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Bible de Jérusalem

1 Samuel 1-7

PREMIER LIVRE DE SAMUEL

Introduction aux livres de Samuel

I. Samuel

1. LES ENFANCES DE SAMUELa

Le pèlerinage de Silo.

1 Il y avait un homme de Ramatayim-Çophim,b de la montagne d’Éphraïm, qui s’appelait Elqana, fils de Yeroham, fils d’Élihu, fils de Tohu, fils de Çuph, un Éphratéen.

a Les chap. 1-3 sont une composition littéraire unifiée ; on peut y découvrir une tradition silonite qui gravite autour de trois éléments : 1° naissance de Samuel et son entrée au sanctuaire de Silo ; 2° les fils d’Éli ; 3° la révélation de Yahvé à Samuel. Seuls le premier et le troisième concernent la personne de Samuel. La faute des fils d’Éli domine le deuxième élément, fait contraste avec la fidélité de Samuel et appelle le châtiment divin. Ce récit est ancien et conserve de bons souvenirs historiques.

b Appelée plus loin Rama (1.19 ; 2.11), cette ville était habitée par un groupe qui se réclamait d’un ancêtre Çuph. On ne doit pas la confondre avec Rama de Benjamin (Jos 18.25 ; 1 R 15.17, 21-22).

2 Il avait deux femmes : l’une s’appelait Anne, l’autre Peninna ; mais alors que Peninna avait des enfants, Anne n’en avait point. 3 Chaque année, cet homme montait de sa ville pour adorer et pour sacrifier à Yahvé Sabaotc à Silod — là se trouvaient les deux fils d’Éli, Hophni et Pinhas, prêtres de Yahvé.

c L’interprétation « Yahvé des armées » (qu’il s’agisse des armées d’Israël ou des armées célestes, astres, anges, ou de toutes les forces cosmiques) n’est pas assurée. Le titre apparaît pour la première fois ici et il est lié au culte de Silo ; l’expression « Yahvé Sabaot qui siège sur les chérubins » se rencontrera pour la première fois en 4.4, à propos de l’arche amenée de Silo. Ce titre est resté attaché au rituel de l’arche et est entré avec celle-ci à Jérusalem, 2 S 6.2, 18 ; 7.8, 27. Il a été repris par les grands prophètes (sauf Ézéchiel), par les prophètes post-exiliques (surtout Zacharie) et dans les Psaumes.

d Aujourd’hui Seilûn, env. 20 km au sud de Naplouse. L’arche y fut installée au temps des Juges, peut-être déjà sous Josué, cf. Jos 18.1, dans un sanctuaire qui fut détruit, cf. Jr 7.12 ; 26.6, 9 ; Ps 78.60, probablement par les Philistins après la défaite racontée à 4. Le pèlerinage annuel est celui de la fête des Tentes.

4 Le jour où Elqana sacrifiait, il donnait des parts à sa femme Peninna et à tous ses fils et filles, 5 à Anne il donnait une seule part d’honneur, car c’est Anne qu’il aimait, mais Yahvé avait fermé son sein. 6 Sa rivale ne cessait de lui faire des affronts pour la mettre en colère, car Yahvé avait fermé son sein. 7 Ainsi faisait Elqana chaque année, chaque fois qu’ils montaient au temple de Yahvé ;e ainsi Peninna l’irritait. Anne pleura et ne mangea pas.

e Le sanctuaire de Silo est considéré comme un bâtiment qui se présente sur le modèle de celui de Jérusalem, cf. 1.9 ; 3.3.

8 Alors son mari Elqana lui dit : « Anne, pourquoi pleures-tu et ne manges-tu pas ? Pourquoi ton cœur est-il triste ? Est-ce que je ne vaux pas pour toi mieux que dix fils ? »

La prière d’Anne.

9 Anne se leva après qu’on eut mangé et après qu’on eut bu. Le prêtre Éli était assis sur son siège, contre le montant de la porte du sanctuaire de Yahvé. 10 Elle était pleine d’amertume ; elle pria Yahvé et elle pleura beaucoup. 11 Elle fit un vœu et dit : « Yahvé Sabaot ! Si tu voulais bien voir la misère de ta servante, te souvenir de moi, ne pas oublier ta servante et lui donner un petit d’homme, alors je le donnerai à Yahvé pour toute sa vie et le rasoir ne passera pas sur sa tête. »f

f Samuel sera le fils accordé par Dieu à une mère stérile, comme Isaac, Samson, Jean-Baptiste. L’enfant à naître est voué par sa mère à Yahvé, comme serviteur du sanctuaire. Les cheveux longs seront le signe de cette consécration, comme pour Samson. Mais il n’est pas dit expressément de Samuel qu’il sera nazîr, cf. Nb 6.1, comme il est dit de Samson, Jg 13.5.

12 Comme elle prolongeait sa prière devant Yahvé, Éli observait sa bouche.

13 Anne parlait tout bas : ses lèvres remuaient mais on n’entendait pas sa voix, et Éli pensa qu’elle était ivre.g

g On priait normalement à haute voix ; et les fêtes donnaient lieu parfois à des excès de boisson, Isa 22.13 ; Am 2.8. D’où la méprise d’Éli.

14 Alors Éli lui dit : « Jusques à quand vas-tu rester ivre ? Fais passer ton vin ! » 15 Mais Anne répondit ainsi : « Non, Monseigneur, je ne suis qu’une femme éprouvée,h je n’ai bu ni vin ni boisson fermentée, j’épanche mon âme devant Yahvé.

h Littéralement « dure d’esprit ». L’expression peut traduire l’obstination, mais aussi l’affliction.

