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Bible de Jérusalem

Ésaïe 2-5

La paix perpétuelle.

2 Vision d’Isaïe,p fils d’Amoç,q au sujet de Juda et de Jérusalem.r

p Isaïe s’attaque rarement à des pratiques proprement païennes, cf. 2.6-8. Ces arbres n’étaient pas directement un objet de culte, mais abritaient les pratiques religieuses empruntées aux Cananéens, cf. Dt 12.2, où les références citées indiquent que cet abus s’étendait au royaume de Juda aussi bien qu’à celui d’Israël.

q Cet oracle se retrouve, pour l’essentiel, dans Mi 4.1-3. Son origine est discutée. L’opinion la plus probable est que Mi dépend ici d’Is ; les arguments contre l’authenticité isaïenne du texte (en particulier son universalisme) ne sont pas décisifs.

r Ce nouveau titre introduit la petite collection d’oracles des chap. 2-5.

2 Il arrivera dans la suite des temps
que la montagne de la maison de Yahvé
sera établie en tête des montagnes
et s’élèvera au-dessus des collines.
Alors toutes les nations afflueront vers elle,
3 alors viendront des peuples nombreux qui diront :
« Venez, montons à la montagne de Yahvé,
à la maison du Dieu de Jacob,
qu’il nous enseigne ses voies
et que nous suivions ses sentiers. »
Car de Sion vient la Loi
et de Jérusalem la parole de Yahvé.
4 Ils jugera entre les nations, il sera l’arbitre de peuples nombreux.
Ils briseront leurs épées pour en faire des socs
et leurs lances pour en faire des serpes.
On ne lèvera plus l’épée nation contre nation,
on n’apprendra plus à faire la guerre.

s Yahvé.

5 Maison de Jacob, allons, marchons à la lumière de Yahvé.

L’éclat de la majesté de Yahvé.t

6 Oui, tu as rejeté ton peuple, la maison de Jacob,
car il regorge depuis longtemps de magiciens, comme les Philistins,u
il surabonde d’enfants d’étrangers.

t Ce poème, dont l’unité est marquée par le retour des mêmes formules (vv. 9, 11, 17 et 10, 19, 21), date de la première période de l’activité d’Isaïe, alors que Juda achève une longue période de prospérité, sous Ozias et Yotam ; mais il pourrait aussi viser Samarie qui n’était pas encore tombée dans l’anarchie et la décadence qu’elle allait bientôt connaître. Le prophète annonce une intervention fulgurante de Yahvé.

u On corrige souvent « depuis longtemps », miqqedem, en « de devins » qosemîm, ou « de divination » miqsam. Cette correction n’a pas l’appui des versions ; elle justifie cependant le « et » placé devant « magiciens », que notre traduction doit supprimer. — La divination a été très pratiquée dans l’Orient ancien et elle le fut aussi en Israël, 1 S 28.3s ; 8.19, malgré les condamnations d’Ex 22.17 ; Lv 19.31 ; 20.27 ; Dt 18.10-11, 14. On ne sait rien sur la divination chez les Philistins, mais leurs devins sont mentionnés en 1 S 6.2.

7 Le pays s’est rempli d’argent et d’or, ses trésors sont sans limites ;
le pays s’est rempli de chevaux, ses chars sont sans nombre ;
8 le pays s’est rempli de faux dieux,
eux se prosternent devant l’œuvre de leurs mains,
devant ce qu’ont fabriqué leurs doigts.
9 Le mortel s’est humilié, l’homme s’est abaissé :
ne les relève pas !
10 Va dans le rocher, terre-toi dans la poussière
devant la Terreur de Yahvé, devant l’éclat de sa majesté,
quand il se lèvera pour faire trembler la terre.
v

v « quand il... la terre » grec ; omis par hébr. Tout le v. et les derniers mots, peut-être corrompus, du v. 9, manquent dans 1QIsa. Le v. est repris aux vv. 19 et 21.

11 L’orgueil humain baissera les yeux,
l’arrogance des hommes sera humiliée,
Yahvé sera exalté, lui seul, en ce jour-là.

12 Oui, ce sera un jour de Yahvé Sabaotw
sur tout ce qui est orgueilleux et hautain,
sur tout ce qui est élevé, pour qu’il soit abaissé ;

w Sur le « jour de Yahvé », cf. Am 5.18. Ici, l’intervention divine est décrite comme un tremblement de terre, vv. 10, 19, 21.

