’ennemi ; tout le peuple le suivit. Il écrasa devant lui tous les païens, qui jetèrent leurs armes et coururent chercher refuge dans le sanctuaire de Karnaïn.y

y C’est-à-dire « les deux cornes », attribut de l’Astarté locale, dont le temple, le Karnion de 2 M 12.26, tirait son nom. La capitale d’Og, roi du Bashân (Hauran), était Ashterot-Qarnayim. Gn 14.5 ; Jos 9.10, dont le nom est conservé par l’actuel Tell Ashtarah.

44 Les Juifs s’emparèrent d’abord de la ville, puis brûlèrent le temple avec tous ceux qui étaient dedans. Karnaïn fut renversée et désormais on ne put résister à Judas.

45 Judas rassembla tous les Israélites qui étaient en Galaaditide, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, avec leurs femmes, leurs enfants et leurs bagages, une troupe immense en route vers le pays de Juda. 46 Ils arrivèrent à Éphrôn, ville importante et très forte située sur le chemin. Comme on ne pouvait la tourner ni sur la droite ni sur la gauche, il ne restait qu’à la traverser. 47 Les habitants leur refusèrent le passage et bloquèrent les portes avec des pierres. 48 Judas leur envoya un message conçu en ces termes pacifiques : « Nous allons traverser votre pays pour aller dans le nôtre ; nul ne vous fera de mal, nous ne ferons que passer en piétons. » Mais ils refusèrent de lui ouvrir. 49 Judas fit alors publier dans les rangs que chacun gardât la position où il était. 50 Les braves de l’armée prirent position. Judas fit donner l’assaut tout le jour et toute la nuit et la ville tomba en son pouvoir. 51 Il fit passer tous les mâles au fil de l’épée, détruisit la ville jusqu’aux fondements, en ravit les dépouilles et traversa la place sur le corps des tués. 52 Ils franchirent le Jourdain pour entrer dans la Grande Plaine en face de Bethsân. 53 Judas s’employait à rallier les traînards et à encourager le peuple tout le long de la route jusqu’à son arrivée au pays de Juda. 54 Ils gravirent le mont Sion avec joie et allégresse et offrirent des holocaustesz parce qu’ils étaient revenus en paix sans perdre aucun des leurs.

z Lors des fêtes de la Pentecôte (mi-juin 163), cf. 2 M 12.31.

Revers de Iamnia.

55 Pendant que Judas et Jonathan étaient au pays de Galaad, et Simon, son frère, en Galilée devant Ptolémaïs, 56 Joseph, fils de Zacharie, et Azarias, chefs de l’armée, apprirent leurs gestes de bravoure et les combats qu’ils avaient livrés, 57 et ils se dirent : « Faisons-nous un nom, nous aussi, et allons combattre les nations qui sont autour de nous. » 58 Ils donnèrent des ordres aux forces qu’ils commandaient et marchèrent sur Iamnia.a

a Nom grécisé de Yabné ou Yabnéel, Jos 15.11 ; 2 Ch 26.6, au sud de Jaffa, chef-lieu de la zone maritime, 10.69 ; 15.38, 40 cf. 2 M 12.8.

59 Gorgiasb et ses hommes sortirent de la ville à leur rencontre pour leur livrer combat.

b Cf. 3.38. Il est maintenant stratège, c’est-à-dire préfet de la zone maritime et de l’Idumée, cf. 2 M 12.32.

60 Joseph et Azarias furent mis en fuite et poursuivis jusqu’aux frontières de la Judée. Il périt ce jour-là environ deux mille hommes du peuple d’Israël. 61 Ce fut une grande déroute parmi le peuple, parce qu’ils n’avaient pas écouté Judas ni ses frères, s’imaginant qu’ils se signaleraient par leur bravoure. 62 Mais ils n’étaient pas de la race de ces hommes à qui il était donné de sauver Israël.

Succès en Idumée et en Philistie.

63 Le noble Judas et ses frères furent en grand honneur devant tout Israël et toutes les nations où l’on entendait prononcer leur nom ; 64 les foules se pressaient autour d’eux pour les acclamer. 65 Judas avec ses frères partit en guerre contre les fils d’Ésaü dans la région du midi ; il prit de force Hébron et les villages de son ressort, abattit ses fortifications et livra au feu les tours de son enceinte. 66 Ayant levé son camp, il partit pour gagner le pays des Philistins et traversa Marisa.c

c « Marisa » Vet. Lat., Josèphe et 2 M 12.35 ; « Samarie » grec et Vulg. Marisa, l’ancienne Maresha, Jos 15.44, capitale très hellénisée de l’Idumée, est sur la route qui va d’Hébron vers la Philistie.

67 Ce jour-là périrent dans le combat des prêtres qui voulaient y signaler leur bravoure en prenant part imprudemment à la lutte. 68 Judas se dirigea ensuite sur Azôtos,d district des Philistins, renversa leurs autels, livra au feu les images taillées de leurs dieux, y soumit les villes à un pillage en règle et revint au pays de Juda.

d Azot, l’Ashdod philistine, Jos 11.22, célèbre par son temple de Dagôn, 10.83s, désigne ici l’ensemble de l’ancienne Philistie. — Les objets consacrés aux « idoles de Iamnia », 2 M 12.40, proviennent du sac décrit ici.