16 Ne juge pas ta servante comme une vaurienne : c’est par excès de peine et d’affronts que j’ai parlé jusqu’à maintenant. » 17 Éli lui répondit : « Va en paix et que le Dieu d’Israël t’accorde ce que tu lui as demandé. » 18 Elle dit : « Puisse ta servante trouver grâce à tes yeux », et la femme alla son chemin ; elle mangea et son visage ne fut plus le même.

Naissance et consécration de Samuel.

19 Ils se levèrent de bon matin et, après s’être prosternés devant Yahvé, ils s’en retournèrent et arrivèrent chez eux, à Rama. Elqana connut Anne sa femme, et Yahvé se souvint d’elle. 20 Anne conçut et, au temps révolu, elle mit au monde un fils, qu’elle nomma Samuel, « car, dit-elle, je l’ai demandé à Yahvé. »i

i Cette explication par la racine sha ’al, « demander », devrait conduire au nom de sha ’ul, « Saül ». L’étymologie biblique se contente ici d’une vague assonance. « Samuel » s’explique plutôt par Shem-El, « le Nom de Dieu » ou « le Nom (de Dieu) est El ».

21 Le mari Elqana monta, avec toute sa famille, pour offrir à Yahvé le sacrifice annuel et accomplir son vœu. 22 Mais Anne ne monta pas, car elle dit à son mari : « Pas avant que l’enfant ne soit sevré !j Alors je le conduirai ; il sera présenté devant Yahvé et il restera là pour toujours. »

j Les enfants étaient sevrés tard.

23 Elqana, son mari, lui répondit : « Fais comme il te plaît et attends de l’avoir sevré. Que seulement Yahvé réalise sa parole ! »k La femme resta donc et allaita l’enfant jusqu’à son sevrage.

k Les versions et Qumrân ont « ta parole », mais le souhait d’Elqana ne fait que prolonger celui d’Éli (v. 17).

24 Lorsqu’elle l’eut sevré, elle le fit monter avec elle, en même temps qu’un taureau de trois ans,l une mesure de farine et une outre de vin, et elle le fit entrer dans le temple de Yahvé à Silo ; l’enfant était tout jeune.

l « un taureau de trois ans » grec, syr. ; « trois taureaux » hébr. ; mais cf. v. 25.

25 Ils immolèrent le taureau et ils conduisirent l’enfant à Éli. 26 Elle dit : « S’il te plaît, Monseigneur ! Aussi vrai que tu vis, Monseigneur, je suis la femme qui se tenait près de toi ici, priant Yahvé. 27 C’est pour cet enfant que je priais et Yahvé m’a accordé la demande que je lui ai faite. 28 À mon tour, je le cède à Yahvé tous les jours de sa vie : il est cédé à Yahvé. » Et, là, il se prosterna devant Yahvé.m

m Le verbe est au masc. sing. sans sujet exprimé. Celui-ci peut-être soit Éli à qui Anne vient de s’adresser (v 26-28a), soit Samuel.

Cantique d’Anne.n

2 Anne pria et dit :

« Mon cœur exulte en Yahvé,
ma corne s’élève en Yahvé,
ma bouche est large ouverte contre mes ennemis,
car je me réjouis en ton secours.

n Ce cantique a été appelé « le prototype du Magnificat », mais l’accent du Magnificat est beaucoup plus personnel. C’est un psaume de l’époque monarchique qui traduit l’espérance des « pauvres », cf. So 2.3, et se termine par l’évocation du Roi-Messie. Il a été mis dans la bouche d’Anne à cause de l’allusion du v. 5 à la « femme stérile ». — Texte corrigé aux vv. 1, 3, 5, 10.

2 Point de Saint comme Yahvé
(car il n’y a personne excepté toi),
point de Rocher comme notre Dieu.
3 Ne multipliez pas les paroles hautaines,
que l’arrogance ne sorte pas de votre bouche.
car Yahvé est un Dieu plein de savoir
et par lui les actions sont pesées.
4 L’arc des puissants est brisé,
mais les défaillants se ceignent de force.
5 Les rassasiés s’embauchent pour du pain,
mais les affamés cessent de travailler.o
La femme stérile enfante sept fois,
mais celle qui a de nombreux fils se flétrit.

o « De travailler » (`abod) conj. ; « jusqu’à » (`ad) hébr.

6 C’est Yahvé qui fait mourir et vivre,
qui fait descendre au shéol et en remonter.
7 C’est Yahvé qui appauvrit et qui enrichit,
qui abaisse et aussi qui élève.
8 Il retire de la poussière le faible,
du fumier il relève le pauvre,
pour les faire asseoir avec les nobles
et leur assigner un siège d’honneur ;
car à Yahvé sont les piliers de la terre,
sur eux il a posé le monde.
9 Il garde les pas de ses fidèles,
mais les méchants disparaissent dans les ténèbres
(car ce n’est pas par la force que l’homme triomphe).
10 Yahvé, ses ennemis sont brisés,
le Très-Hautp tonne dans les cieux.
Yahvé juge les confins de la terre,
il donne la force à son Roi,
il élève la corne de son Oint. »

p « Le Très Haut » (`elyôn) conj. ; « contre lui » (’alaw) hébr.

11 Elqana partit pour Rama, dans sa maison, mais l’enfant était au service de Yahvé, en présence du prêtre Éli.

Les fils d’Éli.

12 Or les fils d’Éli étaient des vauriens ; ils ne connaissaient pas Yahvé. 13 Tel était le droit des prêtres à l’égard du peuple :q si quelqu’un offrait un sacrifice, le ser vant du prêtre venait pendant qu’on cuisait la viande, tenant une fourchette à trois dents,

q Les fils d’Éli ne tiennent pas compte des règles qui fixaient la part des prêtres, cf. Lv 7.28s ; Nb 18.8s ; Dt 18.35.