13 sur tous les cèdres du Liban, hautains et élevés,
et sur tous les chênes de Bashân ;
14 sur toutes les montagnes hautaines
et sur toutes les collines élevées ;
15 sur toute tour altière
et sur tout rempart escarpé ;
16 sur tous les vaisseaux de Tarsis
et sur tout ce qui paraît précieux.x

x Texte incertain. On corrige souvent en « bateaux », qui donne un bon parallélisme.

17 L’orgueil humain sera humilié,
l’arrogance de l’homme sera abaissée,
et Yahvé sera exalté, lui seul, en ce jour-là.

18 Les faux dieux, en masse, disparaîtront.
19 Pour eux, ils iront dans les cavernes des rochers
et dans les fissures du sol,
devant la Terreur de Yahvé, devant l’éclat de sa majesté,
quand il se lèvera pour faire trembler la terre.
20 En ce jour-là, l’homme jettera aux taupes et aux chauves-souris ses faux dieux d’argent et ses faux dieux d’or, ceux qu’on lui a fabriqués pour qu’il les adore,
21 il s’en ira dans les crevasses des rochers et dans les fentes des falaises,
devant la Terreur de Yahvé, devant l’éclat de sa majesté,
quand il se lèvera pour faire trembler la terre.

22 Tenez-vous à l’écart de l’homme, qui n’a qu’un souffle dans les narines !
À combien l’estimer ?y

y Le v. 22, absent du grec et étranger au contexte, est probablement une glose.

L’anarchie à Jérusalem.z

3 Oui, voici que le Seigneur Yahvé Sabaot
va ôter de Jérusalem et de Juda ressource et provision
— toute réserve de pain et toute réserve d’eau —,

z On date ce poème du début du règne d’Achaz, vers 735. Avec un roi encore jeune et sous la menace d’une intervention étrangère, cf. 2 R 15.37, le pays risque de sombrer dans l’anarchie. Ce texte paraît composé de deux pièces originairement indépendantes, vv. 1-9a et 12-15 ; les vv. 9-11 sont une addition.

2 héros et homme de guerre, juge et prophète, devin et vieillard,
3 capitaine et dignitaire, conseiller, architecte et enchanteur.
4 Je leur donnerai comme princes des adolescents,
et des gaminsa feront la loi chez eux.

a Ce pourrait être aussi un pluriel d’abstraction ; il faudrait alors comprendre « le caprice ».

5 Les gens se molesteront l’un l’autre, et entre voisins ;
le jeune garçon s’en prendra au vieillard,
l’homme de peu au notable.
6 Oui, un homme saisira son frère dans la maison paternelle :
« Tu as un manteau, tu seras notre chef,
et cette chose branlante, qu’elle te soit confiée ! »
7 Et l’autre, en ce jour-là, s’écriera :
« Je ne suis pas un guérisseur ;
chez moi, il n’y a ni pain ni manteau,
ne me faites pas chef du peuple ! »
8 Car Jérusalem a trébuché et Juda est tombé,
oui, leurs paroles et leurs actes s’adressent à Yahvé,
pour insulter ses regards glorieux.
9 Leur complaisance témoigne contre eux,
ils étalent leur péché comme Sodome.
Ils n’ont pas dissimulé, malheur à eux !
car ils ont préparé leur propre ruine.
10 Dites : le juste, qu’il est heureux !
car il se nourrira du fruit de ses actes.
11 Malheur au méchant, malfaisant !
car il sera traité selon ses œuvres.b

b Les vv. 10-11, de contenu sapientiel, interrompent la description de l’anarchie ; le v. 10 est très différent dans le grec.

12 Ô mon peuple, ses oppresseurs le mettent au pillage,
et des exacteurs font la loi chez lui.c
Ô mon peuple, tes guides t’égarent,
ils ont effacé les chemins que tu suis.

c « mettent au pillage » conj. ; singulier hébr. — « des exacteurs » versions ; « des femmes » hébr.

13 Yahvé s’est levé pour accuser,
il est debout pour juger les peuples.
14 Yahvé entre en jugement,
avec les anciens et les princes de son peuple :

« C’est vous qui avez dévasté la vigne,
la dépouille du malheureux est dans vos maisons.
15 De quel droit écraser mon peuple
et broyer le visage des malheureux ? »
Oracle du Seigneur Yahvé Sabaot.

Les femmes de Jérusalem.

16 Yahvé dit :
Parce qu’elles font les fières, les filles de Sion,
qu’elles vont le cou tendu et les yeux provocants,
qu’elles vont à pas menus, en faisant sonner les anneaux de leurs pieds,
17 le Seigneur rendra galeux le crâne des filles de Sion,
Yahvé dénudera leur front.