Fin d’Antiochus Épiphane.e

6 Cependant le roi Antiochus parcourait les provinces d’en haut. Il apprit qu’il y avait en Perse une ville du nom d’Élymaïs,f fameuse par ses richesses, son argent et son or,

e Chronologiquement, cet épisode trouverait sa vraie place avant la Dédicace du Temple, 4.36. Le récit de la fin d’Antiochus Épiphane, rapporté de façon analogue par Polybe, est beaucoup plus sobre qu’en 2 M.

f En fait, on ne connaît pas de ville du nom d’Élymaïs, forme grecque de « Élam », Gn 10.22. L’Élymaïde est le pays autour de Suse, ancienne capitale de la Perse, Ne 1.1, et, au sens restreint, la région montagneuse au nord-est de cette ville.

2 avec un temple très richeg renfermant des pièces d’armure en or, des cuirasses et des armes qu’y avait laissées Alexandre, fils de Philippe, roi de Macédoine, qui régna le premier sur les Grecs.

g Le temple de Nanaia-Artémis, cf. 2 M 1.13.

3 Il vint donc tenter de prendre cette ville pour la piller, mais il n’y réussit pas, les gens de la ville ayant eu connaissance de la chose. 4 Ils s’opposèrent à lui les armes à la main. Il fut mis en fuite et quitta les lieux avec beaucoup de tristesse pour regagner Babylone. 5 Il était encore en Perse quand on vint lui annoncer la déroute des armées qui étaient entrées dans le pays de Juda. 6 Lysias, en particulier, s’étant avancé avec une forte armée, avait dû fuir devant les Juifs devenus plus redoutables grâce aux armes, aux ressources et à la quantité de dépouilles enlevées aux armées vaincues ; 7 ceuxci avaient renversé l’abomination construite par lui sur l’autel à Jérusalem et entouré leur lieu saint de hautes murailles comme auparavant, ainsi que Bethsour, une de ses villes. 8 À ces nouvelles, le roi, frappé de stupeur, fut en proie à une violente agitation : il se jeta sur sa couche et tomba malade de chagrin parce que les choses ne s’étaient pas passées selon ses désirs.h

h En réalité, Antiochus devait être mort avant ces événements, mais l’auteur de doit adapter son récit à la chronologie qu’il s’est fixée.

9 Il demeura là plusieurs jours, retombant sans cesse dans une profonde mélancolie. Lorsqu’il se vit sur le point de mourir, 10 il convoqua tous ses amis et leur dit : « Le sommeil s’est retiré de mes yeux et mon cœur est abattu par l’inquiétude. 11 Je me suis dit à moi-même : À quelle affliction suis-je réduit et en quel flot de tristesse suis-je maintenant plongé ? Moi qui étais bon et aimé au temps de ma puissance ! 12 Mais à cette heure je me souviens des maux dont j’ai été l’auteur à Jérusalem, quand je pris tous les objets d’argent et d’or qui s’y trouvaient et que j’envoyai exterminer sans motif les habitants de Juda. 13 Je reconnais donc que c’est à cause de cela que ces malheurs m’ont atteint et que je meurs d’une profonde affliction sur une terre étrangère ! »i

i En fait, la Perse relevait encore de l’empire séleucide. — Pour l’auteur de 1 M, c’est le pillage du Temple de Jérusalem, et non de celui d’Artémis comme pour l’auteur de 2 M, qui est sanctionné par la mort du roi. Mais l’un et l’autre lui prêtent les mêmes sentiments de repentir.

Avènement d’Antiochus V.

14 Il fit appeler Philippe,j un de ses amis, et l’établit sur tout le royaume.

j Ce Philippe qu’on retrouve en 6.55 et 2 M 9.29 est distinct du Philippe de 2 M 5.22 ; 8.8. Nommé régent et tuteur du jeune Antiochus, il reçoit en dépôt les insignes royaux destinés à ce dernier.

15 Il lui donna son diadème, sa robe et son sceau, pour qu’il prît soin de l’éducation et de l’entretien d’Antiochus, son fils, en vue du trône. 16 Le roi Antiochus mourut en ce lieu, l’année cent quarante-neuf.k

k En septembre ou octobre 164.

17 Lysias, à la nouvelle de sa mort, lui donna pour successeur son fils Antiochus qu’il avait élevé depuis son enfance et qu’il surnomma Eupator.

Le siège de la Citadelle de Jérusalem par Judas Maccabée.

18 Les gens de la Citadelle bloquaient Israël autour du sanctuaire et s’ingéniaient à lui faire du mal en toute occasion, et à soutenir les païens. 19 Résolu à les exterminer, Judas convoqua tout le peuple pour les assiéger. 20 On se rassembla et l’on mit le siège devant la Citadelle en l’an cent cinquante ;l on construisit des batteries et des machines.

l C’est-à-dire 163/162. Le siège de la Citadelle suit l’expédition en Idumée qui eut lieu après la Pentecôte 163, 1.33. L’auteur de 2 M n’en parle pas.