14 il piquait dans le chaudron ou dans la marmite ou dans la terrine ou dans le pot, et le prêtre s’attribuait tout ce que ramenait la fourchette ; on agissait ainsi avec tous les Israélites qui venaient là, à Silo. 15 Et même, on n’avait pas encore fait fumer la graisse que le servant du prêtre venait et disait à celui qui sacrifiait : « Donne de la viande à rôtir pour le prêtre, il n’acceptera pas de toi de la viande bouillie, seulement de la viande crue. » 16 Et si cet homme lui disait : « Qu’on fasse d’abord fumer la graisse, puis prends pour toi à ta guise », il répondait : « Non, c’est maintenant que tu dois donner, sinon je prends de force. » 17 Le péché des jeunes gens était très grand devant Yahvé, car les hommesr méprisaient l’offrande faite à Yahvé.

r Le blâme s’étend à l’ensemble des Israélites qui acceptent la situation créée par les fils d’Éli.

Samuel à Silo.

18 Samuel était au service de la face de Dieu,s servant revêtu de l’éphod de lin.

s La formule est proche de celle de 2.11, mais souligne déjà le lien entre Yahvé et Samuel. L’éphod de lin est normalement un vêtement sacerdotal, cf. 22.18 ; 2 S 6.14. Le texte voudrait-il laisser entendre que Samuel était prêtre ? La suite du texte ne le dit pas. C’est sans doute une autre manière de dire que Samuel l’emporte sur Éli et ses fils.

19 Sa mère lui faisait un petit manteau qu’elle lui apportait chaque année, lorsqu’elle montait avec son mari pour offrir le sacrifice annuel. 20 Éli bénissait Elqana et sa femme et disait : « Que Yahvé t’accorde une descendance de cette femme en vertu de la demande que l’on a faite pour Yahvé »,t et ils s’en allaient chez eux.

t Littéralement « à la place de la demande ». Le vieux prêtre ratifie au nom de Dieu la demande d’Anne.

21 Yahvé visita Anne, elle conçut et elle mit au monde trois fils et deux filles ; le jeune Samuel grandissait avec Yahvé.

Encore les fils d’Éli.

22 Éli était très âgé, mais il entendait parler de tout ce que ses fils faisaient envers Israëlu et qu’ils couchaient avec les femmes qui se tenaient à l’entrée de la tente de la rencontre.

u Le second reproche accable un peu plus le sacerdoce de Silo en reprenant une expression d’Ex 38.8, mais il est absent du grec.

23 Il leur dit :

« Pourquoi faites-vous de pareilles choses, de mauvaises chosesv dont j’entends parler par tout le peuple ?

v La précision « de mauvaises choses » est propre à l’hébr. qui porte ainsi un jugement sur la conduite des fils d’Éli et se présente comme une glose.

24 Non, mes fils, elle n’est pas belle la rumeur que j’entends le peuple de Yahvé colporter. 25 Si un homme pèche contre un autre homme, Dieu sera l’arbitre, mais si c’est contre Yahvé que pèche un homme, qui intercédera pour lui ? » Cependant ils n’écoutèrent pas la voix de leur père. C’est qu’il avait plu à Yahvé de les faire mourir.w

w Comme ailleurs dans la Bible, Ex 4.21 ; Jos 11.20 ; Isa 6.9-10, etc., l’endurcissement du pécheur est rapporté à Yahvé comme à la cause première. Mais cette manière de parler ne prétend nullement nier la liberté humaine.

26 Quant au jeune Samuel, il progressait en taille et en beauté tant auprès de Yahvé qu’auprès des hommes.

Annonce du châtiment.x

27 Un homme de Dieu vint chez Éli et lui dit : « Ainsi parle Yahvé. Me suis-je vraiment révélé à la maison de ton père quand ils étaient en Égypte, appartenant à la maison de Pharaon ?

x Cet épisode est une insertion tardive, il fait double emploi avec 3.11-14. La mort d’Hophni et de Pinhas, 4.11, ne sera que le « présage », v. 34, des malheurs futurs annoncés au v. 33 massacre des prêtres de Nob, descendants d’Éli, 22.18-19, sauf Ébyatar, 22.22-23, qui sera destitué par Salomon, 1 R 2.27 ; au v. 35, substitution de la famille de Sadoq qui, à partir de Salomon, gardera la faveur du roi, « l’oint du Seigneur »; mais le v. 36 ne correspond pas à la situation décrite en 2 R 23.9 et la composition pourrait être antérieure au règne de Josias.

28 L’ai-je choisie parmi toutes les tribus d’Israël pour devenir mon prêtre, pour monter à mon autel, pour faire fumer l’encens et pour porter l’éphody devant moi ? J’ai donné à la maison de ton père tous les mets consumés des Israélites.

y Ce n’est pas un vêtement qu’on ceint, comme l’éphod du v. 18, c’est un objet qu’on « porte » ou qu’on « apporte », 14.3 ; 23.6 ; 30.7, et qui contient les sorts sacrés par lesquels on consulte Yahvé, 14.18s ; 23.9s ; 30.8, voir 14.41. Il apparaît à l’époque des Juges, Jg 17.5 ; 18.14s (l’éphod de Gédéon, Jg 8.26s, sera condamné comme un symbole idolâtrique) et il n’est plus mentionné dans les récits postérieurs à David (une allusion en Os 3.4).

29 Pourquoi piétinez-vous mon sacrifice et mon offrande que j’ai prescrits dans la Demeure ?z Pourquoi honores-tu tes fils plus que moi, en vous engraissant du meilleur de toutes les offrandes d’Israël, mon peuple ?

z Terme dépourvu de préposition qui semble être une désignation poétique du sanctuaire de Jérusalem, cf. Ps 26.8 ; 68.6.