18 Ce jour-là le Seigneur ôtera l’ornement de chaînettes, les médaillons et les croissants, 19 les pendentifs, les bracelets, les breloques, 20 les diadèmes et les chaînettes de chevilles, les parures, les boîtes à parfums et les amulettes, 21 les bagues et les anneaux de narines, 22 les vêtements de fête et les manteaux, les écharpes et les bourses, 23 les miroirs, les linges fins, les turbans et les mantilles.d

d Ce catalogue de colifichets, vv. 18-23, est peut-être une addition. Le sens précis de beaucoup de ces termes est incertain.

24 Alors, au lieu de baume, ce sera la pourriture,
au lieu de ceinture, une corde,
au lieu de coiffure, la tête rase,
au lieu d’une robe d’apparat, un pagne de grosse toile,e
et la marque au fer rouge au lieu de beauté.

e En hébreu saq, toile grossière dont on faisait des « sacs », Gn 42.25, etc., mais aussi un vêtement de pénitence ou de deuil, qu’on portait sur le corps nu, 20.2 ; Gn 37.34 ; 1 R 20.31 ; 21.27 ; Am 8.10, etc.

La misère à Jérusalem.

25 Tes hommes tomberont sous l’épée,
et tes braves dans le combat.
26 Ses portes gémiront et seront dans le deuil ;
désertée, elle s’assiéra par terre.

4 Et sept femmes s’arracheront un homme, en ce jour-là, en disant : « Nous mangerons notre pain, nous mettrons notre propre manteau, laisse-nous seulement porter ton nom. Ôte notre déshonneur. »f

f Dans la ville décimée par la guerre, 3.25-26, plusieurs femmes demanderont à un même homme de « porter son nom », c’est-à-dire qu’il soit leur maître, d’après le sens de l’expression en hébreu. Les orgueilleuses filles de Jérusalem deviendront des concubines.

Le germe de Yahvé.g

2 Ce jour-là, le germe de Yahvé deviendra parure et gloire,
le fruit de la terre deviendra fierté et ornement
pour les survivants d’Israël.

g Le « germe » et le « fruit de la terre » désignent soit le Messie, Jr 23.5 = 33.15 ; Za 3.8 ; 6.12, soit le « reste » d’Israël (cf. note suivante) comparé à un arbre renaissant sur le sol de Palestine. Les vv. 2-6, ou seulement 4-6, sont généralement considérés comme une composition postexilique.

3 Le reste laissé à Sion, ce qui survit à Jérusalem, sera appelé saint,
tout ce qui est inscrit pour la vie à Jérusalem.h

h Israël infidèle sera châtié. Mais, parce que Dieu aime son peuple, un petit « Reste » échappera à l’épée des envahisseurs. Déjà connu d’Amos, Am 3.12 ; 5.15 ; 9.8-10, le thème est repris par Isaïe, 6.13 ; 7.3 et 10.19-21 ; 28.5-6 ; 37.4 (= 2 R 19.4) ; 37.31-32, cf. Mi 4.7 ; 5.2 ; So 2.7, 9 ; 3.12 ; Jr 3.14 ; 5.18 ; Ez 5.3 ; 9. Demeuré à Jérusalem, ce Reste, purifié et désormais fidèle, redeviendra une nation puissante. Après la catastrophe de 587, une idée nouvelle apparaît le Reste se trouvera parmi les déportés, Ez 12.16 ; Ba 2.13, c’est en exil qu’il se convertira, Ez 6.8-10, cf. Dt 30.1-2, et Dieu alors le rassemblera pour la restauration messianique, 11.11, 16 ; Jr 23.3 ; 31.7 ; 50.20 ; Ez 20.37 ; Mi 2.12-13. Après le retour de l’exil, le Reste, de nouveau infidèle, sera encore décimé et purifié, Za 1.3 ; 8.11 ; Ag 1.12 ; Ab 17 = Jl 3.5 ; Za 13.8-9 ; 14.2. En fait, c’est le Messie qui sera le véritable « Germe » de l’Israël nouveau et sanctifié, 11.1, 10, cf. 4.2 ; Jr 23.3-6. — À l’inverse d’Israël, les nations païennes n’auront pas de « reste », 14.22, 30 ; 15.9 ; 16.14 ; Ez 21.37 ; Am 1.8 ; Ab 18.