21 Mais des assiégés rompirent le blocus, et avec eux des Israélites impies, 22 qui allèrent chez le roi et lui dirent : « Jusqu’à quand tarderas-tu à nous rendre justice et à venger nos frères ?

23 Nous avons consenti volontiers à servir ton père, à nous conduire selon ses ordres et à observer ses édits ; 24 m à cause de cela nos concitoyens nous ont pris en aversion. Bien plus, ils ont tué tous ceux d’entre nous qui sont tombés entre leurs mains et ont pillé nos héritages.

m Au début du v. le texte (sauf quelques mss et Vulg.) ajoute « ils y ont mis le siège et », dittographie du v. 20.

25 Ils ont porté la main non seulement sur nous mais encore sur tous tes territoires.n

n « tes territoires" Vet. Lat. ; « leurs territoires" grec ; « nos territoires » Vulg.

26 Voici qu’ils investissent aujourd’hui la Citadelle de Jérusalem pour s’en rendre maîtres et qu’ils ont fortifié le sanctuaire et Bethsour. 27 Si tu ne te hâtes pas de les prévenir, ils en feront encore davantage et tu ne pourras plus les arrêter. »

Campagne d’Antiochus V et de Lysias. Bataille de Bethzacharia.

28 À ces mots, le roi se mit en colère et réunit tous ses amis, les chefs de son armée et les maréchaux.o

o C’est en fait Lysias qui agit Antiochus n’a que neuf ans. — « maréchaux », Littéralement « préposés aux rênes », titre non attesté ailleurs.

29 Des autres royaumes et des îles de la mer il lui vint aussi des troupes mercenaires. 30 Le nombre de ses forces s’éleva à cent mille fantassins, vingt mille cavaliers et trente-deux éléphants dressés au combat.

31 Ils vinrent par l’Iduméep et assiégèrent Bethsour qu’ils combattirent longtemps à l’aide de machines. Mais les autres, opérant des sorties, y mettaient le feu et luttaient vaillamment.

p Sans doute par la vallée du Térébinthe, 1 S 17.2, et Odollam, 2 M 12.38. Un premier accrochage aura lieu à Modîn, cf. 2 M 13.14.

32 Alors Judas partit de la Citadelle et vint camper à Bethzachariaq en face du camp royal.

q À 9 km au nord de Bethsour. Le nom est encore porté par un village.

33 Le roi, debout de grand matin, enleva sa troupe d’un bond sur le chemin de Bethzacharia où les armées prirent leur position de combat et sonnèrent de la trompette. 34 On exposa à la vue des éléphants du jus de raisin et de mûre pour les disposer à l’attaque. 35 Les bêtes furent réparties parmi les phalanges. Près de chaque éléphant on rangea mille hommes cuirassés de cottes de mailles et coiffés de casques de bronze, sans compter cinq cents cavaliers d’élite affectés à chaque bête. 36 Ceux-ci prévenaient tous les mouvements de la bête et l’accompagnaient partout sans jamais s’en éloigner.

37 Sur chaque éléphant, comme appareil défensif, une solide tour de bois était assujettie par des sangles, et dans chacune se trouvaient les trois guerriers combattantr sur les bêtes, en plus de leur cornac.

r « trois » conj. ; « trente (ou trente-deux) » grec et lat. L’original hébr. avait sans doute shalîshîm, « les trois (hommes qui montaient un char) », cf. Ex 14.7 ; 15.4 ; 2 R 10.25 ; le traducteur aura lu shelôshîm, « trente ». — « le cornac », Littéralement « l’hindou » expression qui avait fini par désigner la profession.

38 Quant au reste de la cavalerie, le roi la répartit sur les deux flancs de l’armée pour harceler l’ennemi et couvrir les phalanges.s

s Littéralement « pour harceler (l’ennemi) et protéger (ou serrer) dans les phalanges ». — Une partie du texte a pharanxin au lieu de phalanxin « pour serrer dans les gorges » (cf. v. 40 ?).

39 Lorsque le soleil frappa de ses rayons les boucliers d’or et d’airain,t les montagnes en furent illuminées et brillèrent comme des flambeaux allumés.

t C’est peut-être une réminiscence biblique, cf. 1 R 10.16.

40 Une partie de l’armée royale se déploya sur les hauts de la montagne et une autre en contrebas ; ils avançaient en formation solide et ordonnée. 41 Tous étaient troublés en entendant les clameurs de cette multitude, le bruit de sa marche et le fracas de ses armes, armée immense et forte s’il en fut. 42 Judas et sa troupe s’avancèrent pour engager le combat, et six cents hommes de l’armée du roi succombèrent. 43 Éléazar surnommé Auârân aperçut alors une des bêtes caparaçonnée d’un harnais royal et surpassant toutes les autres par la taille. S’imaginant que le roi était dessus, 44 il se sacrifiau pour sauver son peuple et acquérir un nom immortel.

u Littéralement « se donna lui-même », cf. Ga 1.4 ; Tm 2.6 ; Tt 2.14. — Il doit s’agir de l’action que 2 M 13.15 situe « aux environs de Modîn ».