30 C’est pourquoi — oracle de Yahvé, Dieu d’Israël — j’avais bien dit que ta maison et la maison de ton père marcheraient en ma présence pour toujours,a mais maintenant — oracle de Yahvé — je m’en garderai ! Car j’honore ceux qui m’honorent et ceux qui me méprisent sont déconsidérés.

a La promesse de Dieu est ici mise en question par le péché des prêtres de Silo.

31 Voici que des jours viennent où j’abattrai ton bras et le bras de la maison de ton père, en sorte qu’il n’y ait pas de vieillard dans ta maison. 32 Tu regarderas un rival dans la Demeure, ainsi que tout le bien qu’il fera à Israël, et il n’y aura pas de vieillard dans ta maison, à jamais. 33 Près de mon autel je maintiendrai l’un des tiens, pour que ses yeux se consument et que tu sois affligé,b mais tout l’ensemble de ta maison mourra à l’âge adulte.

b Littéralement « ta vie te consumera ».

34 Tel sera pour toi le signe : ce qui arrivera à tes deux fils, Hophni et Pinhas ; le même jour, ils mourront tous deux. 35 Je me susciterai un prêtre fidèle, qui agira selon mon cœur et mon désir, je lui bâtirai une maison stable et il marchera toujours en présence de mon oint. 36 Alors quiconque subsistera de ta maison viendra se prosterner devant lui pour avoir une piécette d’argent et une galette de pain, et dira : « Je t’en prie, attache-moi à une fonction sacerdotale, pour que j’aie un morceau de pain à manger. » »

L’appel de Dieu à Samuel.c

3 Le jeune Samuel servait donc Yahvé en présence d’Éli. La parole de Yahvé était rare en ces jours-là ; il n’y avait pas de vision qui perçait.

c Première révélation qui consacre Samuel comme prophète, v. 20. Ce n’est pas un songe la voix réveille Samuel. Ce n’est une « vision » qu’au sens large, car Samuel ne voit pas Yahvé, il l’entend seulement.

2 Or, un jour, Éli était couché à sa place — ses yeux commençaient de faiblir et il ne pouvait plus voir — 3 la lampe de Dieu n’était pas encore éteinte et Samuel était couché dans le sanctuaire de Yahvé, là où se trouvait l’arche de Dieu.d

d C’est au-dessus de l’arche que Yahvé se rend présent et communique ses ordres, cf. Ex 25.22 ; Isa 6.

4 Yahvé appela Samuel et celui-ci dit : « Me voici ! » 5 Il courut vers Éli et dit : « Me voici, puisque tu m’as appelé. » — « Je ne t’ai pas appelé, dit Éli ; retourne te coucher. » Il alla se coucher. 6 Yahvé recommença à appeler Samuel. Celui-ci se leva, alla vers Éli et dit : « Me voici, puisque tu m’as appelé. » — « Je ne t’ai pas appelé, mon fils, dit Éli ; retourne te coucher. » 7 Samuel ne connaissait pas encore Yahvé et la parole de Yahvé ne lui avait pas encore été révélée. 8 Yahvé recommença à appeler Samuel. Il se leva, alla vers Éli et dit : « Me voici, puisque tu m’as appelé. » Alors Éli comprit que c’était Yahvé qui appelait l’enfant

9 et il dit à Samuel : « Va te coucher et, s’il arrive qu’il t’appelle, tu diras : Parle, Yahvé, car ton serviteur écoute », et Samuel alla se coucher à sa place.

10 Yahvé vint et se tint présent. Il appela comme les autres fois : « Samuel, Samuel ! », et Samuel répondit : « Parle, car ton serviteur écoute. » 11 Yahvé dit à Samuel : « Je m’en vais faire en Israël une chose telle que les deux oreilles en tinteront à quiconque l’apprendra. 12 En ce jour-là, j’accomplirai contre Éli tout ce que j’ai dit sur sa maison, du commencement à la fin.e

e Probablement ajouté après l’insertion de 2.27-36.

13 Je lui ai annoncé que je jugerai sa maison pour toujours ; parce qu’il savait que ses fils insultaient Dieuf et qu’il ne les a pas corrigés.

f Au lieu du mot « Dieu » (’elohîm) l’hébr. a lu « à eux » (lahem), correction voulue pour éviter que Dieu soit le complément du verbe « insulter ».

14 C’est pourquoi — je le jure à la maison d’Éli — ni sacrifice ni offrande n’effaceront jamais la faute de la maison d’Éli. »

15 Samuel reposa jusqu’au matin, puis il ouvrit les portes de la maison de Yahvé. Samuel craignait de raconter la vision à Éli, 16 mais Éli l’appela en disant : « Samuel, mon fils ! », et celui-ci répondit : « Me voici ! » 17 Il demanda : « Quelle est la parole qu’il t’a dite ? Ne me cache rien ! Que Dieu te fasse telle chose et qu’il ajoute encore cette autre si tu me caches un mot de ce qu’il t’a dit. » 18 Alors Samuel lui rapporta tout, il ne lui cacha rien. Éli dit : « Il est Yahvé ; qu’il fasse ce qui lui semble bon ! »

19 Samuel grandit. Yahvé était avec lui et il ne laissa tomber à terre aucune de ses paroles.g

g Formule qui traduit le fidèle accomplissement de la parole de Dieu, cf. 2 R 10.10.

20 Tout Israël sut, depuis Dan jusqu’à Bersabée, que Samuel était accrédité comme prophète de Yahvé. 21 Yahvé continua à se manifester à Silo ; car Yahvé se révélait à Samuel, à Silo, par la parole de Yahvé.