4 Lorsque le Seigneur aura lavé la saleté des filles de Sion
et purifié Jérusalem du sang répandu,
au souffle du jugement et au souffle de l’incendie,
5 Yahvé créera partout sur la montagne de Sion et sur ceux qui s’y assemblent
une nuée le jour,
et une fumée avec l’éclat d’un feu flamboyant, la nuit.i
Car sur toute gloire il y aura un dais

i Évocation de la colonne de nuée ou de feu qui guida les Israélites à la sortie d’Égypte. Cette allusion à l’Exode confirme la date tardive du poème cf. 10.26, qui est une addition, 11.15-16, qui est exilique, et la présentation du retour de l’Exil comme un nouvel Exode dans le Second Isaïe, 40.3.

6 et une hutte
pour faire ombre le jour contre la chaleur,
et servir de refuge et d’abri contre l’averse et la pluie.

Le chant de la vigne.j

5 Que je chante à mon bien-aimé
le chant de mon ami pour sa vigne.
Mon bien-aimé avait une vigne,
sur un coteau fertile.

j Poème composé par Isaïe au début de son ministère, peut-être à partir d’une chanson de vendanges. Le thème de la vigne Israël, choisie puis rejetée, déjà amorcé par Osée, Os 10.1, sera repris par Jérémie, Jr 2.21 ; 5.10 ; 6.9 ; 12.10, et par Ézéchiel, Ez 15.1-8 ; 17.3-10 ; 19.10-14. Cf. Ps 80.9-19 ; 27.2-5. Jésus le transposera dans la parabole des vignerons homicides, Mt 21.33-44p (cf. aussi le figuier stérile, Mt 21.18-19). En Jn 15.1-2, il révélera le mystère de la « vraie » vigne. — Autres aspects du thème de la vigne en Dt 32.32-33 et Si 24.17.

2 Il la bêcha, il l’épierra, il y planta du raisin vermeil.k
Au milieu il bâtit une tour, il y creusa même un pressoir.
Il attendait de beaux raisins : elle donna des raisins sauvages.

k En hébreu soreq, nom d’un plant de choix, 16.8 ; Jr 2.21, cf. Gn 49.11, désigné par la couleur de ses grappes.

3 Et maintenant, habitants de Jérusalem et gens de Juda,
soyez juges entre moi et ma vigne.
4 Que pouvais-je encore faire pour ma vigne que je n’aie fait ?
Pourquoi espérais-je avoir de beaux raisins,
et a-t-elle donné des raisins sauvages ?
5 Et maintenant, que je vous apprenne ce que je vais faire à ma vigne !
en ôter la haie pour qu’on vienne la brouter,
en briser la clôture pour qu’on la piétine ;
6 j’en ferai un maquis : elle ne sera ni taillée ni sarclée,
ronces et épines y croîtront,
j’interdirai aux nuages d’y faire tomber la pluie.
7 Eh bien ! la vigne de Yahvé Sabaot, c’est la maison d’Israël,
et l’homme de Juda, c’est son plant de choix.
Il attendait le droit et voici l’iniquité, la justice et voici les cris.

Malédictions.l

8 Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison,
qui joignent champ à champ jusqu’à ne plus laisser de place
et rester seuls habitants au milieu du pays.

l Ces malédictions datent aussi du début du ministère d’Isaïe, mais elles n’ont peut-être pas été toutes prononcées à la même occasion. Aux six malédictions de 5.2-24, on propose d’en ajouter une septième, 10.1-4, qui aurait été déplacée par accident. La malédiction est l’un des genres de la prédication prophétique, cf. les références marginales. Ici, Isaïe est assez proche d’Amos.

9 À mes oreilles, Yahvé Sabaot l’a juré :
Oui, nombre de maisons seront réduites en ruine,
grandes et belles, elles seront inhabitées.
10 Car dix arpents de vigne ne donneront qu’un tonnelet,
et un muid de semence ne produira qu’une mesure.m

m Dix arpents, semed, correspondent à peu près à deux hectares et demi, un tonnelet, bat, à une quarantaine de litres ; la mesure, épha, a la même contenance pour le grain, et le muid homer, vaut dix fois plus.

11 Malheur à ceux qui se lèvent tôt le matin pour courir à la boisson,
qui s’attardent le soir, ivres de vin.
12 Ce ne sont que harpes et cithares, tambourins et flûtes,
et du vin pour leurs beuveries.
Mais pour l’œuvre de Yahvé, pas un regard,
l’action de ses mains, ils ne la voient pas.
13 C’est pourquoi mon peuple est exilé, faute de connaissance ;
sa noblesse : des gens affamés ! ses foules séchant de soif !
14 n C’est pourquoi le shéol dilate sa gorge et bée d’une gueule démesurée.
Ils y descendent, ses nobles, ses foules
et ses criards, et ils y exultent.

n Les vv. 14-16 paraissent hors de contexte et peuvent être rattachés au poème de 2.6-22 dont le « refrain », vv. 9 et 11, se retrouve ici, v. 15.