45 Il eut la hardiesse de courir sur la bête au milieu de la phalange, tuant à droite et à gauche, si bien que, devant lui, les ennemis s’écartèrent de part et d’autre. 46 S’étant glissé sous l’éléphant, il le frappa par en dessous et le tua. La bête s’écroula à terre sur Éléazar qui mourut sur place. 47 Les Juifs, voyant les forces du royaume et l’impétuosité des troupes, se retirèrent devant elles.

Prise de Bethsour et siège du mont Sion par les Syriens.

48 L’armée royale monta au-devant des Juifs à Jérusalem, et le roi mit en état de siège la Judée et le mont Sion, 49 tandis qu’il faisait la paix avec ceux de Bethsour qui évacuèrent la ville : ils n’avaient pas de vivres pour soutenir un siège, car c’était l’année sabbatique accordée à la terre.v

v D’après Lv 25.1, l’année sabbatique excluait semailles et moissons. Elle avait commencé en automne 164 puisque cette disette date de l’automne 163.

50 Le roi prit Bethsour et y plaça une garnison pour la garder. 51 Il assiégea assez longtemps le sanctuaire, dressant contre lui batteries et machines, lance-flammes et balistes, scorpions pour flèches et frondes.w

w Les « scorpions » sont des arbalètes. Cette description de l’artillerie de siège séleucide est la plus complète que l’on connaisse.

52 Les assiégés aussi dressèrent des machines contre celles des assiégeants et l’on combattit longtemps. 53 Mais il n’y avait pas de vivres dans les dépôtsx parce que c’était la septième année et que les Israélites ramenés en Judée du milieu des nations avaient consommé les dernières réserves.

x « dans les dépôts » angeiois conj. d’après lat. ; « dans le sanctuaire » hagiois grec.

54 On laissa peu d’hommes dans le saint lieu parce qu’on était en proie à la famine ; les autres se dispersèrent chacun chez soi.

Le roi accorde aux Juifs la liberté religieuse.

55 Philippe, que le roi Antiochus avait de son vivant choisi pour élever Antiochus, son fils, en vue du trône, 56 était revenu de Perse et de Médie avec les troupes qui avaient accompagné le roi, et cherchait à s’emparer de la direction des affaires. 57 Lysias n’eut rien de plus pressé que de signifier le départ. Il dit au roi, aux généraux de l’armée et aux hommes : « Nous dépérissons chaque jour, notre ration se fait maigre et le lieu que nous assiégeons est bien fortifié. Du reste, les affaires du royaume nous attendent.

58 Donnons donc la main droite à ces hommes, faisons la paix avec eux et avec toute leur nation. 59 Accordons-leur de vivre suivant leurs coutumes comme auparavant, car c’est à cause des coutumes que nous avons abolies qu’ils se sont irrités et ont fait tout cela. »y

y Ce revirement s’explique par la mort d’Antiochus Épiphane, champion de l’hellénisation forcée, par la lassitude que le manque de vivres engendre dans les deux camps, v. 57, par les intrigues de Philippe, v. 56.

60 Le roi et les chefs approuvant ce motif, il envoya traiter de la paix avec les Juifs, qui acceptèrent. 61 Le roi et les chefs confirmèrent l’accord par serment et là-dessus les assiégés sortirent de la forteresse. 62 Alors le roi entra au mont Sion et, voyant la force de ce lieu, il viola le serment qu’il avait prêté et donna l’ordre de démanteler toute l’enceinte.z

z Le rescrit du roi, 2 M 11.25, rendait le Temple aux Juifs et ne mentionnait pas les remparts, mais notre auteur les considère comme inséparables et voit donc en ce geste le manquement à une promesse.

63 Puis il partit en toute hâte et retourna à Antioche où il trouva Philippe maître de la ville. Il lui livra bataille et s’empara de la ville par la force.

Démétrius Ier devient roi. Il envoie Bacchidès et Alkime en Judée.

7 L’année cent cinquante et un, Démétrius, fils de Séleucus, quitta Rome, et aborda avec un petit nombre d’hommes dans une ville maritime où il inaugura son règne.a

a Démétrius Ier, qui avait remplacé Antiochus Épiphane comme otage à Rome en 176, s’en échappa en 161, avec la complicité de Polybe qui nous raconte le fait. Démétrius gagne d’abord Tripoli, d’où il rejoindra Antioche (v. 2). Il sera reconnu par Rome en 160.

2 Il arriva, comme il gagnait la résidence royale de ses pères, que l’armée se saisit d’Antiochus et de Lysias pour les lui amener. 3 Lorsqu’il eut connaissance de la chose, il dit : « Ne me faites point voir leur visage. » 4 L’armée les tua et Démétrius s’assit sur son trône. 5 Alors tous les hommes d’Israël sans loi ni piété vinrent le trouver, conduits par Alkime, qui voulait exercer la charge de grand prêtre. 6 Ils accusèrent le peuple devant le roi en disant : « Judas et ses frères ont fait périr tous tes amis et il nous a expulsés de notre pays. 7 Envoie donc maintenant un homme en qui tu aies confiance : qu’il aille voir tous les ravages que Judas a exercés parmi nous et dans les domaines du roi, pour qu’il punisse ces gens-là et tous ceux qui leur viennent en aide. »

8 Le souverain choisit Bacchidès, un des amis du roi, gouverneur de la Transeuphratène,b grand du royaume et fidèle au roi.

b C’est la moitié ouest de l’empire séleucide, de l’Euphrate à l’Égypte, qui avait été confiée à Lysias par Antiochus Épiphane, 3.22. Bacchidès est chargé de pacifier la région pendant que le roi ira réprimer une révolte en Médie.