2. L’ARCHE CHEZ LES PHILISTINSh

Défaite des Israélites et capture de l’arche.

4 La parole de Samuel s’adressait à tout Israël. Or Israël sortit à la rencontre des Philistins pour le combat. Ils campèrent près d’Ében-ha-Ézèr, tandis que les Philistins étaient campés à Apheq.i

h Cette histoire, 4-7, n’a avec la précédente que des liens accessoires, les mentions de Silo, d’Éli et de ses fils. Samuel apparaît au début (4.1) et à la fin de cet ensemble (7.2-17) comme dominant toute la période. L’arche (cf. Ex 25.10 et 2 S 6.7) est maintenant le sujet principal. Par son contenu, son cadre géographique et son humour à l’égard des Philistins, le récit s’apparente à l’histoire de Samson, Jg 13-16. D’abord indépendant, il a servi de préface à l’histoire monarchiste de l’institution de la royauté, 9-11, qui se poursuit avec la reprise des guerres philistines, 13-14. Pour avoir la suite de l’histoire de l’arche, il faut passer à 2 S 6, puis à 1 R 8.1-11.

i Aujourd’hui Ros el-Aïn, à 25 km à l’ouest de Jérusalem.

2 Les Philistins se rangèrent en ordre de bataille pour faire face à Israël. Le combat s’étendit et Israël fut battu devant les Philistins qui tuèrent lors de cette bataille en rase campagne environ quatre mille hommes. 3 Le peuplej revint au camp et les anciens d’Israël dirent : « Pourquoi Yahvé nous a-t-il fait battre aujourd’hui par les Philistins ? Allons prendre à Silo l’arche de l’alliance de Yahvé, qu’elle vienne au milieu de nous et qu’elle nous sauve de la main de nos ennemis. »k

j Le mot « peuple » désigne ici l’ensemble des hommes armés qui font la guerre ; c’est souvent le cas dans les récits guerriers.

k L’arche est le signe de la présence de Yahvé, v. 7, mais ce même v. indique qu’elle n’accompagnait l’armée qu’exceptionnellement, cf. Jos 6.6 ; 2 S 11.11.

4 Le peuple envoya des hommes à Silo et de là on emmena l’arche de l’alliance de Yahvé Sabaot qui siège sur les chérubins ;l là se trouvaient les deux fils d’Éli, Hophni et Pinhas, avec l’arche de l’alliance de Dieu.

l Première mention de ce titre qui est en relation avec le sanctuaire de Silo, cf. 1.3. Les chérubins sont les sphinx ailés qui flanquaient les trônes divins ou royaux de l’ancienne Syrie. À Silo comme dans le Temple de Jérusalem, 1 R 8.6, les chérubins et l’arche sont le trône de Yahvé, le « siège » de la présence invisible.

5 Dès que l’arche de l’alliance de Yahvé arriva au camp, tout Israël poussa une grande acclamationm et la terre trembla.

m Ce cri religieux et guerrier appartenait au rituel de l’arche, cf. Nb 10.5.

6 Les Philistins entendirent le bruit de l’acclamation et dirent : « Que signifie cette grande acclamation au camp des Hébreux ? », et ils surent que l’arche de Yahvé était arrivée au camp. 7 Alors les Philistins eurent peur, car ils se disaient : « Dieu est venu au camp ! » Ils dirent : « Malheur à nous ! Car une chose pareille n’est pas arrivée auparavant. 8 Malheur à nous ! Qui nous délivrera de la main de ce Dieu puissant ? C’est lui qui a frappé l’Égypte de toutes sortes de plaies au désert.n

n L’hébr. permettait de traduire « Qui nous délivrera de la main de ces dieux puissants ? Ce sont ces dieux qui ont frappé de toutes sortes de plaies au désert. » Le rédacteur considère alors les Philistins comme polythéistes, ce qui permet de comprendre un pluriel inhabituel.

9 Prenez courage et agissez en hommes, Philistins, pour n’être pas asservis aux Hébreux comme ils vous ont été asservis ; agissez en hommes et combattez ! » 10 Les Philistins livrèrent bataille et Israël fut battu, chacun s’enfuyant vers sa tente ; ce fut un très grand massacre et trente mille hommes de pied tombèrent du côté d’Israël. 11 L’arche de Dieu fut prise et les deux fils d’Éli moururent, Hophni et Pinhas.

Mort d’Éli.

12 Un homme de Benjamin courut hors des lignes et atteignit Silo le même jour, les vêtements déchirés et la tête couverte de poussière. 13 Lorsqu’il arriva, Éli était assis sur son siège, au bord de la route qu’il épiait, car son cœur tremblait pour l’arche de Dieu. Cet homme donc vint apporter la nouvelle à la ville, et toute la ville poussa des cris. 14 Éli entendit les cris et demanda : « Que signifie cette grande rumeur ? » L’homme se hâta et vint avertir Éli. — 15 Celui-ci avait quatre-vingt-dix-huit ans ; ses yeux étaient fixes et il ne pouvait plus voir. — 16 L’homme dit à Éli : « C’est moi qui arrive des lignes, je me suis enfui des lignes aujourd’hui », et celui-ci demanda : « Que s’est-il passé, mon fils ? » 17 Le messager répondit : « Israël a fui devant les Philistins, ce fut même une grande défaite pour le peuple ; tes deux fils sont morts, Hophni et Pinhas, et l’arche de Dieu a été prise ! » 18 À cette mention de l’arche de Dieu, Éli tomba de son siège à la renverse, contre un élément de la porte, sa nuque se brisa et il mourut, car l’homme était âgé et pesant. Il avait jugé Israël pendant quarante ans.o

o Éli est improprement assimilé aux Juges d’Israël, cf. Jg 3.7. « Quarante ans » est un chiffre rond exprimant la durée d’une génération.