15 Le mortel a été humilié, l’homme a été abaissé
et les yeux des orgueilleux sont baissés.
16 Yahvé Sabaot fut exalté dans son jugement
et le Dieu saint a révélé sa sainteté dans la justice.o

o La « sainteté » de Dieu, cf. 6.3, le « sépare » de toutes les créatures. Mais cette sainteté transcendante de Dieu s’exprime dans ses rapports avec les hommes par sa « justice » qui en souligne le caractère moral Dieu récompense le bien et punit le mal, lors de son « jugement ». À cette justice ne s’oppose pas la bonté miséricordieuse, car c’est encore sa « justice » qu’accomplit le Dieu fidèle à ses promesses en pardonnant à Israël ou au pécheur repentant, Mi 7.9 ; Ps 51.16. La justice sera par excellence la vertu du règne messianique, quand Dieu aura transmis à son peuple quelque chose de sa sainteté, 1.26 ; 4.3 ; cf. Mt 5.48.

17 Les agneaux paîtront comme dans leurs pâtures,
les pacages dévastés des bêtes grasses seront la nourriture des chevreaux.p

p « chevreaux » grec ; « étrangers » hébr.

18 Malheur à qui tire la faute avec les liens de la tromperie,
et le péché comme avec un trait de chariot ;
19 à ceux qui disent : « Qu’il fasse vite, qu’il hâte son œuvre,q
pour que nous la voyions ;
que s’approche et se réalise le projet du Saint d’Israël,
que nous le reconnaissions. »

q C’est le « jour de Yahvé », que le prophète a annoncé, 2.12, et que les sceptiques appellent sur eux par défi.

20 Malheur à ceux qui appellent le mal bien et le bien mal,
qui font des ténèbres la lumière et de la lumière les ténèbres,
qui font de l’amer le doux et du doux l’amer.
21 Malheur à ceux qui sont sages à leurs propres yeux
et s’estiment intelligents.
22 Malheur à ceux qui sont des héros pour boire du vin
et des champions pour mélanger la boisson,
23 qui acquittent le coupable pour un pot-de-vin,
et refusent aux justes la justice.

24 Oui, comme la flamme dévore la paille,
comme le foin s’enflamme et disparaît,
leur racine ressemblera à de la pourriture,
leur bourgeon sera emporté comme la poussière.
Car ils ont rejeté la loi de Yahvé Sabaot,
ils ont méprisé la parole du Saint d’Israël.

La colère de Yahvé.r

25 C’est pourquoi la colère de Yahvé s’est enflammée contre son peuple ;
il a levé la main contre lui pour le
frapper,
les montagnes ont tremblé,
et les cadavres sont comme des ordures au milieu des rues.
Avec tout cela la colère de Yahvé ne s’est pas calmée,
sa main reste levée.

r On rattache 5.25-30 au poème de 9.7-20, dont on retrouve ici le refrain.

Appel aux envahisseurs.s

26 Il dresse un signal pour le peuplet lointain,
il le siffle des extrémités de la terre,
et voici qu’aussitôt il accourt, léger.

s On pourrait rattacher ce poème à l’une des grandes invasions assyriennes au temps d’Isaïe celle de Téglat-Phalasar III en 735 ou 732, celle de Salmanasar en 722, celle de Sargon en 711 ou celle de Sennachérib en 701. Mais l’envahisseur n’est pas nommé et ce peut être l’expression d’un thème général Dieu appelle une nation puissante comme instrument de sa vengeance, cf. Dt 28.49-52 et 10.6.

t « le peuple » conj. d’après le contexte ; hébr. a le pluriel.

27 Chez lui nul n’est fatigué, nul ne trébuche,
nul ne dort ni ne sommeille,
nul ne dénoue la ceinture de ses reins,
nul n’a la courroie de ses sandales rompue.
28 Ses flèches sont aiguisées et tous ses arcs tendus,
les sabots de ses chevaux, on dirait du rocher,
et ses roues, un tourbillon.
29 Son rugissement est celui d’une lionne,
il rugit comme les lionceaux,
il gronde et saisit sa proie,
il l’emporte et nul ne le fait lâcher ;
30 il gronde contre lui,u en ce jour-là, comme gronde la mer.
Il regarde le pays : et voici les ténèbres, l’angoisse,
et la lumière est obscurcie par les nuages.v

u Non l’envahisseur, mais le pays de Juda, cf. la suite du v.

v Les ténèbres du « jour de Yahvé », Am 5.18, 20.