9 Il l’envoya avec l’impie Alkime, à qui il confirma le sacerdoce, et lui enjoignit de tirer vengeance des Israélites.c

c Alkime (« le vaillant », nom grec choisi pour sa ressemblance avec le nom juif Yaqîm), est traité d’impie parce qu’il frayait avec les Grecs et créait un obstacle aux prétentions des Asmonéens, mais sa qualité d’Aaronide légitimait sa nomination et lui attirait les Assidéens, cf. v. 12s.

10 S’étant mis en route, ils vinrent avec une nombreuse armée au pays de Juda. Ils envoyèrent à Judas et à ses frères des messagers porteurs de propositions pacifiques mais trompeuses. 11 Mais eux n’accordèrent aucun crédit à leurs discours, voyant qu’ils étaient venus avec une forte armée. 12 Cependant une commission de scribesd se réunit chez Alkime et Bacchidès pour chercher une solution équitable.

d Ce sont les Lévites ou des prêtres versés dans la loi, Esd 7.6s ; 2 Ch 34.13.

13 Les Assidéens étaient les premiers d’entre les Israélites à leur demander la paix ;e

e Les « Pieux », qui s’étaient d’abord ralliés à Judas, 2.42, prennent leurs distances. Ils estimaient sans doute la liberté religieuse suffisamment assurée par les concessions du roi, 6.59. Sceptique, Judas ne participe pas directement aux négociations, bien que le roi ne l’ait pas encore révoqué, cf. 2 M 14.12.

14 ils disaient : « C’est un prêtre de la race d’Aaron qui est venu avec les troupes : il ne nous fera pas de mal. » 15 Il leur tint des discours pacifiques et leur assura sous serment : « Nous ne chercherons à vous faire aucun mal, pas plus qu’à vos amis. » 16 Ils le crurent, et cependant il fit arrêter soixante d’entre eux, qu’il exécuta le même jour, suivant la parole de l’Écriture :f

f Littéralement « selon la parole qu’il a écrite », c’est-à-dire David (ms 56), Asaph (Eusèbe), ou le Prophète (grec luc.).

17 Ils ont dispersé la chair de tes saints et répandu leur sang autour de Jérusalem, et il n’y avait personne qui les ensevelît. 18 Alors la crainte et la terreur s’emparèrent de tout le peuple : « Il n’y a chez eux, disait-on, ni vérité ni justice, car ils ont violé leur engagement et le serment qu’ils avaient fait. »

19 Bacchidès partit de Jérusalem et vint camper à Bethzeth, d’où il envoya arrêter nombre de personnages qui avaient passé de son côté avec quelques-uns du peuple ; il les égorgea et les jeta dans le grand puits.g

g « Bethzeth » (« l’oliveraie ») est la leçon la mieux attestée, mais la tradition manuscrite est hésitante. Le nom s’est conservé au village de Bet-Zeita, à 6 km au nord de Bethsour, où l’on a retrouvé un puits à escalier tournant. — Bacchidès n’hésite pas à supprimer tous ceux qu’il estime trop compromis dans la révolte, même s’ils se sont ralliés à lui.

20 Il remit ensuite la province à Alkime, laissant avec lui une armée pour le soutenir. Bacchidès s’en revint chez le roi. 21 Alkime soutint la lutte pour la dignité de grand prêtre. 22 Tous ceux qui troublaient le peuple se groupèrent autour de lui, se rendirent maîtres du pays de Juda et firent beaucoup de mal en Israël. 23 Voyant que toute la malfaisance d’Alkime et de ses partisans contre les Israélites surpassait celle des nations, 24 Judas parcourut à la ronde tout le territoire de la Judée pour tirer vengeance des transfuges et les empêcher de circuler à travers la contrée.

Nikanor en Judée. Combat de Chapharsalama.

25 Lorsqu’il vit que Judas et ses partisans étaient devenus plus forts et qu’il se reconnut impuissant à leur résister, Alkime retourna chez le roi et les accusa des pires méfaits. 26 Le roi envoya Nikanor, un de ses généraux du rang des illustres, haineux et hostile à l’égard d’Israël, avec mission d’exterminer le peuple.

27 Arrivé à Jérusalem avec une armée nombreuse, Nikanor fit adresser à Judas et à ses frères des propositions pacifiques insidieuses ainsi conçues : 28 « Qu’il n’y ait pas de guerre entre vous et moi ; je viendrai avec une faible escorte pour vous rencontrer en paix. » 29 Il arriva chez Judas et ils se saluèrent l’un l’autre pacifiquement, mais les ennemis étaient prêts à enlever Judas. 30 S’apercevant qu’il était venu chez lui avec des intentions perfides, Judas eut peur de lui et ne voulut plus le voir. 31 Nikanor reconnut alors que son dessein était découvert, et marcha contre Judas pour le combattre près de Chapharsalama.h

h Le « village de la paix », peut-être l’actuel Khirbet Selma, près de Gabaôn et à 4 km d’Adasa (7.40), cf. 2 M 14.16.