Mort de la femme de Pinhas.

19 Or sa bru, la femme de Pinhas, était enceinte et sur le point d’accoucher. Dès qu’elle eut appris la nouvelle relative à la prise de l’arche de Dieu et à la mort de son beau-père et de son mari, elle s’accroupit et elle accoucha, car ses douleurs l’avaient assaillie. 20 Comme elle était à la mort, celles qui se tenaient près d’elle lui dirent : « Ne crains pas, car tu as enfanté un fils », mais elle ne répondit pas et n’y fit pas attention. 21 Elle appela l’enfant Ikabod, disant : « La gloire a été bannie d’Israël »,p à cause de la prise de l’arche de Dieu et à cause de son beau-père et de son mari.

p Ey-kabôd « où est la gloire ? » Cette gloire est celle de Yahvé qui trône sur l’arche.

22 Elle dit : « La gloire a été bannie d’Israël, parce que l’arche de Dieu a été prise. »

Déboires des Philistins avec l’arche.q

5 Lorsque les Philistins eurent pris l’arche de Dieu, ils la conduisirent d’Ében-ha-Ézèr à Ashdod.r

q Les Philistins et leur dieu Dagôn, cf. Jg 16.23, qui vont subir les effets redoutables de la sainteté de l’arche, où Yahvé se rend présent, 6.7.

r L’une des cinq villes philistines ; de même Gat, v. 8, et Eqrôn, v. 10. Cf. 6.17 et Jos 13.2.

2 Les Philistins prirent l’arche de Dieu, l’amenèrent dans le temple de Dagôn et la déposèrent à côté de Dagôn.s

s Comme le trophée du dieu vaincu.

3 Quand les Ashdodites se levèrent le lendemain, voilà que Dagôn était tombé en avant, par terre, devant l’arche de Yahvé. Ils prirent Dagôn et le remirent à sa place.t

t On notera la brièveté du texte et son ironie. Le texte joue sur le verbe « prendre »; à la prise de l’arche par les Philistins se substitue la prise de Dagôn, le dieu des Philistins, ce qui révèle la puissance de Yahvé.

4 Quand ils se levèrent de bon matin, le lendemain, voilà que Dagôn était tombé en avant, par terre, devant l’arche de Yahvé ; la tête de Dagôn et ses deux mains étaient coupées près du seuil ; il ne restait à sa place que Dagôn seul. 5 C’est pourquoi les prêtres de Dagôn et tous ceux qui entrent dans le temple de Dagôn ne marchent pas sur le seuil de Dagôn à Ashdod, jusqu’à ce jour.u

u En réalité, c’était une coutume assez répandue dans l’Antiquité de sauter le seuil, considéré comme l’habitation des esprits. Mais ici l’explication donnée est très ironique.

6 La main de Yahvé s’appesantit sur les Ashdodites : il les ravagea et les affligea de tumeurs, Ashdod et son territoire.v

v Les « tumeurs » peuvent se comprendre soit comme des hémorroïdes, soit comme des abcès provoqués par la dysenterie, cf. Dt 28.27. Le récit se veut très ironique à l’égard des Philistins.

7 Quand les gens d’Ashdod virent ce qui arrivait, ils dirent : « Que l’arche du Dieu d’Israël ne demeure pas chez nous, car sa main s’est durcie contre nous et contre Dagôn, notre dieu. »

8 Ils envoyèrent chercher et rassemblèrent auprès d’eux tous les princes des Philistins et dirent : « Que devons-nous faire de l’arche du Dieu d’Israël ? » Les princes dirent : « C’est à Gat que sera emmenéew l’arche du Dieu d’Israël », et on emmena l’arche du Dieu d’Israël.

w Le verbe suggère l’idée d’une procession.

9 Mais après qu’ils l’eurent amenée, la main de Yahvé fut sur la ville ; ce fut une très grande panique. Il frappa les gens de la ville, du plus petit jusqu’au plus grand, et des tumeurs leur poussèrent. 10 Ils envoyèrent alors l’arche de Dieu à Éqrôn, mais lorsque l’arche de Dieu arriva à Éqrôn, les Éqrônites s’écrièrent : « Ils m’ont amené l’arche du Dieu d’Israël pour me faire mourir moi et mon peuple ! » 11 Ils envoyèrent chercher et rassemblèrent tous les princes des Philistins et dirent : « Renvoyez l’arche du Dieu d’Israël, et qu’elle retourne à son lieu et ne me fasse pas mourir, moi et mon peuple. » Il y avait en effet une panique mortelle dans toute la ville, tant s’y était appesantie la main de Dieu.

12 Les gens qui ne mouraient pas étaient affligés de tumeurs et le cri de détresse de la ville montait jusqu’au ciel.

Renvoi de l’arche.

6 L’arche de Yahvé fut sept mois dans le territoire des Philistins.

2 Les Philistins en appelèrent aux prêtres et aux devins et dirent : « Que devons-nous faire de l’arche de Yahvé ? Indiquez-nous comment nous la renverrons en son lieu. » 3 Ils répondirent : « Si vous voulez renvoyer l’arche du Dieu d’Israël, ne la renvoyez pas sans rien, mais apportez-lui une réparation. Alors vous guérirez et vous saurez pourquoi sa main ne s’était pas détournée de vous. » 4 Ils dirent : « Quelle doit être la réparation que nous lui apporterons ? » Ils répondirent : « D’après le nombre des princes des Philistins, cinq tumeurs d’or et cinq rats d’or,x car ce fut la même plaie pour vous et pour vos princes.

x La mention de « rats » est étonnante, car elle n’est préparée par rien. On ne peut y voir des animaux propagateurs de la peste, car cette transmission du fléau n’était pas connue dans l’Antiquité. En 6.5 est évoquée une invasion de rats des champs. Il se peut que le chap. 6 mentionne deux fléaux l’un qui atteint les hommes, l’autre qui ravage le pays en combinant deux traditions.