32 Du côté de Nikanor, cinq cents hommes environ succombèrent et les autres s’enfuirent dans la Cité de David.

Menaces contre le Temple.

33 Après ces événements, Nikanor monta au mont Sion. Des prêtres sortirent du lieu saint avec des anciens du peuple pour le saluer pacifiquement et lui montrer l’holocauste qui s’offrait pour le roi. 34 Mais lui se moqua d’eux, les tourna en dérision, les souillai et se répandit en paroles insolentes.

i En crachant dans la direction du Temple, d’après la tradition juive.

35 Dans un accès de colère, il proféra ce serment : « Si Judas n’est pas cette fois livré entre mes mains avec son armée, dès que je serai revenu, la paix rétablie, je brûlerai cet édifice ! » Il sortit furieux. 36 Les prêtres rentrèrent et, s’arrêtant devant l’autel et le temple, ils dirent avec larmes : 37 « C’est toij qui as choisi cette maison pour qu’elle porte ton nom afin qu’elle fût pour ton peuple une demeure de prière et de supplication ;

j Après « c’est toi », grec luc., et versions ajoutent « Seigneur », mais les mots « Dieu » et « Seigneur » sont évités par 1 M.

38 exerce ta vengeance sur cet homme et sur son armée, qu’ils tombent sous l’épée ! Souviens-toi de leurs blasphèmes et ne leur accorde pas de relâche ! »

Le jour de Nikanor à Adasa.

39 Nikanor quittant Jérusalem alla camper à Bethoron où vint le rejoindre une armée de Syrie. 40 Judas, de son côté, campa en Adasak avec trois mille hommes. Il fit alors cette prière :

k C’est la Hadasha (« ville neuve ») de Jos 15.37, transcrite Dessau en 2 M 14.15, située entre Bethoron et Jérusalem.

41 « Lorsque les messagers du roil eurent blasphémé, ton ange sortit et frappa cent quatre-vingt-cinq mille des siens.

l Sennachérib, comme le précise la Vulg. Certains mss portent « le roi des Assyriens ». — Après « ton ange », mss, grec luc. et Vet. Syr. ajoutent « Seigneur » ; cf. v. 37.

42 Écrase de même aujourd’hui en notre présence cette armée, afin que tous les autres sachent qu’il a tenu un langage impie contre ton sanctuaire, et juge-le selon sa méchanceté ! »

43 Les armées se livrèrent bataille le treize du mois de Adar, celle de Nikanor fut écrasée et lui-même tué le premier dans le combat. 44 Quand ils le virent tomber, les soldats de Nikanor jetèrent leurs armes et prirent la fuite. 45 Les Juifs les poursuivirent une journée de chemin, depuis Adasa jusqu’aux abords de Gazara, sonnant derrière eux les trompettes en fanfare. 46 De tous les villages judéens à la ronde on sortait pour encercler les fuyards qui se retournaient les uns sur les autres. Tous tombèrent par l’épée et pas un seul n’en réchappa. 47 Les dépouilles et le butin ramassés, on coupa la tête de Nikanor et la main droite qu’il avait insolemment dressée ; elles furent apportées et dressées en vue de Jérusalem. 48 Le peuple fut rempli de joie et fêta ce jour-là comme une grande journée d’allégresse. 49 On décréta que ce jour serait célébré chaque année le treize Adar.m

m Le 13 Adar 151 Séleucide tombe vers le 28 mars 160 av. J.-C. Le 13 Adar était inscrit parmi les jours fériés comme « Jour de Nikanor », cf. 2 M 15.36. Sa célébration cessa assez tôt dans le judaïsme.

50 Le pays de Juda fut en repos pendant un peu de temps.n

n C’est ici que se termine le récit de 2 M.

Éloge des Romains.o

8 Or Judas entendit parler des Romains. Ils étaient, disait-on, puissants, bienveillants aussi envers tous ceux qui s’attachaient à leur cause, accordant leur amitié à quiconque s’adressait à eux.

o L’éloge des Romains introduit le traité conclu entre Judas et Rome, vv. 17s. Celle-ci soutenait volontiers les rebelles pour affaiblir les monarchies encore incomplètement soumises.

2 (Leur puissance en effet était fort grande.) On lui raconta leurs guerres et les exploits qu’ils avaient accomplis chez les Gaulois,p comment ils s’étaient rendus maîtres de ce peuple et l’avaient soumis au tribut,

p Littéralement « les Galates ». Il s’agit sans doute des Gaulois cisalpins, réduits en 222.

3 tout ce qu’ils avaient fait dans le pays d’Espagne pour s’emparer des mines d’argent et d’or qui s’y trouvaient, 4 comment ils avaient eu raison de tout ce pays grâce à leur esprit averti et à leur persévérance (car l’endroit était fort éloigné de chez eux) ; il en avait été de même des rois venus pour les attaquer des extrémités de la terre, ils les avaient écrasés, leur infligeant un grand désastre, tandis que les autres leur apportaient un tribut annuel ; 5 enfin ils avaient abattu par les armes Philippe, Persée, roi des Kitiens, et les autres qui s’étaient levés contre eux, et ils les avaient soumis.q

q Philippe, roi de Macédoine, fut battu en 197 à Cynoscéphales et son fils Persée en 168 à Pydna.

6 Antiochus le Grand, roi de l’Asie, qui s’était avancé pour les combattre avec cent vingt éléphants, de la cavalerie, des chars et une armée considérable, avait été entièrement défait par eux 7 et capturé vivant.r À lui et à ses successeurs sur le trône étaient imposés, à termes fixés, le paiement d’un lourd tribut et la livraison d’otages.

r Défaite de Magnésie du Sipyle, en 189, suivie du très onéreux traité d’Apamée, cf. 2 M 3.1.

8 On lui enlevait le pays indien, la Médie, la Lydie et quelques-unes de ses plus belles provinces au profit du roi Eumène. 9 Ceux de la Grèce ayant formé le dessein d’aller les exterminer, 10 les Romains, l’ayant su, avaient envoyé contre eux un seul général ; ils leur firent une guerre où tombèrent un grand nombre de victimes, ils emmenèrent en captivité femmes et enfants, ils pillèrent leurs biens, assujettirent leurs pays, détruisirent leurs forteresses et réduisirent leurs personnes en servitude comme elles le sont encore aujourd’hui.s

s Ces deux vv. ne peuvent guère viser que la défaite de la ligue achéenne, la destruction de Corinthe et la réduction de la Grèce en province romaine, en 146. L’auteur dépasse largement l’horizon de Judas.

11 Quant aux autres royaumes et aux îles qui leur avaient résisté, les Romains les avaient détruits et asservis.

12 Mais à leurs amis et à ceux qui se reposent sur eux, ils ont gardé leur amitié. Ils ont assujetti les rois voisins et les rois éloignés, tous ceux qui entendent leur nom les redoutent. 13 Tous ceux à qui ils veulent prêter secours et conférer la royauté, règnent ; ils déposent au contraire qui il leur plaît : ils ont atteint une puissance considérable. 14 Malgré tout cela aucun d’entre eux n’a ceint le diadème ni revêtu la pourpre pour en tirer gloire. 15 Ils se sont créé un conseil où chaque jour délibèrent trois cent vingt membres continuellement occupés du peuple pour le maintenir en bon ordre. 16 Ils confient chaque année à un seul hommet le pouvoir et la domination sur tout leur empire : tous obéissent à ce seul homme sans qu’il y ait d’envie ou de jalousie parmi eux.

t Il y avait en réalité deux consuls, mais l’auteur ne connaît peut-être l’existence que du seul consul qui se trouvait chargé des affaires d’Orient.

Alliance des Juifs avec les Romains.

17 Ayant choisi Eupolème, fils de Jean, de la maison d’Akkôs, et Jason, fils d’Éléazar, Judas les envoya à Rome conclure avec les Romains amitié et alliance,u

u Cette ambassade doit avoir eu lieu avant la mort de Nikanor (qui ne précède que de deux mois celle de Judas) on est tenté de l’identifier avec celle que mentionne Josèphe pour l’année 161.

18 et obtenir d’être délivrés du joug, car ils voyaient que la royauté des Grecs réduisait Israël en servitude. 19 Ils arrivèrent à Rome au bout d’un très long voyage et, entrés au Sénat, ils prirent la parole en ces termes : 20 « Judas, dit Maccabée, et ses frères avec le peuple juif nous ont envoyés vers vous pour conclure avec vous un traité d’alliance et de paix et pour être inscrits au nombre de vos alliés et de vos amis. » 21 La requête plut aux sénateurs.

22 Voici la copie de la lettre qu’ils gravèrent sur des tables de bronze et envoyèrent à Jérusalem pour y être chez les Juifs un document de paix et d’alliance :

23 « Prospérité aux Romains et à la nation des Juifs sur mer et sur terre à jamais ! Loin d’eux le glaive et l’ennemi ! 24 S’il arrive une guerre, à Rome d’abord, ou à quelqu’un de ses alliés sur toute l’étendue de sa domination, 25 la nation des Juifs combattra avec elle, suivant ce que lui dicteront les circonstances, de tout cœur ; 26 ils ne donneront aux adversaires et ne leur fourniront ni blé, ni armes, ni argent, ni vaisseaux : ainsi en a décidé Rome, et ils garderont leurs engagements sans recevoir de garantie. 27 De même, s’il arrive d’abord une guerre à la nation des Juifs, les Romains combattront avec elle de toute leur âme, suivant ce que leur dicteront les circonstances. 28 Il ne sera donné aux assaillants ni blé, ni armes, ni argent, ni vaisseaux : ainsi en a décidé Rome, et ils garderont leurs engagements sans dol. 29 C’est en ces termes que les Romains ont conclu leur convention avec le peuple des Juifs.