5 Faites des images de vos tumeurs et des images de vos rats, qui ravagent le pays, et rendez gloire au Dieu d’Israël.y Peut-être sa main se fera-t-elle plus légère sur vous, vos dieux et votre pays.

y Expression qui invite les Philistins à reconnaître la puissance du Dieu d’Israël tout autant que leur faute, cf. Jos 7.19.

6 Pourquoi endurciriez-vous votre cœur comme l’ont endurci les Égyptiens et Pharaon ? Ne les ont-ils pas renvoyés et laissés partir lorsqu’il s’est joué d’eux ? 7 Maintenant, prenez et préparez un chariot neuf et deux vaches qui allaitent et n’ont pas porté le joug :z vous attellerez les vaches au chariot et vous ramènerez leurs petits en arrière à l’étable.a

z Un chariot neuf (cf. 2 S 6.3), des vaches qui n’ont pas porté le joug (cf. Nb 19.2 ; Dt 21.3) sont choisis pour accomplir une action sacrée selon un procédé qui est proche de celui de la divination. Si Dieu le veut, les vaches prendront la direction d’Israël malgré leur instinct maternel.

a Littéralement « à la maison ». L’intervention de Dieu est d’autant plus éclatante que les obstacles sont plus nombreux, cf. 1 R 18.

8 Vous prendrez l’arche de Yahvé et vous la placerez sur le chariot. Quant aux objets d’or que vous leur avez apporté comme réparation, vous les mettrez dans un coffre, à côté d’elle. Vous la renverrez et elle partira. 9 Puis vous regarderez si elle monte à Bet-Shémesh en prenant le chemin de son territoire, alors c’est lui qui nous a fait ce grand mal. Sinon, nous saurons que ce n’est pas sa main qui nous a frappés et pour nous ce n’était qu’un accident. »b

b Dans le récit, les pronoms se rapportent à l’arche (masculin en hébreu) et non au chariot (féminin en hébreu). On passe facilement de Dieu à l’arche, signe de sa présence.

10 Ainsi firent les gens : ils prirent deux vaches qui allaitaient et ils les attelèrent au chariot, mais ils retinrent les petits à l’étable. 11 Ils placèrent l’arche de Yahvé sur le chariot, ainsi que le coffre avec les rats d’or et les images de leurs tumeurs.

12 Les vaches prirent tout droit le chemin de Bet-Shémesh et elles marchaient sur une seule voie en meuglant, sans dévier ni à droite ni à gauche. Les princes des Philistins les suivirent jusqu’au territoire de Bet-Shémesh.

L’arche à Bet-Shémesh.

13 À Bet-Shémesh les gens faisaient la moisson des blés dans la plaine. Levant les yeux, ils virent l’arche et ils se réjouirent de la voir. 14 Lorsque le chariot arriva au champ de Josué, un habitant de Bet-Shémesh, il s’y arrêta. Il y avait là une grande pierre.c On fendit le bois du chariot et les vaches on les offrit en holocauste à Yahvé.

c Toute grande pierre peut servir d’autel, 14.33.

15 Les lévites avaient descendud l’arche de Yahvé et le coffre qui était près d’elle et qui contenait les objets d’or, et ils les placèrent sur la grande pierre. Ce jour-là, les gens de Bet-Shémesh offrirent des holocaustes et firent des sacrifices à Yahvé.

d Le v. 15 interrompt le récit et précise qui peut toucher l’arche et la transporter.

16 Les cinq princes des Philistins virent cela et retournèrent à Éqrôn ce jour-là.

17 Voici les tumeurs d’or que les Philistins apportèrent en réparation à Yahvé : pour Ashdod une, pour Gaza une, pour Ashqelôn une, pour Gat une, pour Éqrôn une. 18 Et des rats d’or, autant que toutes les villes des Philistins, celles des cinq princes, depuis les villes fortes jusqu’aux villages ouverts, et jusqu’à la grande pierre où on déposa l’arche de Yahvé ; encore aujourd’hui elle est dans le champ de Josué, un habitant de Bet-Shémesh.e

e « et jusqu’à la grande pierre » corr. d’après le grec ; « jusqu’à la grande prairie » hébr.

19 Dieu frappa parmi les hommes de Bet-Shémesh, car ils avaient regardé à l’intérieur de l’arche de Yahvé. Il frappa parmi le peuple soixante-dix hommes (cinquante mille hommes).f Le peuple fut en deuil, car Yahvé avait frappé dans le peuple un grand coup.g

f Verset de traduction difficile. Le verbe « frapper » a comme sujet Dieu, ce qui est implicite dans le texte. La faute commise n’est pas claire ; on l’a interprétée comme la volonté de découvrir le contenu de l’arche. « Cinquante mille hommes » peut être une glose, à moins de comprendre « soixante-dix hommes sur cinquante mille ».

g Après les Philistins, les Israélites éprouvent combien l’arche est redoutable à qui ne la respecte pas, cf. 2 S 6.7.

L’arche à Qiryat-Yéarim.

20 Alors les gens de Bet-Shémesh dirent : « Qui pourrait tenir en face de Yahvé, ce Dieu Saint ? Chez qui montera-t-il loin de nous ? » 21 Ils envoyèrent des messagers aux habitants de Qiryat-Yéarimh en disant : « Les Philistins ont rendu l’arche de Yahvé. Descendez et faites-la monter chez vous. »

h Ville, appelée aussi Baala (Jos 15.9) où l’arche demeurera jusqu’à ce que David la fasse venir à Jérusalem (2 S 6.1-8).

7 Les gens de Qiryat-Yéarim vinrent et firent monter l’arche de Yahvé.

Ils la conduisirent dans la maison d’Abinadab, sur la hauteur, et ils consacrèrenti son fils Éléazar pour garder l’arche de Yahvé.

i Bien qu’il ne soit pas lévite, cf. Jg 17.5.

Samuel juge et libérateur.j

2 Depuis le jour où l’arche fut installée à Qiryat-Yéarim, bien des jours s’écoulèrent et cela fit vingt ans. Toute la maison d’Israël soupira après Yahvé.

j Ce chap. n’est pas la suite du précédent Samuel n’y paraissait pas et il joue ici le premier rôle. Le récit est généralement considéré come la préface à une version « antimonarchiste » de l’institution de la royauté, qu’on trouverait dans 8 ; 10.17-24 ; 12. C’est plutôt une tradition particulière du sanctuaire de Miçpa. Elle expliquait le nom d’Ében-ha-Ézèr par un secours apporté par Dieu en réponse à une liturgie de pénitence. Samuel fait figure d’intercesseur, comme Moïse, Ex 32.11 ; cf. Jr 15.1, et de juge, comme Moïse encore, Ex 18.13s. D’après les vv. 15-17, Samuel et ses fils après lui, 8.1-13, furent les derniers des « petits » Juges, Jg 10.1-5 ; 12.8-15. Les vv. 13-14 le transforment en un « grand » Juge, un libérateur, mais cela ne s’accorde pas avec 9.16 ; 10.5 ; 13-14. La libération du territoire fut tentée par Saül et réalisée par David.

3 Alors Samuel dit à toute la maison d’Israël : « Si c’est de tout votre cœur que vous revenez à Yahvé, écartez les dieux de l’étranger du milieu de vous, et les Astartés, fixez votre cœur en Yahvé et ne servez que lui : alors il vous délivrera de la main des Philistins. » 4 Les Israélites écartèrent donc les Baals et les Astartés et ne servirent que Yahvé.

5 Samuel dit : « Rassemblez tout Israël à Miçpak et je prierai Yahvé en votre faveur. »

k Miçpa était un sanctuaire où se réunissait l’ancien Israël, v. 6 ; 10.17-24, cf. Jg 20.1, 3 ; 21.1, 5, 8. Il faut distinguer cette Miçpa de celle de 1 R 15.22 et Jr 40-41, qui est localisée à Tell en-Nasbeh, où l’occupation israélite n’a été importante qu’après Salomon. Miçpa est un nom commun qui signifie « la Guette » et l’on est tenté d’identifier la Miçpa de l’époque des Juges et de Samuel avec la hauteur de Nebi-Samwil, poste d’observation exceptionnel, au nord de Jérusalem, qui serait le haut lieu de Gabaôn. « Le plus grand haut lieu » à l’époque de Salomon (1 R 3.4).

6 Ils se rassemblèrent donc à Miçpa, ils puisèrent de l’eau qu’ils répandirent devant Yahvé, ils jeûnèrent ce jour-là et ils dirent : « Nous avons péché contre Yahvé. » Et Samuel jugea les Israélites à Miçpa.

7 Lorsque les Philistins apprirent que les Israélites s’étaient rassemblés à Miçpa, les princes des Philistins montèrent contre Israël. Les Israélites l’apprirent et ils eurent peur des Philistins. 8 Les Israélites dirent à Samuel : « Ne reste pas muet en nous abandonnant ! Crie vers Yahvé notre Dieu, pour qu’il nous délivre de la main des Philistins. » 9 Samuel prit un agneau de lait et l’offrit en holocauste complet à Yahvé ; Samuel cria vers Yahvé en faveur d’Israël et Yahvé lui répondit. 10 Pendant que Samuel offrait l’holocauste, les Philistins engagèrent le combat contre Israël, mais Yahvé ce jour-là tonna à grand fracas sur les Philistins, il les frappa de panique et ils furent défaits devant Israël. 11 Les hommes d’Israël sortirent de Miçpa et poursuivirent les Philistins, et ils les battirent jusqu’en dessous de Bet-Kar.l

l Site inconnu. On a proposé de corriger en Bet-Horôn.

12 Alors Samuel prit une pierre et la dressa entre Miçpa et La Dent, et il lui donna le nom d’Ében-ha-Ézèr, en disant : « C’est jusqu’ici que Yahvé nous a secourus. »m

m Le nom signifie « pierre du secours ». Le site est différent de l’Ében-ha-Ézér de 4.1 qui était le lieu d’une défaite. C’est sur une victoire que s’achève la judicature de Samuel.

13 Les Philistins furent abaissés. Ils ne revinrent plus sur le territoire d’Israël et la main de Yahvé fut sur les Philistins pendant toute la vie de Samuel. 14 Les villes que les Philistins avaient prises à Israël lui revinrent depuis Éqrôn jusqu’à Gat, et Israël délivra leur territoire de la main des Philistins. Il y eut paix entre Israël et les Amorites.

15 Samuel jugea Israël pendant toute sa vie. 16 Il allait chaque année faire une tournée par Béthel, Gilgal, Miçpa, et il jugeait Israël en tous ces endroits.

17 Puis il revenait à Rama, car c’est là qu’il avait sa maison et là qu’il jugeait Israël, là qu’il construisit un autel pour Yahvé.