30 Que si, dans la suite, les uns et les autres décident d’y ajouter ou en retrancher quelque chose, ils le feront à leur gré et ce qu’ils auront ajouté ou retranché sera obligatoire.v

v Ici s’achève le texte du traité, dont le style rappelle d’autres documents similaires. Le paragraphe suivant résume une réponse orale faite aux envoyés.

31 Au sujet des maux que le roi Démétrius leur a causés, nous lui avons écrit en ces termes : « Pourquoi fais-tu peser ton joug sur les Juifs, nos amis alliés ? 32 Si donc ils t’accusent encore, nous soutiendrons leurs droits et nous te combattrons sur mer et sur terre ». »

Le combat de Béerzeth et la mort de Judas Maccabée.w

9 Cependant Démétrius, ayant appris que Nikanor avait succombé avec son armée dans le combat, envoya de nouveau au pays de Juda Bacchidès et Alkime, à la tête de l’aile droite.

w Le récit fait suite à 7.50.

2 Ceux-ci prirent le chemin de la Galilée et assiégèrent Mésalothx au territoire d’Arbèles et, s’en étant emparés, ils y tuèrent un grand nombre d’habitants.

x « Galilée » conj. d’après Josèphe ; « Galgala » grec et lat. — « Mesaloth », toponyme hébr. signifiant « sentiers » ils devaient mener aux grottes d’Arbèles qui servirent de refuge à maintes reprises.

3 Le premier mois de l’année cent cinquante-deux,y ils dressèrent leur camp devant Jérusalem,

y Avril-mai 160.

4 puis ils partirent et allèrent à Béerzethz avec vingt mille fantassins et deux mille cavaliers.

z « Béerzeth » grec luc., Vet. Syr. et Josèphe. C’est l’actuelle Birzeit, à 20 km au nord de Jérusalem. Si on retient la leçon « Béréan » ou « Bereth » de grec et lat., il faut alors situer le camp à El-Biré, la Beérot biblique, Jos 9.17, à 13 km au sud de Birzeit.

5 Judas avait établi son camp à Éléasa,a ayant avec lui trois mille guerriers d’élite.

a « Eléasa » mss ; « Elasa » ou « Alasa » ensemble du grec. S’il s’agit du Khirbet Il’asa, près de Bethoron, le camp de Judas est très éloigné de celui de Bacchidès, ce qui s’accorde mal avec le récit, à moins qu’il ne s’agisse ici de la base arrière de Judas.

6 À la vue du grand nombre des ennemis, ils furent pris de frayeur et beaucoup s’échappèrent du camp, où il ne resta plus que huit cents hommes.

7 Judas vit que son armée s’était dérobée alors que le combat le pressait ; son cœur en fut brisé parce qu’il n’avait plus le temps de rassembler les siens. 8 Dans son désarroi, il dit cependant à ceux qui étaient restés : « Debout ! marchons contre nos adversaires si par hasard nous pouvons les combattre. »

9 Eux l’en dissuadaient : « Nous ne pouvons, disaient-ils, rien d’autre pour le moment que sauver notre vie, quitte à revenir avec nos frères pour reprendre la lutte. Nous sommes vraiment trop peu. » 10 Judas répliqua : « Loin de moi d’agir ainsi et de fuir devant eux. Si notre heure est arrivée, mourons bravement pour nos frères et ne laissons rien à reprendre à notre gloire. »

11 L’armée sortit du camp et s’arrêta face à l’ennemi. La cavalerie fut partagée en deux escadrons, les frondeurs et les archers marchaient sur le front de l’armée ainsi que les troupes de choc, tous les vaillants. 12 Bacchidès se tenait à l’aile droite, la phalange s’avança des deux côtés au son de la trompette. Ceux du côté de Judas sonnèrent aussi la trompette 13 et la terre fut ébranlée par la clameur des armées. Le combat s’engagea le matin et dura jusqu’au soir.

14 Judas s’aperçut que Bacchidès et le fort de son armée se trouvaient à droite : autour de lui se groupèrent tous les hommes de cœur, 15 l’aile droite fut écrasée par eux et ils la poursuivirent jusqu’aux monts Azâra.b

b « Azâra » d’après Josèphe ; « Azôtos » grec et lat., mais il n’existe pas de montagne près d’Azôtos (l’ancienne Ashdod).

16 Cependant, voyant que l’aile droite était enfoncée, les Syriens de l’aile gauche se rabattirent sur les talons de Judas et de ses compagnons, les prenant à revers.

17 La lutte devint acharnée et, de part et d’autre, un grand nombre tombèrent frappés. 18 Judas succomba lui aussi, et le reste prit la fuite.

Funérailles de Judas Maccabée.

19 Jonathan et Simon enlevèrent leur frère Judas et l’ensevelirent au tombeau de ses pères à Modîn. 20 Tout Israël le pleura et mena sur lui un grand deuil, redisant plusieurs jours cette lamentation : 21 « Comment est-il tombé, le héros qui sauvait Israël ? » 22 Le reste des actions de Judas, de ses guerres, des exploits qu’il accomplit et de ses titres de gloire, n’a pas été écrit ; il y en avait trop.